Site icon La Revue Internationale

Israël: un traitement à part

Le monde en général, l’ONU en particulier, les médias également, traitent Israël différemment des autres pays. Comment? Pourquoi? En trois exemples caractéristiques.

Le blocus maritime

Les règles de la guerre maritime sont mentionnées dans plusieurs manuels de guerre des armées (notamment américaine et britannique) et dans le Manuel de San Rémo de 1994 rédigé par un groupe international d’experts.

Un blocus peut se définir comme « une opération de belligérance destinée à empêcher les navires et/ou les aéronefs de toutes Nations, ennemies aussi bien que neutres, d’entrer ou de sortir de ports spécifiés, aérodromes, ou de zones côtières appartenant à, occupés par, ou sous le contrôle d’une nation ennemie » {1}.

Le Manuel de San Rémo sur le droit international applicable aux conflits armés sur mer adopté le 12 juin 1994[2] dispose que le blocus doit décidé par le gouvernement d’une nation belligérante, notifié, efficace, non-discriminatoire (article 83 à 101). La mise en place du blocus est interdite s’il a pour unique objectif d’affamer la population civile ou lui interdire les autres biens essentiels à sa survie (article 102).

Au cas particulier, Israël est en guerre contre le Hamas et, à ce titre, prend les mesures militaires qui lui semblent nécessaires à la protection de son territoire et de sa population, sous réserve du respect du droit international. Le blocus maritime imposé à Gaza n’est que l’une des modalités autorisées par le droit international dans une situation de conflit armé.

L’objectif de ce blocus est d’empêcher la fourniture d’armes au Hamas ainsi que les tentatives d’infiltration en Israël par la mer. Plusieurs cargos ont déjà été arraisonnés avec plusieurs dizaines voire plusieurs centaines de tonnes de munitions à leur bord à destination de Gaza (entre autres, le Francop en novembre 2009 (300 tonnes de munitions dont de nombreux missiles, roquettes et obus de mortiers), le Victoria en mars 2011, le Klos C en mars 2014). On aurait pu penser que le retrait unilatéral des israéliens de Gaza en août 2005 aurait été perçu comme un geste de bonne volonté d’Ariel Sharon, pourtant considéré comme un conservateur intransigeant.

Pas pour le Hamas. Vainqueur des élections législatives en janvier 2006, le Hamas commence par la liquidation du Fatah dans la bande de Gaza puis se concentre sur Israël. Entre 2006 et 2014, plus de 13.000 roquettes et missiles ont été tirés de Gaza sur Israël, soit près de 1630 par an. Cela correspond à plus de 135 missiles par mois tirés sur des civils israéliens. Quant aux tentatives d’infiltration terroristes par la mer, elles sont régulières et régulièrement déjouées grâce à la vigilance de la marine israélienne.

Ce blocus n’est donc ni une fantaisie du gouvernement israélien ni une punition collective des palestiniens de Gaza mais une mesure de sécurité justifiée face aux actes de violence et aux menaces réelles auxquels elle fait face. Il en ressort, comme cela ressort du rapport Palmer remis à l’ONU le 2 septembre 2011, que le blocus israélien de la bande de Gaza est tout à la fois légal et légitime[3]. De nombreux observateurs s’insurgent du contrôle drastique effectué par les israéliens au point de passage de Kerem Shalom, Karni, Erez et Shufa.

On leur rappellera qu’Israël est en guerre contre le Hamas lequel contrôle 100% de ce territoire et terrorise tout à la fois les palestiniens de Gaza mais aussi les civils israéliens à portée de leurs missiles et de leurs infiltrations terroristes. Il sera souligné, à toutes fins utiles, qu’en dépit de ce blocus maritime, Israël fait entrer à Gaza (hors période de tension exacerbée) 6.000 tonnes par jour de denrées alimentaires, médicaments et matériaux (y compris ciment et électricité) et qu’une partie de ces matériaux servent à fabriquer les tunnels par lesquels le Hamas fait des tentatives d’infiltration en Israël pour commettre des attentats terroristes… Un paradoxe israélien supplémentaire?

