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Légalisation du cannabis: le soutien sans précédent du New-York Times

Les tabous concernant la légalisation du cannabis n’en finissent plus de tomber aux Etats-Unis : le 27 juillet, via son édito, le New-York Times a apporté son soutien à une cause de plus en plus populaire. Dans un pays réputé réfractaire, il semble que le sujet ne choque quasiment plus. Dans le sillage de l’adoption du mariage gay dans plusieurs Etats, les Américains évoluent rapidement, et significativement.  

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Une marche « Legalize it » dans le Michigan, fin 2013. (shutterstock.com)

L’éditorial du New York Times publié le 27 juillet restera gravé dans les annales. Plus qu’une prise de position, la tribune du célèbre quotidien américain appelle à la dépénalisation du cannabis, et ce dans les plus brefs délais. Au point de comparer l’interdiction de posséder de la marijuana à la prohibition des années 1920.

Le Colorado en précurseur

Le mouvement « Legalize it » avait connu sa première vraie victoire en 2012. Via referendum, les habitants de l’Etat du Colorado avaient accepté que l’usage récréatif de la marijuana soit légal. Preuve que le sujet passionne, ce referendum avait attiré plus de votants que lors des élections présidentielles entre Mitt Romney et Barack Obama, où le président sortant l’avait emporté de peu face au candidat républicain. Le projet de légalisation a quant à lui été largement approuvé (68% des voix).

Un autre Etat a par la suite décidé d’emboîter le pas au Colorado : celui de Washington. La vente de marijuana y a été autorisée le 8 juillet dernier. Un défi d’une toute autre envergure pour les autorités locales : en effet, cet Etat qui abrite 7 millions d’habitants et la ville de Seattle, est beaucoup plus urbanisée que l’Etat des « Rocky Mountains », le Colorado. Et s’il est trop tôt pour tirer des conclusions, la vente légalisée du cannabis aurait rapporté 318 000 dollars de recettes fiscales en dix jours. Depuis que la marijuana a été dépénalisée fin 2012, les arrestations en rapport avec la substance ont considérablement diminué (de 5531 en 2012 à 120 en 2013).

La vente de cannabis à des fins médicinales, dans le but d’apaiser la douleur de patients dont les maladies provoquaient des douleurs récurrentes et lancinantes, notamment en Californie, a également permis une évolution positive des mentalités.

Le cannabis, pas pire que le tabac ou l’alcool

Le New York Times condamne les lourdes dépenses générées par la lutte contre la marijuana. Le quotidien souligne qu’en 2012 : « il y a eu 658 000 arrestations pour détention de cannabis, selon les chiffres du FBI, contre 256 000 pour possession de cocaïne, d’héroïne ou de leurs dérivés. ». Les éditorialistes dénoncent implicitement une obsession «anti-marijuana », qui ressemble étrangement à la sévérité de la prohibition qui a duré de 1919 à 1932 Outre-Atlantique.

A l’époque, la vente d’alcool avait été interdite, ce qui n’avait pas empêché la population de boire, et avait permis à des réseaux criminels de fleurir, puis prospérer. Alors que la prohibition n’avait duré que 13 ans, cela fait déjà 40 ans que le Congrès américain a voté l’interdiction de la marijuana, « causant de grands maux à la société dans le seul but d’interdire une substance bien moins dangereuse que l’alcool » peut-on lire dans l’édito.

Cette comparaison avec l’alcool, mais aussi avec la cigarette, revient fréquemment dans le postulat du New-York Times. Ce qu’on appelle communément en France la fumette, c’est-à-dire la consommation occasionnelle, qui résulte rarement de l’achat personnel, de cannabis, demeure bien moins addictive. Pour ce qui est de l’impact sur la santé, et notamment sur le cerveau, le quotidien suggère que la vente de cannabis soit prohibée au moins de 21 ans.

Enfin, les éditorialistes sont conscients que légalisation pourrait rimer avec l’émergence de lobbys gigantesques de la drogue douce, comme il en existe déjà pour le tabac et l’alcool. L’occasion pour eux de rappeler que : « ces problèmes peuvent être réglés, et l’auraient été depuis longtemps si notre nation ne s’était pas accrochée à cette décision de rendre la production et la consommation de la marijuana un crime fédéral ».

« Il est grand temps d’abroger cette version contemporaine de la Prohibition ». C’est ainsi que s’achève cet éditorial courageux, mais surtout inattendu. 

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