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Le conflit israélo-palestinien, une passion française

3 ans de guerre civile en Syrie et plus de 146.000 morts selon l’Observatoire syrien des droits de  l’homme. 
 
Pour le seul mois de juin 2014, l’offensive de l’EIIL (Etat Islamique en Irak et au Levant) a fait 2.400 morts dont 1.500 civils selon l’ONU.
 
Depuis le début de l’année 2014, les attaques de Boko Haram au Nigéria ont fait 2.500 morts sans compter les enlèvements.
 
J’ai beau essayé de participer aux manifestations de soutien aux victimes de ces conflits, je n’en  trouve aucune. Parce que ces conflits n’intéressent personne ou presque. Le conflit israélo-palestinien, en revanche, passionne. Pourquoi ? A cause du nombre des victimes ? Non. Il y en a tellement plus dans d’autres conflits. Le fait qu’une partie des victimes seraient civiles ? Non. Des victimes non combattantes, il y en a malheureusement dans toutes les guerres, surtout quand on s’en sert comme bouclier pour protéger ses armes. Parce qu’il s’agirait d’un conflit « asymétrique » et que le Hamas serait sous-équipé par rapport à Tsahal ? C’était vrai il y a 1 0 ans. En 14 jours, 2160 roquettes et missiles (M-302, M-75, R-160, missiles Grad) ont été tirés sur Israël, soit plus de 150 par jour. Les membres du Hamas disposent d’armes anti-char, d’armes légères et même d’uniformes de Tsahal qu’ils utilisent pour leurs infiltrations en Israël.
 
L’interdiction d’une manifestation de soutien aux palestiniens de Gaza en raison des risques de troubles à l’ordre public a déclenché de vives protestations et indignations. Pourquoi ?
 
En juillet 2013, le Musée du Jeu de Paume avait accueilli une exposition de photographies d’Ahlam Chibli présentant des terroristes palestiniens comme des « martyrs ». Une manifestation avait été prévue sur le parvis de la Place de la Concorde pour dénoncer ce qui s’apparentait à une apologie du terrorisme. Cette manifestation a été interdite par la Préfecture de police de Paris et cette interdiction a été respectée par les organisateurs et les manifestants. Aucun des grands progressistes qui hurlent depuis la semaine dernière et se pressent dans les médias pour dire qui une provocation, qui une atteinte à la liberté d’expression, ne s’en était alors ému.
 
Samedi 19 juillet 2014, en dépit de l’interdiction de la manifestation à Paris et à Sarcelles, des centaines de personnes se sont quand-même réunies, bravant cette interdiction. Des élus locaux et nationaux de la majorité y ont participé. Certains ont mêmes appelé à défier la décision 
d’interdiction. Et bien sûr, des commerces, notamment juifs, et des synagogues ont été attaqués, détruits, pillés, incendiés.
 
A ceux qui dénoncent une provocation du gouvernement, aux mêmes qui expliquent ces dérapages injustifiables par la frustration des manifestants de ne pas être autorisés à défiler, faut-il rappeler que la manifestation du 13 juillet 2014, au cours de laquelle il a fallu des renforts de CRS pour empêcher des manifestants ultraviolents de rentrer de force dans la synagogue de la Roquette, était bel et bien autorisée ?
 
Alors pourquoi ces débordements ? Pourquoi des pro-palestiniens crient-ils « mort aux Juifs » dans les rues de Paris et s’attaquent physiquement aux juifs, à leurs synagogues, à leurs commerces ? La réponse est dans la question. Parce que le conflit israélo-palestinien est le prétexte idéal pour venir vomir son antisémitisme sous l’oriflamme de l’antisionisme. Soyons clairs. Ces radicaux, ces fanatiques, ces casseurs, ces voyous, ces islamo-fascistes – quel que soit le qualificatif qu’on leur donne – ne sont pas des « antisionistes », ce sont bel et bien des antisémites, si tant est qu’il y ait une différence entre ces deux notions. 
 
Lorsque l’on crie « mort aux Juifs », que l’on agresse un juif ou que l’on attaque une synagogue dans une manifestation dont l’objectif est soutenir les palestiniens, on ne dénonce pas la politique du gouvernement israélien. On n’exprime pas non plus sa compassion pour les victimes palestiniennes. Lorsque l’on crie « Mort aux Juifs ! », on appelle à tuer des personnes au seul motif qu’elles sont juives. Le degré de rejet, de haine de l’autre est tel que sa seule appartenance au peuple Juif en fait une cible à abattre au sens propre du terme. La manifestation devient l’opportunité de faire valoir sa détestation des Juifs parce que juifs. Comme si le citoyen français, belge, allemand, turc et juif était ipso facto responsable de la situation à Gaza et méritait donc cette expression de haine et d’appel au meurtre. Ce n’est évidemment pas le cas. 

Comme si le citoyen français, belge, allemand, turc et musulman était ipso facto responsable des salves de missiles et de roquettes envoyées de Gaza sur Israël ou des massacres des chrétiens animistes du sud Soudan par le régime islamique de Khartoum ou celui des coptes en Egypte ou des persécutions des chrétiens en Iraq. Ce n’est évidemment pas le cas non plus. D’ailleurs, où sont les manifestants pour s’indigner du fait que les chrétiens de Mossoul en ont été chassés de la ville par l’EIIL sauf à ce qu’ils se convertissent à l’islam ? Alors pourquoi ce traitement spécial du juif ? Pourquoi cette focalisation sur Israël ? Soyons honnêtes. Parce que la majorité des israéliens sont juifs. La France fait l’objet d’une résurgence inquiétante de l’antisémitisme et fait preuve d’une faiblesse inquiétante à traiter ce problème. Il faut arrêter de se cacher derrière les grands discours et agir. Agir vite et de manière claire. Agir sur le terrain, devant les tribunaux, dans les écoles pour que les professeurs d’histoire puissent enseigner la Seconde guerre mondiale et la Shoah sans voir leurs cours interrompus par des adolescents nourris de la haine des Juifs au point d’en interdire la seule évocation.

Les Juifs sont le baromètre de la société. Quand on s’attaque à eux, ce n’est qu’un début. On s’attaquera bientôt aux autres. Le Pasteur Niemöller l’avait si bien dit. L’avantage que nous avons sur Martin Niemöller c’est que nous avons l’expérience de l’Histoire. Et pourtant, le gouvernement ne fait rien ou si peu. Interdire une manifestation en raison de troubles à l’ordre public, c’est la bonne décision à prendre. Ne rien prévoir pour faire face aux débordements lorsque l’on sait que cette manifestation aura quand-même lieu, c’est irresponsable.
 
La France est malade de son antisémitisme. Pas la France institutionnelle, pas son corpus légal, mais la France, quel que soit son bord politique, qui ne sait pas ou ne veut pas réagir face au péril. Celle qui croit qu’en courbant la tête, elle s’en sortira. C’est une erreur grossière. La peur n’évite pas le danger.
 
Espérons que la raison revienne à ses manifestants de la cause palestinienne pour que leur soutien aux Gazaouis piégés par le Hamas ne se confonde pas en incitation à la haine raciale et au meurtre, qui au-delà de l’évidente réprobation morale que tout un chacun devrait ressentir, sont deux délits punis par le Code pénal.
Espérons que la France saura protéger ses concitoyens juifs et, par là-même, la République. Il suffit pour cela de mettre un terme à cet angélisme nocif et d’appliquer les lois existantes.
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