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Santé: «Les ONG, indispensables dans la vie des Grecs aujourd’hui »

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JOL Press : Quels sont les principaux problèmes entraînés par les coupes budgétaires dans le système de santé en Grèce ?
 

Giorgos Kassaras : Depuis le début de la crise, les coupes drastiques ont affaibli le secteur de la santé en Grèce : il y a une réduction de la capacité d’accueil et il n’y a plus de nouvelles embauches de médecins et d’infirmières… nous souffrons par conséquent d’un manque de personnel.

A cause de la crise économique, beaucoup de personnes ont perdu leur travail et donc leur couverture maladie : on estime aujourd’hui qu’entre 2 et 2,5 millions de personnes n’ont plus de couverture maladie en Grèce. Ces personnes qui ne peuvent plus être soignées par les hôpitaux en Grèce sont prises en charge par les ONG, comme Médecins du Monde.

JOL Press : La solidarité qui s’est développée dans la société grecque avec la crise était-elle perceptible dans le milieu de la santé ?
 

Giorgos Kassaras : En temps de crise, de nombreux médecins et infirmiers bénévoles font preuve de solidarité avec les personnes qui ont perdu leur couverture maladie. Ils sacrifient de leur temps pour s’investir comme bénévoles pour des organisations humanitaires. Au-delà de Médecins du Monde, il y a aussi des médecins bénévoles qui se regroupent pour œuvrer dans des municipalités et au sein d’organisations de médecins. Les patients sans couverture maladie ont besoin, non seulement de consulter, mais aussi de médicaments.

Les enfants dont les parents n’ont plus de couverture maladie ne sont plus couverts non plus et ne peuvent plus être vaccinés : ce sont donc les ONG qui effectuent les vaccins. Mais nous faisons preuve de solidarité pas seulement vis-à-vis des Grecs, mais également envers les migrants en Grèce, porte d’entrée vers l’Europe. Pour nous, tout le monde a le droit aux mêmes soins : nous ne faisons pas de discrimination.

JOL Press : Le profil des patients de Médecins du Monde a-t-il beaucoup changé depuis le début de la crise  ?
 

Giorgos Kassaras : Depuis quelques années, beaucoup plus de Grecs viennent se faire soigner dans nos centres de santé qu’avant… : les ONG sont devenues indispensables dans la vie des Grecs. Quand les ONG arrêteront de travailler, cela signifiera que la situation s’est améliorée en Grèce…

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JOL Press : Comment font les personnes qui sont atteintes de maladies graves ? Les ONG peuvent-elles les prendre en charge ?
 

Giorgos Kassaras : Médecins du Monde offre des soins de santé primaires, mais le département de l’assistance sociale sert de passerelle vers les hôpitaux publics qui viennent en aide aux personnes atteintes de maladies graves, comme les patients atteints de cancer par exemple. A notre échelle, nous essayons de rectifier les erreurs des politiques depuis longtemps: la Grèce est un peuple fort et nous espérons que nous allons réussir.

JOL Press : Le nombre de suicides a explosé en Grèce depuis le début de la crise. Parmi vos patients, constatez-vous une augmentation du nombre de cas de dépression ?  
 

Giorgos Kassaras : Au sein du département psychologique de nos polycliniques, beaucoup de personnes souffrent de dépression. Le nombre de suicides a effectivement beaucoup augmenté avec la crise économique. Le chômage chez les jeunes est une cause de dépression et de toxicomanie.

On constate une augmentation de la consommation de drogues – notamment de la « Sisa », surnommée la drogue de la crise à cause de son prix bon marché – mais pas seulement chez les Grecs… De nombreux cas de toxicomanie sont détectés chez les migrants qui viennent du Pakistan, d’Afghanistan, d’Algérie et du Maroc.

JOL Press : Avez-vous enregistré une augmentation du nombre d’attaques racistes depuis le début de la crise ?
 

Giorgos Kassaras : Oui, nous assistons à ce phénomène. Mais n’oublions pas une chose : les Grecs ont été un peuple de migrants : ils ne sont donc pas racistes par « nature », si l’on peut dire. Depuis le début de la crise, avec la montée du chômage chez les jeunes, des partis fascistes ont profité de la situation dans laquelle se trouve le pays. Nous avons constaté des actes de violence racistes des Grecs contre les migrants mais aussi de la violence entre les différentes communautés ethniques entre les migrants.

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Propos recueillis par Louise Michel D. pour JOL Press

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