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Plan social à un demi-milliard… L’«extinction» du Crédit Immobilier de France (CIF) est un «scandale d’État»

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Notre confrère Philippe Ries, de Médiapart, a eu accès à un document « strictement confidentiel » de 98 pages. Un document dont on comprend d’autant mieux le caractère « strictement confidentiel » qu’il ne se contente pas d’un simple rappel des faits, mais scelle aussi le sort de plus de 2000 salariés.

La crise comme bouc-émissaire

A l’origine de ce « scandale d’État », les conditions de la gestion « en extinction » du Crédit Immobilier de France (CIF).

Fin août 2012, confronté à des problèmes de liquidités, le Crédit Immobilier de France, qui se finançait exclusivement sur les marchés financiers – à la différence des banques de dépôt -, chutait, et le gouvernement – sous l’influence de la direction du Trésor et pour des raisons alors floues – lui portait le coup de grâce : après l’accord d’une garantie financière, les pouvoirs publics enjoignaient alors les dirigeants du groupe, pointés du doigt pour n’être pas parvenus à un rapprochement avec La Poste, à cesser la production en imposant des critères d’octroi trop strictes pour la clientèle modeste de l’établissement – pas de crédit au-delà de vingt ans, un apport personnel de 20% minimum et un taux d’endettement plafonné à 33%.  

Scandaleux, le coup dur porté aux ménages les plus modestes

Le Crédit immobilier de France était la seule institution reconnue en France pour sa capacité à aider les ménages très modestes à devenir propriétairestout en prenant les sûretés nécessaires pour que le risque soit maîtrisé.

En 2011, le CIF avait financé 34 000 projets immobiliers. La valeur moyenne des prêts consentis par le CIF s’élevait alors à 149 000 euros sur une durée de plus de 25 ans, pour des ménages fournissant un apport inférieur à 10% du prix d’achat et gagnant en moyenne deux Smic. Lorsque la décision avait pris d’éteindre l’activité, l’établissement ne comptait pas moins de 424 000 prêts en cours.

Le rôle essentiel du CIF était d’autant plus crucial que les conditions drastiques imposées par les banques traditionnelles ont fait chuter le nombre de ménages modestes en mesure de devenir propriétaires depuis 2012, malgré des taux d’intérêt bas.

Aucun dispositif n’est venu se substituer à la hauteur du rôle social endossé par le Crédit Immobilier de France. Scandaleux, mais c’est presque de l’histoire…

Scandaleux, le plus grand plan social de France

Secondes victimes, les personnels du Crédit Immobilier de France, victimes d’un plan de liquidation organisé par les pouvoirs publics français, et dont le feu vert a été donné le 4 avril, après que la Commission européenne a donné fin 2013  sa bénédiction.

Sur le site Médiapart, Philippe Ries en révèle les termes – pas moins de 1186 postes supprimés et un coût d’un demi-milliard d’euros – dans le détail. 1186 postes supprimés, voilà qui fait des pouvoirs publics les auteurs du premier plan social de France, en 2014.

Notre confrère a la formule juste, une formule qui laisse songeur, voire désespéré : « La lecture de ce document laisse songeur quant à la sophistication atteinte par la technostructure française, en trente années de choix du chômage de masse, pour l’accompagnement des destructions d’emplois. On se surprend à rêver de ce qui se passerait si le même savoir-faire était consacré à encourager leur création. »

Scandaleuses, les motivations inavouées du Trésor

Des solutions, il en existait sans doute. En tout cas, certaines n’avaient pas manqué d’être suggérées publiquement :

Faire du Crédit immobilier de France une banque publique du logement

Pour Philippe Ries, la motivation réelle est en fait la captation des fonds propres du CIF par l’État. Cet objectif, qu’il avait dénoncé dès le 2 septembre 2012, déjà sur Médiapart,  aurait subsisté à l’alternance de 2012 et aurait été orchestré par le directeur du Trésor, Ramon Fernandez. L’objectif serait désormais bel et bien atteint.

Scandale, scandale, scandale, scandale d’État.

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