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Depuis sa geôle qatarie, un otage français appelle au secours

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Extrait de « Qaptif, Un Français otage du Qatar », de Jean-Pierre Marongiu (Les Nouveaux Auteurs – mai 2014)

Voilà, la porte vient de se refermer lourdement. La pièce mesure approximativement six mètres de long et autant de large. C’est une dimension respectable en prenant en considération les critères européens. Encore que la relativité des proportions prend une tout autre valeur en prison.

En prison… et au Qatar plus particulièrement. Il m’a fallu plusieurs jours pour l’admettre. Il me faudra probablement le reste de ma vie pour le comprendre. Je suis désormais un prisonnier de droit commun. Comme tous ceux qui partagent ce dortoir, ils sont dix à respirer le même air, je n’ai aucune idée du temps dont je serai privé de ce qui me semblait être une évidence : ma liberté.

Au moins ne m’a-t-on pas pris, ni interdit, mes pensées iconoclastes, pas davantage que ce fond d’anarchie qui colore mes mots. Sans doute pense-t-on dans l’aréopage qatarien, qu’un penseur ne vaut que s’il est écouté… Un poète qatarien en a récemment fait les frais.

– Nous sommes tous Tunisiens face à la tyrannie d’un pouvoir sans partage. Une phrase innocente en France… mais qui le condamne à l’enfermement pour une durée indéterminée. Car c’est un crime que de ter nir l’image de cette tête d’épingle fichée dans les fesses du monde occidental.

– Le Qatar ? Ce n’est rien d’autre qu’un Bédouin assis sur une bouteille de gaz ! J’ai dit cela. Entre autres choses… Je n’ose imaginer ce que j’encours. Bien sûr, les proportions de la bouteille de gaz doivent être prises en compte dans cette boutade. Ce qui, par ailleurs, donne une idée assez juste du postérieur dudit Bédouin, l’obésité étant le deuxième fléau du Qatar après l’oisiveté.

Revenons au Bédouin. Le Bédouin en question, donc l’émir du Qatar, vient de laisser son trône, voire sa place, sur la bouteille, à son fils. Cela a surpris les observateurs, la transition s’étant produite bien plus tôt que prévu. Il est question ici des observateurs peu regardants sur les réalités du monde géopolitique et plus spécifiquement de ceux de ce micro-État qui se veut être la Suisse du Moyen-Orient.

[image:2,s]Le Qatar donc, comme son modèle transalpin, est prêt à toutes les compromissions pour maintenir l’équilibre instable de sa sécurité. Il n’est sans doute pas inutile d’informer lesdits spécialistes, ou qui se prévalent de l’être que le Qatar n’est qu’un désert. Encore une évidence ! Si on s’en réfère aux quelques arpents de sable et de pierre qui constituent cet État artificiel. Le désert auquel je fais référence ici est bien plus vaste et insondable. Il se trouve dans les coulisses du pouvoir d’un Émirat issu, comme bien d’autres, de la perfidie anglaise.

En écrivant ces lignes, je mesure non seulement les dimensions de ma cellule mais l’impact de l’effondre -ment de l’empire britannique. Comment la découpe chirurgicale du nouvel échiquier mondial s’est-elle opérée au lendemain de l’indépendance des colonies occidentales ? A-t-on pris en considération les ethnies ? Les cultures ? Les frontières géographiques ? Les conflits historiques ? Les religions ? En d’autres termes, a-t-on tenu compte de l’Humanité, ou bien des ressources énergétiques planétaires et de la meilleure des manières de s’en approprier ? Je dois laisser cela aux spécialistes. Après tout, je ne suis qu’un ingénieur, vaguement écrivain et présentement incarcéré pour une dizaine de chèques sans provision. C’est finalement cela qui me révolte le plus.

Bien petitement et dans l’étroitesse de mon bocal, j’ai toujours pris soin d’élever ma voix pour dénoncer les injustices. J’ai sans doute, et cela s’entend sans l’ombre d’un seul, déplu à de nombreuses personnes, celles dont les oreilles, probablement ensablées par les rafales de vent du désert, sont fragilisées par les intérêts de la nation ou par ceux, plus prosaïques, de leur tranquillité.

Les Rafales, pour les services diplomatiques français, avant d’être des vagues successives d’éléments primordiaux, sont des produits d’échanges commerciaux. La fierté de l’aéronautique militaire française fait l’objet d’un troc juteux avec le Bédouin précité, au point que son séant menace de se répandre sur les Champs Élysées. Ce qui, finalement, ne serait que justice, puisque la quasi-totalité de la plus belle avenue du monde lui appartient déjà.

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Jean-Pierre Marongiu, 50 ans, est ingénieur et chef d’entreprise, expatrié au Qatar.

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