Pas tant que ça. Israël est en guerre contre le Hamas, pas contre les palestiniens de Gaza. S’il est légitime de se poser la question de la légalité du blocus israélien, il est également légitime de se poser la question des autres blocus dont la légalité semble intéresser beaucoup moins de monde. Il en va ainsi du blocus quasi permanent du terminal de Rafah qui constitue la frontière entre Gaza et l’Egypte en raison des nombreux trafics. L’Egypte ferme régulièrement et pour de longues périodes ce terminal et ne permet aucun transfert de personnes ni de matériel, ni même de médicaments. Pourquoi le seul blocus évoqué par les médias pour dénoncer « l’étranglement » de Gaza est le blocus israélien? Combien de manifestations ont-elles été organisées contre le blocus égyptien et combien de drapeaux égyptiens brûlés depuis 2006? Combien de fois a-t-on entendu « Morts aux Égyptiens! » dans les rues de Paris? On pourrait se poser les mêmes questions concernant le blocus de Cuba par les Etats-Unis, condamnés une vingtaine de fois par l’ONU depuis 1962, soit 52 ans.

Voilà bien le type d’indignation à géométrie variable qui ne gène pas les détracteurs d’Israël. Le 31 juillet 2014, une chaîne d’information permanente diffusait un reportage sur les tunnels utilisés par le Hamas pour mener des actions terroristes en Israël. Le journaliste visite un tunnel mis à jour par Tsahal entre Gaza et Israël. Plus personne ne peut raisonnablement avoir de doutes sur l’utilisation de ces tunnels : attaques, enlèvements, contrebandes, transfert d’armes. Aucun doute ne peut exister car le Hamas en a fait un de ses arguments de propagande. Pourtant, le journaliste ne peut s’empêcher de demander à un soldat israélien : « Etes-vous sûr que ce tunnel sert au Hamas à s’infiltrer en Israël et non à chercher de la nourriture en raison du blocus ? ». Des tunnels de plusieurs kilomètres de long, à 20 mètres de profondeur sous la frontière pour aller faire ses courses à la supérette du kibboutz ! On aurait dû y penser plus tôt…

La barrière de séparation

1.120 kilomètres de longueur, en béton armé, métal et barbelés, 18.000 hommes en armes chargés de la surveiller, 1.800 miradors, des caméras vidéo à vision infrarouge, des capteurs ultrasensibles permettant de détecter la présence de toute forme mouvante de la taille d’un chat, des hommes derrière leurs écrans de contrôle 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, la barrière de séparation entre le Texas et le Mexique continue de se construire. Sans (trop de) manifestations en Europe. La ligne Attila – mur de séparation qui divise Chypre entre la partie sud, grecque, et la partie nord, turque – est quant à elle déjà finie depuis le milieu des années 70. Pour garder cette barrière, 300 tanks et 40.000 soldats turcs stationnent en permanence. Sans (trop de) manifestations en Europe non plus. 

Ce sont là deux exemples parmi d’autres (Inde/Cachemire, Chine/Corée du Nord, Géorgie/Abkhazie…). Pourtant l’ONU est beaucoup moins féconde de condamnations quand il ne s’agit pas d’Israël. Les médias s’en désintéressent parfaitement. Le Pape ne s’y arrête pas pour y faire une prière. Les passionarias ne se bousculent pas non plus devant les télévisions pour les qualifier de « murs de la honte ». Pas plus que pour le mur de séparation entre l’Egypte et Gaza que l’Egypte est en train de construire et qui devrait s’enfoncer à 20 mètres sous le sol afin de couper les tunnels construits pas le Hamas. Et que dire du mur érigé à Bagdad pour séparer les quartiers sunnites des quartiers chiites… Pourquoi ce silence ? De deux choses l’une, soit les palestiniens méritent plus de compassion que les cashemiri ou les bagdadi, soit le fait que « l’autre » soit israélien y est pour quelque chose.

