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Inde: des ordures pour construire des routes

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Pour l’ancien ministre de l’Environnement, s’il existait un «prix Nobel de la saleté et de la crasse », il devrait revenir à l’Inde (Photo : MR/Shutterstock).

Les ordures envahissent les rues indiennes

A l’origine de cette idée, un problème fondamental qui ronge l’Inde. Les ruelles, champs et lieux touristiques côtoient des amoncellements de déchets en tout genre : cannettes, bouteilles plastiques, sacs, emballages… Le problème frappe principalement le nord du pays.

Ces dégradations, très impressionnantes pour beaucoup de touristes, sont le résultat d’une absence d’éducation et de sensibilisation de la population à la protection de l’environnement. La rue devient inéluctablement une gigantesque benne à ordures.

Déjà, les années passées, le photographe Didier Ruef avait parcouru le monde à la recherche de clichés sur le traitement des ordures dans différents pays. Son exposition «Terre d’ordures» révelait plusieurs clichés de la ville de Calcutta et du travail de ceux qui «vivent» des ordures. Evidemment, une telle concentration de détritus est dangereuse car beaucoup de matériaux restent à la surface du sol et mettent des centaines d’années avant de se désagréger. Partout, les déchets menacent les populations et le bétail.

Au total, ce sont plus de 15 000 tonnes de déchets plastiques jetées par jour en Inde. Plusieurs entreprises ont entrepris ici et là des initiatives pour contenir l’étendue des ordures, et tenter de résorber tant bien que mal ce « trop-plein » mais, souvent trop timides, ces initiatives n’ont pas su apporter de solutions efficaces.

Un concept simple et innovant

Le concept imaginé par Rajagopalan Vasudevan reste assez simple. Il commence par récolter les déchets laissés à l’abandon dans de grands terrains vagues. Puis, il les transforme en minuscules morceaux qu’il mélange avec le bitume. Le résultat est bénéfique: cet ajout de substituts complémentaires permet de créer des routes moins chères, mais surtout la nouvelle matière se dégrade beaucoup moins vite que celle utilisée dans la construction de «routes ordinaires».

Grâce à cette méthode, plus de 5 000 km de routes ont pu être construites à travers le pays. Le Central Pollution Control Board et l’Indian Roads Congress, deux organismes gouvernementaux de premier plan, ont également approuvé la méthode.

Les organismes ajoutent que l’avantage de la méthode Vasudevan est qu’elle permet l’utilisation de toutes les formes de déchets, notamment les emballages multicouches (utilisés pour conserver les gâteaux par exemple) qui sont très durs à utiliser et représentent le plus grand nombre de déchets dans le pays. 

Un autre avantage de la méthode de Vasudevan est sa simplicité. Il ne nécessite aucune connaissance technique particulière et pas de grands investissements ou de changements quant à la pause du bitume.

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Rajogopalan Vasudevan est le «Plantic man»

Rajogopalan Vasudevan a donné naissance à ce projet en regardant les déchets qui bordent la ville de Thiagarajar où il vit. Dans l’université où il enseigne il jouit d’une certaine réputation: original et rieur il ironise sur le sort des détritus en Inde. Plutôt que de s’alarmer, il considère que les déchets plastiqus sont en eux-mêmes un «cadeau des dieux», cela fait 10 ans qu’il s’est spécialisé sur la question. Cependant, pour lui, il faut profondément changer le regard porté sur leur utilisation.

En effet dans le pays, les castes les plus élevées refusent un contact direct avec ce qu’ils considèrent être un «problème de pauvres». Pourtant,  ils sont les seuls à avoir le financement nécessaire pour perpétrer le projet.

Aujourd’hui, Rajogopalan traverse l’Inde en expliquant aux ingénieurs du pays sa méthode. Ces derniers lui ont donné le surnom de «Plastic Man ». Il s’en amuse, mais ne perd par de vue son projet initial à Thiagarajar « C’est formidable, avec tout ce plastique je pourrai construire une route jusqu’à l’aéroport », affirme-t-il. 

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