Dans un rapport confidentiel qui a fuité dans la presse, l’agence de renseignements indiens accuse les ONG financées par l’étranger de bloquer certains projets de développement dans le pays et, ainsi, de miner la croissance indienne.
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Le rapport de l’Intelligence Bureau indien, intitulé « Impact des ONG sur la croissance », aurait dû rester confidentiel. Mais quelques jours après l’investiture du nouveau Premier ministre indien Narendra Modi, qui a pris la tête du pays fin mai, le document de 21 pages a fuité dans la presse indienne.
Impact sur la croissance
Selon l’agence des renseignements intérieurs qui a rédigé le rapport, certaines ONG financées par l’étranger seraient un frein à la croissance indienne et représenteraient une « menace potentielle » sur la « sécurité économique nationale ».
Les organisations non gouvernementales liées à l’environnement seraient particulièrement visées par le gouvernement indien, qui vient d’annoncer le lancement d’une enquête policière pour faire toute la lumière sur les fonds et les dépenses de ces ONG.
Selon le rapport, ces associations financées par l’étranger, souvent mobilisées contre de grands projets industriels ou miniers, auraient ainsi un impact négatif sur la croissance indienne, empêchant la réalisation de ces projets et freinant le PIB du pays de 2 à 3% par an.
Greenpeace en ligne de mire
L’ONG Greenpeace par exemple, qui lutte contre l’exploitation des mines de charbon dans le centre de l’Inde par le conglomérat pétrolier Essar, est directement dans le viseur de l’agence de renseignements.
Le ministère de l’Intérieur a ainsi demandé à ce que tout financement étranger destiné à Greenpeace India soit soumis, en priorité, à un examen préalable de la Banque centrale. Amnesty International, ActionAid, Survival International ou d’autres grandes ONG qui reçoivent des fonds européens ou nord-américains sont également critiquées par le rapport.
Un « complot » contre la puissance émergente ?
« Les donateurs étrangers conduisent les ONG locales à […] servir d’outils pour les intérêts stratégiques des politiques étrangères des gouvernements occidentaux », affirme le rapport, qui souligne que 13 000 organisations ont touché 1,4 milliard d’euros d’aides étrangères en 2011-2012.
Sans mâcher ses mots, le rapport indique que les bailleurs de fonds étrangers « camouflent intelligemment leurs donations comme des financements pour la protection des droits de l’homme ou des compensations pour les populations déplacées ». Une vision dénoncée par de nombreux acteurs de la société civile et associative indienne, qui mettent en cause les chiffres avancés par le rapport de l’Intelligence Bureau et dénoncent sa vision complotiste.
« Les associations indiennes recevant des fonds de l’étranger ont-elles du souci à se faire ? Le rapport liste en tout cas certaines activités jugées « anti-développement » pour 2014, comme les campagnes portant sur le traitement des déchets électroniques, le projet de couloir industriel Bombay-Delhi, ou encore la constitution d’associations d’ouvriers du bâtiment dans les zones urbaines », énumère le site Novethic.
S’il a été rédigé avant l’arrivée au pouvoir du nationaliste hindou Narendra Modi, le rapport pourrait bien appuyer les politiques nationalistes du parti du Premier ministre, qui a pour objectif de relancer la croissance indienne.