Dans la mesure où :

– l’Egypte a imposé un blocus à Gaza interdisant tout transfert (contrairement à Israël) notamment de nourriture, couvertures, générateurs électriques (juin 2010),

– l’Egypte construit un mur de séparation avec Gaza,

– le gouvernement de Mohammed Morsi issu des Frères Musulmans (le Hamas est également une aile des Frères Musulmans), lorsqu’il était au pouvoir, a fait inonder les tunnels qui passaient sous la frontière égypto-gazaouie pour empêcher le trafic d’armes par le Hamas, et

– personne, ou si peu, condamne l’Egypte, il semblerait bien que les réactions d’indignation soient motivées plus par le rejet d’Israël que par l’empathie pour les palestiniens.

Les réfugiés Israël est régulièrement condamnée par l’Onu et les médias à l’unisson

Notamment sur la questions des réfugiés palestiniens dont les descendants vivent dans la précarité et la détresse des camps de réfugiés du Liban, de Jordanie, de Syrie… Pourquoi pas. Mais il faut remettre les choses en perspective.

Le 29 novembre 1947, l’ONU vote un plan de partage de la Palestine sous mandat britannique prévoyant la création d’un Etat juif, Israël, une Etat arabe, la Palestine, et un corpus separatum pour Jérusalem sous contrôle international. La communauté juive en Palestine accepte. La communauté arabe refuse. Le 14 mai 1948 : Israël proclame son indépendance. La Naqba (« catastrophe ») pour les palestiniens. Moins de 24 heures plus tard, les armées égyptienne, jordanienne, syrienne, libanaise et irakienne envahissent le pays.

Après 13 mois de guerre, un cessez-le-feu est conclu entre Israël et les belligérants, sauf l’Irak. Pendant ces 13 mois de guerre, la grande majorité des palestiniens qui ont quitté leurs foyers l’ont fait à la demande de leurs dirigeants – imprudemment sûrs de détruire rapidement Israël – ou par peur (le mufti de Jérusalem Amin al Husseini, le poète Mahmoud Darwich, le premier ministre syrien Haled alAzrn, le secrétaire du bureau de la ligue arabe à Londres Edouard Attiya, entre autres, l’ont reconnu par écrit). Ces Palestiniens se sont réfugiés majoritairement en Jordanie, au Liban, en Egypte, en Syrie. Tous ces pays ont délibérément perpétué le problème des réfugiés palestiniens, l’exploitant comme une arme contre Israël.

De 1948 à aujourd’hui les dirigeants arabes ont maintenu les réfugiés palestiniens sur leur sol dans des camps surpeuplés et la plupart du temps miséreux. Les régimes arabes, y compris les pétro-monarchies du Golfe, ont choisi d’investir dans le soutien au terrorisme, au lieu d’aider à la réinsertion des réfugiés. Cette politique a été poursuivie en vue d’entretenir la haine d’Israël et de gagner la sympathie du monde à la cause palestinienne, aux dépens des Palestiniens eux-mêmes, tout comme le Hamas exploite la misère et le désespoir aux dépens des Gazaouis eux-mêmes.

Aujourd’hui, nombres de palestiniens et plus encore d’occidentaux en mal d’idéaux brandissent le « droit au retour » comme une condition essentielle de la paix entre Israël et ses voisins. A croire que seuls les palestiniens ont subi un exil ou que leur exil serait plus insupportable et/ou injustifié que celui des autres peuples déplacés. Là encore, une indignation à géométrie variable. A la fin de la seconde guerre mondiale, plus de 70 millions de personnes étaient déplacées. La Finlande a du absorber 400.000 réfugiés expulsés d’Union Soviétique et plus de 12 millions d’allemands vivant en Pologne et en Tchécoslovaquie ont été contraints de fuir sans indemnisation. En août 1947 a lieu la partition des Indes et la création du Pakistan. 9 millions d’hindous quittent le Pakistan pour l’Inde et 6,5 millions de musulmans font le chemin en sens inverse.

