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«Si les jihadistes gagnent la guerre, les chrétiens d’Irak disparaîtront»

16.06.2014 par La Rédaction

Entretien avec Layth Abdulamir, réalisateur franco-irakien auteur du documentaire « Chrétiens d’Irak, chronique d’un exode annoncé » (2011).

Avant l’invasion de l’Irak par les troupes américaines en 2003, les chrétiens étaient plus d’un million sur le sol irakien. Présents depuis des milliers d’années sur ces terres, ils sont moins de 400 000 aujourd’hui, persécutés depuis plus de dix ans par les groupuscules islamistes. Suite à la prise de Mossoul, deuxième ville du pays, et de plusieurs provinces irakiennes par les jihadistes de l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL), la communauté chrétienne d’Irak est plus que jamais menacée.

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Église Saint Qardakh le Martyr, Erbil, Kurdisan, Irak. (Crédit photo : fpolat69 / Shutterstock.com)

JOL Press : Quel impact la prise de Mossoul par les jihadistes a-t-elle eu sur les minorités chrétiennes ?
 

Layth Abdulamir : Les jihadistes ont commencé par prendre Mossoul, au nord de l’Irak, et sont maintenant aux portes de Bagdad. Beaucoup de minorités, et surtout des chrétiens, vivent à Mossoul. Historiquement, des chrétiens s’étaient installés dans la ville dès le Ier siècle après Jésus-Christ.

Après l’occupation de l’Irak par les troupes américaines en 2003, beaucoup de chrétiens irakiens ont émigré à l’intérieur de l’Irak et notamment à Mossoul, ville de leurs ancêtres, où ils pensaient être plutôt protégés. Malheureusement, le gouvernement et l’armée irakienne contrôlaient la ville seulement pendant la journée, mais le soir, Mossoul était souvent dans les mains des extrémistes. Les chrétiens étaient donc régulièrement menacés.

Aujourd’hui, ce ne sont plus seulement des menaces : ce qui se passe à Mossoul est tragique. Ce sont les islamistes les plus durs, les plus radicaux et les plus violents qui contrôlent maintenant la ville. S’ils ne touchent pas encore aux chrétiens, c’est parce qu’ils veulent aller jusqu’à Bagdad, mais demain, s’ils contrôlent la situation à l’est et au nord de l’Irak, jusqu’à la frontière du Kurdistan, ils s’en prendront aux minorités.

Nous sommes très inquiets. Plus de 300 000 personnes – sur environ deux millions d’habitants – ont déjà quitté Mossoul, dont beaucoup de chrétiens mais aussi des kurdes et des musulmans, y compris des sunnites. C’est catastrophique.

JOL Press : Comment analysez-vous ces événements ?
 

Layth Abdulamir : Les islamistes de l’État islamique en Irak et au Levant sont extrêmement violents. Non seulement les minorités chrétiennes et kurdes mais aussi tous les musulmans ont intérêt à quitter Mossoul, qui va connaître l’enfer. On sait très bien qui sont les extrémistes de l’EIIL et ce qu’ils sont capables de faire : on l’a vu lors des événements en Syrie, lorsqu’ils ont contrôlé Raqqa et d’autres villes syriennes.

Pour moi, c’est vraiment très étonnant que le monde ne bouge pas, que l’on ne donne pas beaucoup d’attention à ce qui se passe en Irak. On pense qu’il s’agit d’un conflit entre les Irakiens, mais ce n’est pas du tout cela. Ce qui se passe aujourd’hui en Irak peut complètement changer la carte du Moyen-Orient. Les islamistes vont contrôler les banques et ils ont déjà aujourd’hui dans leurs mains près d’un demi-million de dollars.

JOL Press : Les minorités chrétiennes ont régulièrement été persécutées depuis dix ans. Malgré les violences, pourquoi certains chrétiens choisissent-ils de rester ?
 

Layth Abdulamir : Tout le monde ne peut pas quitter l’Irak. Beaucoup de populations pauvres ne choisissent pas de rester mais n’ont pas les moyens de partir. Les chrétiens qui ont quitté l’Irak ne sont pas non plus forcément en sécurité ailleurs.

Certains chrétiens sont partis en Syrie avant que la guerre ne commence et aujourd’hui, ils sont menacés. D’autres sont partis au Liban ou en Jordanie et souffrent beaucoup : ils n’ont pas de travail, pas d’argent pour vivre, pour nourrir leur famille ou mettre leurs enfants à l’école. Les chrétiens restés en Irak savent très bien comment leurs proches souffrent aussi hors des frontières irakiennes.

