Site icon La Revue Internationale

Préparation à Clairefontaine: une parenthèse enchantée?

shutterstock_173641304.jpgshutterstock_173641304.jpg

L’équipe de France va se rassembler au Centre National Technique de Clairefontaine en vue de la préparation de la Coupe du Monde au Brésil. Une tradition qui perdure depuis 1998, année de la première victoire française dans la compétition. Retour sur les moments clés de la place forte du football tricolore.

[image:1,l]

Valbuena et Sakho, ici à l’échauffement face à l’Ukraine, attendent leurs coéquipiers à Clairefontaine. (shutterstock.com)

A peine leurs championnats respectifs terminés que certains joueurs arrivent déjà à Clairefontaine. Ce sont d’abord les internationaux français qui évoluent outre-Manche, comme le capitaine Hugo Lloris ou le héros des barrages Mamadou Sakho, qui ont rallié le centre de Clairefontaine en Yvelines. Didier Deschamps dirigera donc son premier entraînement cet après-midi et rentre dans la dernière ligne droite avant la Coupe du Monde.

Clairefontaine, c’était mieux avant

Le projet Clairefontaine naît en 1976 de l’initiative du président de la FFF de l’époque Fernand Sastre. Ce dernier voit la création du Centre Technique National comme la première étape d’un parcours qui emmènerait la France au sommet du football mondial. Implantée dans la forêt de Montjoye à une cinquantaine de kilomètres de Paris, la nouvelle place forte du foot français est inaugurée en 1988 par Mitterrand et Sastre. Ce dernier, fidèle à l’état d’esprit qu’il veut inculquer au domaine, plante un chêne dans le parc du château en guise de symbole. « Clairefontaine se devra d’être à l’origine et au service de l’excellence, notre nation en est capable » ajoutait ce dernier.

Il ne se doutait sans doute pas qu’à peine dix ans plus tard, le CTNF abriterait les protagonistes qui ont écrit les plus belles pages du palmarès tricolore. En effet, la France organise la Coupe du Monde 1998 et en profite pour établir son camp de base à Clairefontaine pour la première fois de son histoire. Et on connaît la suite. Ironie du sort, Fernand Sastre décède le 13 juin 1998, moins d’un mois avant le sacre de ses anciens protégés. Cependant, la FFF tient à lui rendre hommage et renomme dans la foulée le CTNF « Centre Technique National Fernand Sastre ». La formule marche une nouvelle fois pour les championnats d’Europe 2000 et l’Equipe de France rentre dans une nouvelle dimension : elle est considérée comme la meilleure du monde.

A la Clairefontaine, les Bleus ont chaviré…

Qui aurait pu prévoir une telle déchéance de la dynastie Bleue ? Aimé Jacquet lui-même, sélectionneur en 98 : « A l’époque je pouvais compter sur des joueurs qui seraient morts sur le terrain pour aller la chercher (la Coupe du monde) ; j’ai peut-être tort, mais je ne vois pas la même flamme chez la nouvelle génération ». Aimé avait malheureusement vu juste : sous les ordres de Roger Lemerre, les champions du monde en titre ne sortent pas d’un groupe pourtant à leur portée (Sénégal, Uruguay et Danemark). Après une performance décevante lors de l’Euro 2004, Raymond Domenech devient sélectionneur des Bleus avec pour mission de remettre l’équipe nationale sur de bons rails d’ici la Coupe du Monde en Allemagne.  

Emmenés par un Zidane flamboyant et des individualités tournées vers le collectif, les Bleus échouent en finale. Là aussi, on connait la suite. Et on aimerait sûrement l’oublier. Le parcours épique de la France camoufle beaucoup de carences dans le jeu, mais aussi des fissures de plus en plus profondes au sein du groupe. Autrefois, les Deschamps, Blanc et autres Barthez ou Thuram se rendaient à Clairefontaine le sourire aux lèvres et l’ambition débordante. Désormais, les Nasri, Benzema, Ribéry, Gallas traînent les pieds et l’ambiance se détériore à vue d’œil. Pas de leader pour tirer la sonnette d’alarme, pas de match référence ou d’électrochoc pour inverser la vapeur : l’EDF finit consécutivement dernière de son groupe à l’Euro 2008 et à la Coupe du Monde 2010. Le groupe France avait alors sali le maillot bleu et humilié le pays entier avec l’épisode tristement célèbre du bus. Domenech démissionne dans la foulée ; les Bleus sont décimés.

A la Clairefontaine, des raisons d’espérer

Petite anecdote pour les superstitieux : de 2006 à 2010, le CTN a connu une importante période de rénovation. Une métaphore du terrible chantier qu’était l’équipe de France à l’époque ? Clairefontaine est désormais à la pointe de la technologie sportive. De son côté, l’EDF tente de panser ses plaies et nomme Laurent Blanc à sa tête. Le futur entraîneur du PSG s’appuie sur un groupe plus jeune et tente d’inculquer de nouvelles valeurs, celles d’un ancien joueur qui fut un élément majeur de la génération 98. Les Bleus s’inclinent contre l’Espagne en quart de finale de l’Euro, future vainqueur de la compétition.

Blanc quitte alors le navire, à la surprise générale ; et c’est son ami et ancien capitaine en Bleus Didier Deschamps qui lui succède. Ce dernier parvient à qualifier son équipe pour le Brésil, au terme d’un barrage contre l’Ukraine qui restera dans les mémoires. L’état d’esprit revanchard des Bleus les a réconciliés avec leur public. La notion d’un groupe homogène et soudé, ligne de conduite d’un certain Aimé Jacquet, est véhiculée par Deschamps qui n’hésite pas à mettre Nasri de côté, emblème malheureux des récents errements des Bleus.

Clairefontaine, qui fêtera bientôt ses 16 ans d’existence, est peut-être en train d’assister à la naissance d’une nouvelle génération de succès. Après une adolescence difficile, les beaux jours semblent se profiler au-dessus de la forêt de Montjoye. Paul Pogba, 21 ans et nouveau chef du milieu, incarnait ce nouveau souffle aux micros de la télévision italienne : « Quand on gagne la Coupe du Monde à domicile, j’ai 5 ans. Et je sais que c’est pareil pour beaucoup de coéquipiers: nous sommes tombés amoureux de ce sport à ce moment précis. Et ensuite on a eu mal, très mal ; le maillot bleu est synonyme de fierté, et on compte laver son honneur au Brésil ». Des paroles de guerrier. Sastre assurait dans son discours d’inauguration que « le Centre grandira plus rapidement que le chêne ». Et s’il en était de même pour cette génération ?

Un article d’Hugo Bruchet pour JOL Press

 

Quitter la version mobile