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Brésil: Dilma Rousseff jouera le match retour

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Dilma Rousseff est arrivée au pouvoir en 2011 (Photo: Shutterstock.com)
 

JOL Press : Dilma Rousseff briguera bien un nouveau mandat. Quelles sont ses chances de l’emporter ? 
 

Stéphane Monclaire : Dilma Rousseff, 66 ans, reste largement favorite dans les sondages, avec 39% des intentions de vote, selon une récente enquête d’opinion. Toutefois, l’actuelle présidente est confrontée depuis quelques mois à une érosion progressive de sa popularité.

72% des électeurs souhaitent que ce scrutin soit synonyme de changement. Mais est-ce que cela veut dire un changement de dirigeant ? Un changement de la politique de Dilma Rousseff ? Je ne serais pas surpris que sa popularité continue de s’effriter dans les semaines à venir. 

JOL Press : Comment expliquer la chute de Dilma Rousseff dans les sondages ? 
 

Stéphane Monclaire : La situation économique du Brésil est préoccupante. La croissance a été revue à la baisse. Les économistes s’attendent désormais à une hausse du PIB de 1,24% en 2014, contre 1,44% auparavant. C’est un taux de croissance faible par rapport aux autres pays émergents des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud, ndlr).

Le taux d’investissement en recherche et développement est bas (17% contre 35% dans de nombreux pays). Les entreprises brésiliennes sont de moins en moins concurrentielles et la balance commerciale, pour les produits industriels, est de plus en plus déficitaire. A cela s’ajoutent un taux de productivité très faible et une inflation assez importante (6,5%).

Pour l’heure, le Brésil est quasiment en situation de plein-emploi. Mais l’industrie du pays est tellement fragile que les firmes commencent à mettre en place de vastes plans de licenciement. 

JOL Press : Quelle est la situation du Brésil sur le plan social ? 
 

Stéphane Monclaire : La population n’est pas révoltée, elle est inquiète. Le pouvoir d’achat a fortement progressé lorsque Lula était au pouvoir, entre 2003 et 2011, et au début du mandat de Dilma Rousseff. Le pouvoir d’achat continue d’augmenter, mais moins vite qu’avant.

De ce fait, la classe moyenne intermédiaire a du mal à rembourser ses crédits et se trouve très endettée. De son côté, la classe moyenne basse stagne. Certains individus ont même vu leur pouvoir d’achat diminuer et sont redescendus dans la couche populaire haute.

L’insatisfaction de la population s’explique aussi par les déficiences criantes des transports publics, de l’éducation et de la santé. Ce mécontentement est diffus, il ne se cristallise pas autour d’une revendication particulière. Les Brésiliens sont actuellement passionnés par le Mondial qu’ils rêvent de remporter. Ils semblent avoir remis à plus tard leurs doléances.

JOL Press : Quel est le sentiment des Brésiliens vis-à-vis de la classe politique ? 
 

Stéphane Monclaire : Le Parti des Travailleurs gouverne le pays depuis douze ans (Dilma Rousseff a succédé à son mentor Lula da Silva en 2011). On observe une certaine lassitude des électeurs. Cette usure du pouvoir fragilise la présidente et se ressent dans les enquêtes d’opinion.

L’électorat est extrêmement clivé : globalement, les couches populaires s’apprêtent à voter pour la candidate du Parti des Travailleurs, contrairement au reste de la population. Pour être réélue, Dilma Rousseff devra rassurer les classes moyennes. Pour l’heure, on ne peut pas dire qu’elle s’y prenne très bien… Une chose est sûre : la campagne ne sera pas facile.

Si les cadres du Parti des Travailleurs estiment que Dilma Rousseff risque de perdre l’élection présidentielle, ils pourraient demander à Lula de se présenter à sa place. C’est une éventualité.

Propos recueillis par Marie Slavicek pour JOL Press

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