Ces dernières années, beaucoup de chrétiens qui avaient quitté le pays sont rentrés au nord de l’Irak parce qu’ils pensaient qu’à Mossoul ils seraient à l’abri de ce qui se passe en Syrie ou ailleurs. Beaucoup de familles chrétiennes ne veulent pas non plus quitter l’Irak parce qu’elles considèrent que ce sont leurs terres, certaines y ont établi leur commerce. Il y a des Irakiens patriotes qui veulent défendre leur histoire et leurs racines et choisissent donc de rester.

JOL Press : Depuis le retrait des troupes américaines d’Irak en 2011, comment la situation des chrétiens a-t-telle évolué ?
 

Layth Abdulamir : Aujourd’hui, les chrétiens d’Irak représentent environ 1% de la population. L’immense majorité est partie après 2011. La situation n’a fait que s’empirer pour eux, l’État irakien est complètement corrompu et ne défend pas les chrétiens, ni même d’ailleurs les musulmans.

L’exode ne concerne d’ailleurs pas seulement les chrétiens : beaucoup de musulmans ont émigré à l’intérieur de l’Irak. Il y a maintenant une division dans le pays depuis la guerre de 2006. Là où il y a des majorités sunnites, les chiites quittent leurs maisons, et inversement. L’État ne défend personne et aujourd’hui, il n’arrive même pas à se défendre lui-même, comme on l’a vu avec l’armée irakienne qui, complètement corrompue elle-aussi, est en fuite.

Les chrétiens veulent vivre en paix, mais restent muets, sans manifester leurs droits, parce qu’ils ont peur et savent très bien qu’ils ne peuvent rien faire. Ils sont aussi déçus de leurs représentants, hommes et femmes politiques, au sein d’un Parlement totalement corrompu qui ne défend pas leur cause face à tous ces problèmes.

JOL Press : Existe-t-il une solidarité entre chrétiens et kurdes ?
 

Layth Abdulamir : Non seulement il existe une grande solidarité entre chrétiens et kurdes, mais aussi entre chrétiens et musulmans. S’il n’y avait pas cette solidarité, les chrétiens n’existeraient plus. Tous les Irakiens vivent dans un seul bateau et comprennent que le bateau coule. Il y a une solidarité sociale au sein du peuple irakien, heureusement !

Par exemple, beaucoup de chrétiens qui sont partis à l’étranger et ont quitté leurs maisons ont confié les clés à leurs voisins musulmans ou kurdes, qui gèrent et défendent leurs maisons au cas où les extrémistes voudraient mettre la main dessus. Les extrémistes sont contre tout le monde, non seulement contre les chiites mais aussi contre les sunnites modérés. Personne en Irak n’est à l’abri de cette invasion qui commence à occuper de plus en plus le pays entier.

JOL Press : Selon vous, les chrétiens d’Irak sont-ils condamnés à disparaître ?
 

Layth Abdulamir : Il y a effectivement ce danger. Si les radicaux de l’EIIL gagnent cette guerre, il n’y aura plus de chrétiens en Irak. Peut-être qu’ils émigreront au Kurdistan, mais l’immense majorité partira à l’étranger. Le Kurdistan, province autonome, est aujourd’hui une partie de l’Irak. Mais si les jihadistes prennent le pays, demain, le Kurdistan ne fera plus partie de l’Irak. Les chrétiens qui voudraient rejoindre le Kurdistan pour bénéficier de la protection des kurdes ne seraient alors plus sur le sol irakien. Si l’on parle de l’Irak de demain, le destin des chrétiens pourrait être comme celui des juifs d’Irak : ils disparaîtront.

Propos recueillis par Anaïs Lefébure pour JOL Press

———

Layth Abdulamir est né en 1957 en Irak. Après des études cinématographiques à Kiev en Ukraine puis à la Sorbonne à Paris, il obtient un master de réalisateur. Il quitte définitivement l’Irak en 1977 et part en France, où il commence une carrière de réalisateur tout en travaillant pour la chaîne Dubaï TV. Il est l’auteur de plusieurs films et documentaires dont La larme du bourreau (2013), Chrétiens d’Irak, chronique d’un exode annoncé (2011) et Irak, le chant des absents (2004).

La Rédaction


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