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Denis Mukwege, alias «Docteur miracle», reçoit le prix Sakharov

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« Ma première malade, en 1999, avait été violée, puis on lui avait introduit une arme dans l’appareil génital et fait feu, elle avait tout le bassin détruit. Je pensais que c’était l’œuvre d’un fou, mais la même année j’ai soigné 45 cas semblables. » Le témoignage de Denis Mukwege est glaçant. 

Depuis 15 ans, ce gynécologue congolais, âgé de 59 ans, a pu « réparer » les corps de plus de 40 000 femmes, victimes de viols de guerre, notamment en République démocratique du Congo (RDC). Mardi 21 octobre, le Parlement européen lui a attribué le prix Sakharov « pour la liberté de l’esprit ». Surnommé « Docteur miracle », il a été plusieurs fois pressenti pour le prix Nobel de la paix.

« Atrocités de masse »

Lauréat du prix de la Fondation Chirac, Denis Mukwege avait expliqué en décembre 2013 : « Je suis témoin d’atrocités de masse commises sur le corps des femmes (…) et je ne peux pas rester les bras croisés, car notre humanité commune nous invite à prendre soin les uns des autres. » 

Et d’ajouter : après avoir été violées, « les personnes restent apparemment en vie. En réalité, les familles, les villages, les sociétés sont détruits. Sur des générations ». « Vagins déchiquetés, clitoris coupés, les femmes violées bien souvent ne pourront plus avoir d’enfants ; elles deviennent des réservoirs à virus, leurs enfants sont exclus de la communauté », souligne La Figaro.

Né en 1955 à Bukavu, dans l’est du Congo belge, Denis Mukwege est le troisième fils d’une famille pentecôtiste de neuf enfants. Il étudie la médecine au Burundi voisin. A la faveur d’une bourse, il part étudier en France, à Angers, pour se spécialiser en gynécologie-obstétrique. 

Tentatives de meurtre

En 1989, il choisit de retourner dans son pays. En 1996, le conflit éclate : l’hôpital de Lemera, où il travaille, est dévasté. Le médecin vit alors comme un déplacé de guerre et côtoie la misère. C’est à ce moment-là qu’il décide de fonder un hôpital à Panzi, au sud de Bukavu, pour soigner les femmes victimes de la barbarie des groupes armés qui saccagent l’est du pays. 

Chaque année, cet établissement, dont il en est le directeur, prend en charge gratuitement plus de 3 500 victimes de violences sexuelles et leur permet de bénéficier d’une chirurgie reconstructive. 

Marié et père de cinq enfants, Denis Mukwege a failli payer de sa vie son engagement. Il a été victime de six tentatives de meurtre. Un soir d’octobre 2012, cinq hommes armés se sont introduits chez lui. L’un des ses domestiques s’est sacrifié pour sauver « l’homme qui répare les femmes ».

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