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Google doit-il révéler son algorithme?

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(Crédit : Shutterstock)

 

L’algorithme de Google (comme la recette de Coca-Cola…) fait partie des secrets les mieux gardés au monde

Quel site web – souvent conseillé, au prix fort, par des sociétés spécialisées dans le référencement – n’a pas tenté de faire « remonter » son identité dans les pages de résultats ?

L’éclairage de Olivier Tesquet, journaliste spécialisé dans les questions numériques.

 

JOL Press : L’affichage des résultats sur Google est-il la « pure » résultante d’une formule mathématique ? Si non, comment expliquer les accusations portées contre la firme californienne de trop mettre en avant ses propres services dans ses résultats, au détriment de la concurrence ? 

 

Olivier Tesquet : C’est le noeud du problème sur le moteur de recherche, en même temps que le point le plus opaque.

L’algorithme, c’est le coeur du réacteur pour Google (dans ce domaine en tout cas) depuis l’invention du PageRank en 1997, et à ce titre, il est aussi secret qu’il est arbitraire.

Jusqu’à très récemment, la neutralité de Google en tant que moteur de recherche n’était pas vraiment contestée, et ce sont les différents contentieux (avec la presse en France et en Allemagne notamment) qui ont fait prendre conscience d’une information qu’on avait obérée jusqu’ici : Google est une entreprise, pas un service public.

Ses opposants au niveau européen – et ils sont de plus en plus nombreux, rassemblés au sein de l’Open Internet Project – essaient d’ailleurs de faire condamner la firme de Mountain View au niveau européen pour abus de position dominante. Ils ont d’ailleurs déposé une plainte en ce sens en mai dernier.

JOL Press : Le ministre allemand de la Justice a cette semaine évoqué un « démantèlement » de Google. Juridiquement, serait-ce envisageable ?

 

Olivier Tesquet C’est Mathias Döpfner, le patron d’Axel Springer, qui a ouvert la boite de Pandore au printemps dernier, en publiant une lettre ouverte dans laquelle il affirmait « avoir peur de Google ».

Depuis, les autres membres de l’OIP ont dénoncé la logique monopolistique de Google en proposant un « dégroupage ».

En soi, c’est surtout un effet d’annonce. Par « démantèlement », il faut surtout comprendre un souhait de s’attaquer à la fiscalité particulièrement avantageuse de Google, qui paie très peu d’impôts grâce à son fameux Double Irish with a Dutch Sandwich.

Bercy s’est emparé du sujet depuis deux ans, mais ne cesse de plaider depuis pour une coopération internationale, puisque ce sont tous les géants d’Internet qui sont visés.

JOL Press : Dans le cadre de l’enquête ouverte par la Commission européenne en novembre 2010, l’Union européenne avait fini par annoncer en février que les propositions de « remèdes » de Google étaient satisfaisantes, laissant augurer une solution à l’amiable. Où en est-on ? 

 

Olivier Tesquet Google a fini par trouver un accord a minima avec Joaquin Almunia en février dernier, mais les acteurs européens sont très loin d’être satisfaits.

Arnaud Montebourg était même allé jusqu’à déclarer que le commissaire à la concurrence s’était « agenouillé » devant Google.

Un organisme indépendant est censé s’assurer que le moteur de recherche respecte ses engagements sur la mise en avant d’autres services que les siens, mais la question est la suivante : aura-t-il un quelconque pouvoir de sanction le cas échéant ?

C’est à travers ce prisme qu’il faut interpréter la plainte déposée juste avant les élections européennes par l’OIP : ses membres espèrent négocier un nouvel accord quand Almunia aura quitté ses fonctions fin octobre.

 

Propos recueillis par Coralie Muller pour JOL Press

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Olivier Tesquet est journaliste au service Médias/Net de Télérama, après avoir travaillé sur Slate.fr et Owni.fr. Spécialisé dans les questions numériques, il est l’auteur de « Comprendre WikiLeaks » (éditions MaxMilo, 2011). Il est également chroniqueur dans le 7-9 du Mouv’.

 

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