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Italie: quel avenir pour le Mouvement 5 étoiles de Beppe Grillo?

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Beppe Grillo, le leader du Mouvement 5 étoiles (Photo: Shutterstock.com)

 
JOL Press : Comment analyser la victoire du Mouvement 5 étoiles à Livourne ?
 

Marc Lazar : Tout d’abord, soulignons que le Parti démocrate (PD, centre gauche) reste la première force politique du pays. S’il a perdu plusieurs villes (Livourne, Pérouse ou encore Padoue), le parti du président du Conseil Matteo Renzi a gagné plus de la moitié des villes où avait lieu dimanche le second tour de ces municipales partielles.

La victoire du Mouvement 5 étoiles (M5S) de Beppe Grillo à Livourne est symbolique. C’est dans cette ville de Toscane qu’a été fondé, en 1921, le Parti communiste italien. En plus d’être une ville importante, Livourne est un bastion de la gauche depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. C’est pour cela que le M5S monte en épingle ce succès électoral. 

JOL Press : Peut-on parler de revanche après les résultats décevants du M5S aux élections européennes (21%) ? 
 

Marc Lazar : En tout cas, cela montre que le Mouvement 5 étoiles n’est pas mort, loin de là. Le score réalisé lors des européennes est effectivement inférieur à celui réalisé lors des législatives de février 2013 (25,5%). Surtout, il est plus faible que celui annoncé par Beppe Grillo, qui affirmait qu’il arriverait en tête. C’est la grande erreur commise par l’ex-humoriste.

Malgré tout, les résultats du Mouvement 5 étoiles aux européennes (arrivé en deuxième position) en font un acteur fondamental de la vie politique italienne. La prise de Livourne n’est pas un épiphénomène : cela prouve que le M5S peut s’implanter localement.

JOL Press : Quelle est la stratégie du Mouvement 5 étoiles ? 
 

Marc Lazar : Prenons l’exemple de Parme, où il y a eu des tensions entre le maire Federico Pizzarotti, issu du M5S, et Beppe Grillo. Lorsqu’un «grillino» s’empare d’une ville, il ne peut pas rester dans une position protestataire et doit prendre ses responsabilités, ce qui mécontente une partie de l’électorat du Mouvement 5 étoiles.

Les parlementaires du M5S sont confrontés à la même difficulté : soit ils adoptent une attitude constructive (en votant certaines lois présentées), soit ils font de l’obstruction systématique. Or, ceux qui ont eu une attitude constructive ont presque tous été exclus du mouvement.

Le M5S doit-il jouer le jeu de la politique italienne, au risque de devenir un parti comme les autres, ou garder un rôle de trublion ? C’est le dilemme fondamental de ce mouvement.

JOL Press : Quel pourrait être l’avenir du M5S ? 
 

Marc Lazar : C’est difficile à dire. Une chose est sûre : le Mouvement 5 étoiles bénéficie des nombreux scandales de corruption qui éclaboussent la classe politique italienne, aussi bien à droite qu’à gauche. Résultat, l’argument du «tous pourris» de Beppe Grillo fait mouche.

En outre, le socle électoral de l’ex-humoriste est réel. Près d’un tiers des jeunes (18-34 ans) votent pour lui. C’est sa grande force. Il est également bien implanté chez les salariés et les catégories ayant un niveau d’éducation élevé (équivalent Bac+3).

JOL Press : Une fois élu, comment le Mouvement 5 étoiles gère-t-il les villes qu’il remporte ? 
 

Marc Lazar : Il navigue à vue. A Parme, Federico Pizzarotti a fait beaucoup de promesses non tenues. Le M5S se fait élire sur un certain nombre de propositions mais surtout contre les élus en place. C’est une autre histoire lorsque le mouvement doit construire sa propre politique.

Propos recueillis par Marie Slavicek pour JOL Press

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