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Valls 2: les frondeurs voteront la confiance ou Hollande dissoudra

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François Hollande a demandé à Manuel Valls de former un nouveau gouvernement (Photo: Shutterstock.com)

JOL Press : Manuel Valls doit composer un nouveau gouvernement « en cohérence avec les orientations que le chef de l’Etat a lui-même définies pour notre pays », a indiqué l’Elysée. Qu’est-ce que cela signifie ? 
 

Christophe Bouillaud : On peut penser que tous les ministres qui sont en désaccord avec le cap fixé par François Hollande seront priés de faire leurs valises. L’indiscipline d’Arnaud Montebourg était d’autant plus intolérable que le chef de l’Etat a lui-même réaffirmé sa ligne politique, mercredi 20 août, dans un long entretien accordé au Monde. Le ministre de l’Economie savait à quoi s’en tenir avant de persister dans sa critique du gouvernement. Il s’agit en quelque sorte d’un divorce par consentement mutuel.

Il serait incompréhensible que les ministres qui ont remis en cause la politique de l’exécutif soient reconduits. Outre Arnaud Montebourg (Economie), Benoît Hamon (Education nationale) et Aurélie Filippetti (la ministre de la Culture a annoncé, lundi 25 août dans l’après-midi, qu’elle ne souhaite pas participer au prochain gouvernement, ndlr) risquent de ne pas retrouver leur portefeuille dans le prochain gouvernement.

JOL Press : Sur le fond, comment interpréter la décision de François Hollande de se passer d’Arnaud Montebourg ? 
 

Christophe Bouillaud : D’une part, François Hollande n’a ni l’envie ni le courage de déclencher une crise européenne majeure en remettant en cause la politique économique menée par Bruxelles. Sur ce point, le président veut à tout prix éviter une discussion musclée avec l’Allemagne, accusée d’être responsable des politiques d’austérité en Europe.

Or, samedi 23 août, Arnaud Montebourg a estimé qu’il fallait « hausser le ton » vis-à-vis de l’Allemagne. « Je souhaite que nous puissions convaincre nos partenaires européens de donner une priorité à la croissance », a-t-il dit. Cette volonté de confrontation avec Berlin prend le contrepied de celle d’apaisement et de consensus affichée par le chef de l’Etat. François Hollande est un « bébé Delors » (président de la Commission européenne de 1985 à 1995, ndlr) et, pour lui, l’Europe n’est pas négociable, entrer en conflit avec un partenaire européen est tout simplement inenvisageable.

D’autre part, François Hollande montre qu’il n’est pas celui que l’on se plaît souvent à dépeindre : un président indécis, sans autorité, qui ne sait pas trancher et qui a pour seul souci de préserver les équilibres internes au sein de son gouvernement – au risque de la cacophonie.

JOL Press : A quel prix politique ce changement de gouvernement peut-il se faire ? 
 

Christophe Bouillaud : La Ve République est un régime semi-présidentiel : le gouvernement doit obtenir la confiance du Parlement. Ce sera le moment de vérité. Jamais en effet la majorité parlementaire n’a été aussi fragile. Les écologistes ont quitté le gouvernement. Les radicaux de gauche menacent d’en sortir. Et depuis le printemps s’est constitué, au sein du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, un petit groupe de frondeurs.

Je pense que François Hollande va mettre le couteau sous la gorge des députés qui critiquent l’exécutif. Le calcul politique est simple : soit ils votent la confiance au gouvernement Valls II, soit le chef de l’Etat dissout l’Assemblée et – au vu de l’impopularité du président socialiste – les députés PS ont très peu de chances de retrouver leur siège.

L’entrée d’écologistes dans le nouveau gouvernement est évoquée. Mais la secrétaire nationale des Verts, Emmanuelle Cosse, aurait déjà prévenu par la voix de son entourage : « Si des écolos deviennent ministres, c’est en leur nom propre. » Si l’exécutif obtient la confiance du Parlement, cela se jouera à quelques voix près. Surtout, ce sera sous la menace d’une dissolution.

Propos recueillis par Marie Slavicek pour JOL Press

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