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BNP Paribas sanctionnée: clients et actionnaires doivent-ils s’inquiéter?

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JOL Press : Quelles conséquences pourrait avoir l’amende infligée par les Etats-Unis à la BNP sur les usagers de la banque ?
 

Serge Maître : Il est évident que les clients de la BNP peuvent s’inquiéter mais il ne faut pas qu’ils tombent dans la frayeur. Pourquoi ? Parce que la valeur de l’amende est égale, approximativement, au bénéfice de l’année que BNP attendait pour 2014 [l’amende devrait être de 8 à 9 milliards de dollars, soit entre 5,88 et 6,62 milliards d’euros]. Ainsi, l’instrument de production bancaire, c’est-à-dire les agences et les employés, ne sont pas menacés. Concrètement, on retrouvera notre agence au coin de la rue.

Néanmoins, même s’il n’y a pas lieu de tomber dans la frayeur, on peut quand même s’inquiéter. La première crainte, c’est que la BNP succombe à la tentation tarifaire : cela veut dire qu’elle tenterait de rattraper au moins une partie de sa perte en faisant « valser » les étiquettes ou en créant de nouvelles tarifications. On a déjà eu dans le passé ce type de situation, mais seuls les mois qui viennent nous diront si l’établissement succombera.

La deuxième crainte, et elle est peut-être beaucoup plus réaliste, c’est que la BNP soit appelée à baisser la voilure : pour un établissement bancaire comme la BNP, cela signifie distribuer moins de crédits pour des raisons techniques et aussi parce qu’elle aura moins d’encours disponibles. Les TPE, artisans-commerçants, PMI-PME pourraient être les premiers à en faire les frais.

JOL Press : Avez-vous déjà reçu des plaintes des clients et pourquoi ?
 

Serge Maître : Les clients nous ont déjà saisis concernant des invitations impératives et impérieuses, adressées par la BNP dont ils sont clients depuis longtemps, à migrer vers « Hello Bank », un service bancaire sur Internet, créé il y a un an par la BNP.

On sait combien cette banque à distance permet à la BNP d’économiser des frais de salaires, d’employés, de locaux et même de papier. Nous avons reçu, à l’AFUB, certaines plaintes de clients qui disaient que la BNP les invitait à migrer vers « Hello Bank » ou à refuser cette invitation dans les deux mois. Dans le cas contraire, elle les orienterait vers « Hello Bank ». On peut se demander si ce n’est pas déjà une mesure destinée à gérer au moindre coût sa clientèle.

Il ne faut cependant pas noircir le trait. En 2013, la BNP avait organisé des plans sociaux. Le groupe avait fermé plus de 50 agences en France. Il y avait donc déjà un plan de restructuration. Ce que nous craignons, c’est que la mésaventure américaine de la BNP la conduise à poursuivre ce plan de restructuration.

JOL Press : Selon vous, la communication n’a pas été bien faite par BNP Paribas ?
 

Serge Maître : Si elle avait été bien faite, on ne recevrait pas de témoignages de clients préoccupés. Les clients voudraient qu’on leur dise clairement qu’il n’y aura pas de modification de crédits : ils attendent que la banque, qui a distribué un certain nombre de milliards d’euros l’année dernière, s’engage à ce que le même volume se retrouve sur la table l’année prochaine. Mais il n’y a pas de transparence. Depuis 2008, les personnes ont appris que parole de banquier ne vaut pas nécessairement réalité…

Ceux qui vont être à la peine sont surtout les porteurs d’actions ou de titres BNP : actionnaires ou salariés détenant des parts dans l’entreprise vont devoir se serrer la ceinture sans doute pendant deux ou trois ans. C’est que ce va tenter de limiter la BNP en procédant peut-être à un emprunt obligataire, pendant cette période de « vaches maigres » à laquelle les employés de banque ne sont pas habitués.

Propos recueillis par Anaïs Lefébure pour JOL Press

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Serge Maître est secrétaire général de lAssociation française des usagers des banques (AFUB).

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