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Le processus de paix: enjeu du scrutin en Colombie

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JOL Press: Le processus de paix entre les FARC et le gouvernement a été un enjeu principal de la campagne électorale en Colombie. Ce thème a-t-il occupé l’espace médiatique au point d’écarter des thématiques telles que la santé, l’éducation et l’emploi ?
 

Lucas Gomez:   En effet, c’est le sentiment que nous avons eu en Colombie: le seul thème de campagne concerne l’avenir du processus de paix. D´ailleurs les deux candidats ont articulé pour le deuxième tour une dichotomie entre la paix et la guerre. Le candidat-président se présente comme le président de la paix et présente son opposant  comme le candidat de la guerre.

Dans les différents débats télévisés, ce sujet a complètement écarté les autres thèmes faisant de cette élection une sorte de referendum sur le processus de paix et la continuité des négociations avec les FARC.

JOL Press: Le processus de paix est-il aujourd’hui la première préoccupation des Colombiens ? Vous qui êtes sur place, pouvez-vous nous en dire plus sur les attentes de la population ?
 

Lucas Gomez:  Il est impossible de nier que le processus de paix est au centre des préoccupations de tous les colombiens. Le conflit qui dure depuis 50 ans a touché de près ou de loin tous les foyers du pays. Cependant, les dynamiques de la confrontation ont considérablement changé ces dernières années et la réduction de l’intensité du conflit a permis aux colombiens de se focaliser sur d´autres problèmes publics. Le conflit est devenu de plus en plus rural.

Tous les colombiens considèrent le conflit comme l’un des problèmes le plus significatifs du pays, avec cependant d’autres préoccupations  comme l’emploi, l’éducation et l’insécurité.     

JOL Press: Oscar Ivan Zuluaga a devancé Juan Manuel Santos – qui avait fait de la paix avec les FARC son cheval de bataille – dimanche 25 mai, avec 29,25 % des voix. Ces résultats révèlent-t-il une opposition de la population colombienne aux accords de paix avec les Farc ?
 

Lucas Gomez: Pas vraiment, car même le candidat Zuluaga a émis la possibilité de continuer les négociations. En ce sens, la victoire de Zuluaga lors du premier tour a été surtout perçue comme une demande de certains secteurs de la société pour que les conditions de ce processus soient plus claires pour les citoyens et surtout pour qu’il y ait un virage dans négociations: par exemple en demandant un cessez-le-feu des FARC et cessent de recruter des enfants.

JOL Press : Pourquoi l’ancien président Alvaro Uribe jouit-il encore d’une importante popularité en Colombie ?
 

Lucas Gomez:  Le président Uribe a été le président le plus populaire de l´histoire récente de la démocratie colombienne avec des indices supérieurs à 80%. Il est donc très important et très suivi dans le pays: on lui octroie même le mérite d’avoir récupéré le pays des mains des FARC et même on peut dire que le président Santos lui doit sa victoire de 2010.

JOL Press: Où en sont les négociations pour la paix entre les FARC et le gouvernement colombien? Quels sont les points qui posent problème dans ces pourparlers ? 
 

Lucas Gomez: Les négociations sont actuellement dans un état d’avancement de l’ordre de 60%. En effet, dans l’agenda de négociations il a été accordé 5 points – politique de terres, narcotrafic, participation politique, victimes et justice transitionnelle – sur ces 5 points les trois premiers ont déjà été négociés et les deux derniers sont en train d’être abordés. D’après les textes fondateurs des négociations, tous les points doivent à leur tour être validés par les colombiens lors d’un potentiel référendum.

En ce qui concerne les points qui posent problème, on s´attendait à ce que le thème des victimes ralentisse les négociations étant donné que les FARC n’ont jamais assumé leur responsabilité. Cependant, dimanche 8 juin, la guérilla marxiste a surpris le pays en déclarant la reconnaissance de l’existence des victimes et leur volonté de le réparer.

Il ne reste donc aujourd’hui que très peu des barrières pour clôturer ces négociations et demander aux Colombiens leur accord pour sa validation. Mais tout est susceptible de changer dimanche 15 juin, si le candidat Zuluaga remporte les élections…il faudrait alors tout commencer à zéro…

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