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«Les Femmes de Visegrad» à l’affiche en France

Présenté avec succès à Toronto, au Festival de San Sebastian, au Festival Cinéma européen des Arcs, au Festival des Films des Femmes de Créteil, le docu-fiction de la réalisatrice bosnienne Jasmila Zbanic, intitulé « Les Femmes de Visegrad/Za one koji ne mogu da govore » est à l’affiche en France comme dans toute l’Europe et les Etats Unis.

Il sera présenté bientôt au Sidney Film Festival. C’est le résultat de l’obstination et de la persévérance de deux femmes : d’abord de l’actrice australienne Kym Vercoe, qui est retournée en Bosnie plusieurs fois avant d’apprendre la terrible vérité sur l’enfer qu’ont vécu 200 jeunes filles et fillettes enfermées dans un hôtel nommé Vilina kosa – ce qui signifie Les Cheveux de Fée -; systématiquement et longtemps violées, enfin tuées et probablement brûlées.

Kym Vercoe a écrit une pièce de théâtre intitulée « Sept kilomètres nord est » et jouée longtemps par les comédiens de Sidney avant d’être vue par la cinéaste bosnienne qui a tourné le film : «Les femmes de Visegrad est un mémorial pour les femmes à qui aucun mémorial n’a été dédié. Comme dans la plupart des pays ayant connu le conflit, les personnes qui ont mené la guerre en Bosnie-Herzégovine font toujours partie de la police, de la justice, des institutions éducatives et politiques et ils protègent des criminels.»

Tournage clandestin

Le tournage clandestin sur place, sur le territoire ennemi de la République serbe, était très dangereux. L’actrice australienne a joué la touriste à merveille en visitant les musées, le pont, en compagnie de guides serbes qui inversent l’Histoire et cultivent le déni collectif. Elle témoigne : « Le pays a pu être heureux et prospère, j’étais en colère de ne trouver aucun mémorial, j’étais en colère contre les horreurs survenues là-bas, en colère contre moi même. Contre mon manque d’informations et le fait d’avoir été si mal guidée. C’est ce manque de connaissance et de responsabilité qui m’a poussée à agir », souligne Kym Vercoe.

Même si certains critiques rapprochent à la réalisatrice une caméra linéaire, voire plate, et même l’existence d’un vide, son film interpelle et fait réfléchir sur cette tragédie au coeur de l’Europe, qui c’est déroulée devant des yeux du monde. Jasmila Zbanic est sûre que c’était nécessaire de faire ce film qui ne laisse personne indifférent.

L’Histoire se falsifie au profit de quelqu’un, les crimes sont étouffés car nombreux se sont enrichis grâce à eux. Cette banalité est douloureuse et il fallait appeler à la responsabilité de tous, même de ceux qui, comme l’actrice australienne, ne sont pas de la région. Mais il faut en parler à la place des morts qui se sont tus pour toujours. « La Bosnie-Herzégovine a pu être un état heureux et prospère mais des voisins et certains concitoyens n’ont pas voulu le progrès. Ils ont fait l’enfer sur terre. Pourquoi? Je cherche la réponse dans mes films », affirme la cinéaste.

« Les femmes de Visegrad » sont à l’affiche depuis le 30 avril, dans toute la France.

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