En 1975, la chute de Saigon et la victoire du nord-Vietnam communiste ouvraient les vannes du départ pour 3.000.000 de personnes en 20 ans. Les boat-people bénéficient-ils d’un droit au retour ? Accessoirement, dès le début des années 40 mais surtout à compter de l’Etat d’Israël, les juifs des pays arabes (Irak, Syrie, Egypte, Yemen, Maroc…) ont été expulsés de façon massive, leurs biens confisqués, leurs liquidités saisies. En quelques années plus de 800.000 juifs ont ainsi abandonné leur pays pour l’Europe, l’Amérique du Nord et, bien sûr et surtout, pour Israël (580.000 réfugiés entre 1948 et 1950). Ces réfugiés n’ont jamais été dédommagés. L’ONU n’a jamais créé une quelconque organisation pour leur venir en aide contrairement à l’UNRWA, agence permanente de soutien aux réfugiés palestiniens, qui compte 22.000 employés pour s’occuper de près de 5 millions de (descendants de) réfugiés dans 5 pays (décompte de l’UNRWA au 31.12.2012).

Le budget de l’UNRWA pour 2012/2013 se chiffrait à près de 2 milliards de dollars[4]. Aucun pays arabe n’a jamais accepté la mise en place d’une politique d’intégration de ces réfugiés. Et pour cause, si les « réfugiés » à venaient « retourner » en Israël et partant, à acquérir la nationalité israélienne, il suffirait d’attendre les élections suivantes pour assister à la disparition légale de l’Etat d’Israël par le vote de la majorité. Un bel exemple de démocratie… Hypothèse inenvisageable pour l’échiquier politique israélien à l’unanimité. Fait suffisamment rare pour être souligné. Voilà qui en dit long sur l’objectivité de l’ONU et de la majorité des médias.

Ces médias qui sont mystérieusement incapables de rappeler qui, de Tsahal ou du Hamas, a rompu telle trêve humanitaire (le Hamas, à chaque fois) préférant insister sur un bombardement d’une zone près d’une école sans toutefois préciser que ces tirs ont eu lieu en riposte à une salve de missiles tirée par le Hamas de cette zone densément peuplée pour éviter une réaction trop violente de Tsahal. Alors qu’Israël protège sa population avec des armes, le Hamas protège ses armes avec sa population. Ainsi et pour la troisième fois en 10 jours, des missiles ont été trouvés dans l’enceinte d’une école gérée par l’UNRWA, d’autres munitions ont été trouvées dans une moquée et un centre de commandement du Hamas dans un hôpital. Le 24 juillet dernier, le Hamas empêche l’évacuation d’un refuge de l’UNRWA à Beit Hanoun afin de maintenir les civils comme des cibles.

Mais ces informations ne se hurlent pas comme les autres, elles se susurrent. Quitte à se fâcher, autant le faire avec les moins nombreux. Le reste n’est qu’une question de curseur. Et entre l’information et la propagande, le curseur de nombre de nos médias penche de façon préoccupante vers la seconde. Consternant et inquiétant. Il est temps de se réveiller.

[1] Définition tirée du The Commander’s handbook on the law of naval operations, DEPARTMENT OF THE NAVY OFFICE OF THE CHIEF OF NAVAL OPERATIONS AND HEADQUARTERS, U.S. MARINE CORPS, DEPARTMENT OF HOMELAND SECURITY AND U.S. COAST GUARD, édition Juillet 2007, §7.7.1 https://www.usnwc.edu/getattachment/a9b8e92d-2c8d-4779-9925-0defea93325c/ 

[2] http://www.icrc.org/fre/resources/documents/misc/5fzgm5.htm

[3] http://www.un.org/News/dh/infocus/middle_east/Gaza_Flotilla_Panel_Report.pdf

{4] http://www.unrwa.org/how-you-can-help/how-we-spend-funds

Quitter la version mobile