Depuis le crash du Boeing 777 de la Malaysia Airlines, le 17 juillet dernier, dans la région de Donetsk, la Russie peine à démentir les accusations qui lui attribue une responsabilité directe dans la catastrophe. La région de Donetsk est occupée par des miliciens séparatistes pro-russes et tout porte à croire que la Russie contribue au financement de leurs opérations et armements. Aux yeux des Occidentaux, la Russie est, dès lors, responsable de la mort des 298 passagers du vol MH17, parmi lesquels 193 Néerlandais. Dans sa très grande majorité, la presse russe suit la position officielle et s’efforce de dédouaner le Kremlin, mais il est un journal qui a eu le courage de se distinguer… Cette semaine, Novaïa Gazeta a marqué clairement sa différence et demandé pardon aux Pays-Bas.
[image:1,l] 298 victimes sont mortes dans le crash du vol MH17 (Crédit: katatonia82 / Shutterstock.com)
L’édition du journal Novaïa Gazeta du vendredi 25 juillet a fait l’effet d’une bombe en Russie. Depuis la catastrophe, le crash aérien du vol MH17 Amsterdam-Kuala Lumpur, le 17 juillet, c’est la première fois qu’un journal russe prend ses distances par rapport à la rhétorique angélique du Kremlin. En Une, sur toute la couverture, un titre qui ne saurait prêter à confusion… « Pardonnez-nous, Pays-Bas ». Par ces simples mots, le Novaïa Gazeta se rallie à la thèse de la culpabilité de la Russie dans l’accident.
« Vergeef ons, Nederland » (Pardonnez-nous, les Pays-Bas… en néerlandais)
Le titre de ce numéro de Novaïa Gazeta ne passe pas inaperçu. Le journal a fait le choix de présenter ses excuses publiques aux familles des victimes du vol MH17 ainsi qu’aux pays tout entier. La demande de pardon est formulée d’abord en néerlandais puis après en russe.
Pour illustrer son émotion, la direction du journal a choisi une photo des premiers corps rapatriés. Sur l’image, prise mercredi 23 juillet, on aperçoit la triste file de corbillards alignés en direction des Pays-Bas. Cette photo très solennelle exprime toute la tristesse que peuvent ressentir les 193 familles de victimes.
Un dossier spécial occupe une large part de cette édition du Novaïa Gazeta . On retrouve à l’intérieur des extraits de journaux occidentaux qui pointent du doigt la responsabilité de la Russie. Novaïa Gazeta s’aligne ainsi sur leur raisonnement en accusant de la même manière la responsabilité des séparatistes ukrainiens.
Novaïa Gazeta séduit et dérange
Le bihebdomadaire russe n’est pas à sa première Une sulfureuse – et courageuse. Créé en 1993, ce quotidien se donne comme objectif de dénoncer les maux de la société russe. Déjà 6 journalistes se sont fait assassiner depuis le début des années 2000. Quelques uns d’entre eux étaient des figures emblématiques du journalisme russe – et on pense, évidemment, à Anna Politkovskaïa, assassinée en 2006.
Ce choix éditorial est salué par une partie de la population russe. Après le drame, nombreux sont ceux qui sont venus rendre un dernier hommage aux victimes du vol MH17. Des fleurs ont été symboliquement déposées devant l’ambassade des Pays-Bas à Moscou.
« Pardonnez-nous, Pays-Bas” : la une du journal d’opposition Novaïa Gazeta, en néerlandais. #emotions . #ukrainecrash pic.twitter.com/AuzrFChG0I
— Quentin Alexandre (@Kouentine) 26 Juillet 2014