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Drones: a-t-on réellement pris conscience du danger?

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Sept centrales nucléaires françaises ont été survolées par des drones au mois d’octobre – shutterstock.com

A l’occasion de son audition par les parlementaires de l’Office Parlementaire d’Évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), Greenpeace a remis, le 24 novembre, un rapport aux autorités (Direction de l’ASN, de l’IRSN, ministère du Développement Durable, Matignon, ministère de l’Intérieur et OPECST). Ce document n’a pas rendu public, car l’ONG écologiste souhaite éviter que des informations sensibles puissent être facilement accessibles à des personnes mal intentionnées.

Depuis le 14 septembre plus de 30 survols par des drones ont été recensés sur 19 sites nucléaires français, dont 14 centrales nucléaires exploitées par EDF. Si les responsables de ses vols et leurs intentions ne sont, à ce jour, pas connus, il est apparu extrêmement urgent, pour Greenpeace, d’évaluer les dangers de ce genre de survol. L’ONG a donc sollicité John Large, expert britannique en matière de sécurité nucléaire, afin d’établir les risques que font peser les drones sur des centrales françaises.

Des drones très difficiles à détecter

La plupart des survols de drones ont eu lieu pendant la nuit et se sont aussi avérés, de ce fait, extrêmement difficiles à détecter par les équipements de surveillance installés sur les sites nucléaires. Selon John Large les équipements des  centrales nucléaires sont dépassés : « Le problème, c’est qu’elles ont été conçues à une époque où les smartphones et les drones n’existaient pas. Elles ne sont donc pas pensées pour faire face à ce type de menaces. Or, aujourd’hui, les transferts de technologies militaires vers le civil rendent ces engins très performants », estime-t-il dans une interview au Figaro.

Et d’ajouter : « Aujourd’hui, les drones légers ont une signature thermique très faible et ne peuvent pas être détectés par les radars. En vente sur Internet, ils sont accessibles à tous. »

Pas de danger selon le gouvernement

Pour Pierre-Henry Brandet, le porte-parole du ministère de l’Intérieur, ces drones civils ne présentaient pas de danger car ils peuvent être neutralisés à tout moment. « Il faut faire la part des choses entre le fait qu’un drone puisse survoler un espace interdit et le fait qu’il représente un véritable danger », a-t-il estimé. « Vous imaginez bien qu’un drone civil que l’on peut acheter dans le commerce ne présente pas de danger pour une installation nucléaire. Des installations qui sont conçues pour résister à des secousses sismiques importantes ou à des chutes d’avions de ligne », a-t-il insisté.

« La sécurité des centrales nucléaires est assez forte pour résister à ces risques », a complèté Ségolène Royal. Une réaction qui ne surprend pas l’expert britannique : « Leur attitude ne me surprend pas. Les forces de sécurité n’ont pas les moyens de réagir face aux drones. Donc, pour ne pas effrayer la population, on dit qu’il n’y a pas de danger. J’ai été expert en Angleterre, aux États-Unis et en Russie ; à chaque fois, c’est la même chose: on veut rassurer les populations », explique-t-il.

De nouveaux dispositifs de sécurité

Selon Le Parisien des pelotons de gendarmerie auraient obtenu le droit de tirer sur les drones s’approchant des centrales, décision prise à l’issue de la réunion de vendredi au ministère de l’Intérieur. Des tirs en revanche interdits en direction des centrales et au-dessus des installations. « Il y a un peloton dans chaque centrale, payé par EDF, en plus de la surveillance assurée par des agents privés. Ce sont des groupes de 24 à 30 personnes qui se relaient », a précisé un conseiller de Matignon. Des pelotons qui auraient « pour instruction permanente d’abattre tous les aéronefs qui pourraient représenter un danger pour les centrales et cela s’applique aussi aux drones ».

« Nous ne nous exprimons pas en dehors de notre champ de compétences », a de son côté déclaré l’ASN (Autorité de sûreté nucléaire) avant de rappeler que la sécurité aérienne des centrales relevait du Haut fonctionnaire de défense et de sécurité rattaché au ministère de l’Écologie et de l’énergie. Une manière habile de ne porter aucune responsabilité…

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