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Parlement européen: Martin Schulz, une réélection qui ne laisse aucun doute

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Martin Schulz est déjà assuré de rempiler au poste de président du Parlement européen (Photo: Shutterstock.com)

JOL Press : Quels sont les rapports de forces au sein du nouveau Parlement européen ? 
 

Olivier Costa : Premièrement, le Parti populaire européen (PPE) reste le groupe politique le plus important du Parlement européen (les conservateurs ont remporté 221 des 751 sièges, ndlr). Et compte tenu du mode de fonctionnement de cette institution, notamment la règle de la proportionnalité, le PPE a vocation à être la force motrice de ce nouveau Parlement.

Ensuite, le Parti socialiste européen (PSE) a mieux résisté que le PPE lors des dernières élections : le PSE n’a perdu que quelques sièges (il en compte 191 sur 751), alors que le PPE en a perdu une soixantaine. Cela va donner aux socialistes une certaine capacité à influencer les débats.

On s’oriente en effet vers une logique de répartition globale des postes au sein de l’Union européenne. Concrètement, la gauche pourrait monnayer son soutien au Luxembourgeois Jean-Claude Juncker (PPE), candidat officiel à la tête de la Commission européenne, contre la présidence du Parlement européen, convoitée par l’Allemand Martin Schulz (PSE).

JOL Press : Quid de la montée des eurosceptiques ? 
 

Olivier Costa : Ce phénomène s’observe à droite – avec le FN, le FPÖ autrichien, le Jobbik hongrois etc. –, mais aussi à gauche. En Grèce, le parti Syriza (gauche radicale) est arrivé en tête.

Toutefois, l’influence des eurosceptiques sera marginale. Le Parlement dispose de suffisamment d’outils pour lutter contre leur stratégie d’obstruction. Les europhobes ont gagné de quoi se faire entendre mais ils ne sont pas assez nombreux pour bloquer le fonctionnement de l’UE. De plus, les partis traditionnels se sont toujours serrés les coudes pour fait barrage aux eurosceptiques.

Enfin, traditionnellement, les députés eurosceptiques se démarquent par leur absentéisme. Beaucoup d’entre eux connaissent très mal les institutions européennes, et ne font même pas l’effort d’essayer de peser dans le fonctionnement de l’Europe.

JOL Press : Quelle est l’importance du Parlement européen par rapport aux autres institutions de l’UE ? 
 

Olivier Costa : Aux termes du traité de Lisbonne, le Parlement est une assemblée très puissante. Les eurodéputés votent les lois, en co-décision avec le Conseil des ministres, approuvent la composition de la Commission, et concourent à l’adoption du budget.

Le Conseil et la Commission n’ont pas de moyens de pression sur le Parlement. A l’inverse, le Parlement est parvenu à imposer Juncker à la présidence de la Commission, malgré l’opposition virulente du Premier ministre britannique David Cameron. Or, le traité de Lisbonne ne dit pas que le Conseil européen doit choisir le candidat proposé par le Parlement. Le Conseil européen doit simplement «tenir compte» du résultat des élections européennes

JOL Press : Comment les choses pourraient-elles évoluer ? 
 

Olivier Costa : Il est évident que Jean-Claude Juncker aura un lien plus étroit que ses prédécesseurs avec le Parlement européen. On peut penser que les socialistes ont accepté de soutenir l’ex-Premier ministre du Luxembourg, qui est un homme de droite, contre un certain nombre de garanties quant à son programme à la tête de la Commission européenne.

Je pense qu’on va assister à une parlementarisation de l’Union avec un rapprochement entre le Parlement et la Commission, et peut-être aussi avec une capacité plus grande pour le Parlement à peser sur l’agenda de la Commission – jusqu’à présent, c’est surtout le Conseil qui arrivait à donner des instructions à la Commission.

JOL Press : Concrètement, que va-t-il se passer lors de la session inaugurale du Parlement européen ? 
 

Olivier Costa : C’est le moment où tous les postes à responsabilité au sein du Parlement sont répartis : le président, les 14 vice-présidents, les membres et les présidents des commissions parlementaires etc. En théorie, cette répartition se fait proportionnellement à la taille des groupes. Dans les faits, le Parti populaire européen et le Parti socialiste européen obtiennent généralement la plus grosse part du gâteau parce qu’ils s’entendent pour cela.

Il y a donc de fortes chances pour que le Parlement européen, dominé par le PPE, soit présidé par le socialiste Martin Schulz, en échange du soutien du PSE à Jean-Claude Juncker. Comment les autres postes vont-ils être attribués pour conserver un équilibre ? C’est toute la question.

Propos recueillis par Marie Slavicek pour JOL Press

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