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Les logiciels UMP/PS obsolètes face au FN version Marine Le Pen

02.12.2014 par La Rédaction

Entretien avec avec Jacques Le Bohec, professeur à l’Université Lyon 2.

Le 15e congrès du Front national a pris fin, dimanche 30 novembre, après deux jours de discours et de débats. Marine Le Pen a été réélue à la tête de la formation politique avec 100% des voix et un nouveau comité central, sorte de parlement du FN, a été défini par les adhérents. Grande gagnante de ce congrès : Marion Maréchal-Le Pen, nièce de la présidente et petite-fille du fondateur du parti, qui est arrivée en tête à l’élection du comité central.

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Marine Le Pen vient d’être réélue présidente du FN – shutterstock.com

Sans surprise, Marine Le Pen a été réélue ce dimanche présidente du FN avec un score de 100% des voix exprimées, lors du 15e congrès du Front national à Lyon. Au-delà de ce vote sans enjeu, quels enseignements tirer de ce Congrès ?

JOL Press : Marine Le Pen, à nouveau élue pour un mandat de trois ans. Comment expliquer l’absence de candidature face à elle ?
 

Jacques Le Bohec : Il y a plusieurs causes et raisons. La première réside dans les succès électoraux récents aux scrutins municipaux et européens. Pourquoi changer de leader alors que ses performances placent son parti en tête de tous les partis français ? Les bisbilles entre le père et la fille, comme les enjeux du changement de nom ou de la ligne politique, deviennent alors secondaires, accessoires.

La deuxième est liée aux sondages qui anticipent les scores du premier tour et qui prédisent, c’est du moins l’interprétation habituelle des professionnels de la politique, l’accession de la fille cadette de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle. Et de fait, compte tenu de l’impéritie et de l’inefficacité des mesures prises par les gouvernants qui se sont succédé depuis vingt ans à résorber le chômage et les problèmes issus des inégalités sociales, l’hypothèse est plus que probable. En face, sans l’avouer clairement, c’est à qui sera en face, du champion de l’UMP ou du champion du PS. Surtout, chacun croit que, s’il a Marine Le Pen en face, il est sûr de l’emporter au second tour, se basant sur le précédent de 2002 et des 82% de Jacques Chirac. Mais c’est jouer avec les allumettes, y compris de la part des grands médias, et au Front national on sait très bien tout cela. De très nombreux électeurs ne se reporteront pas sur le candidat qui restera en lice en face d’elle… et une « surprise » pourrait avoir lieu.

La troisième raison tient à la notoriété du patronyme « Le Pen », conquise et transmise au sein de la famille. Certains observateurs critiquent un fonctionnement népotique qui a toujours été une garantie de loyauté au sein d’un organigramme quelconque. Mais ce patronyme morbihannais est une marque porteuse au moins autant que la dénomination Front national, jusqu’à devenir un nom commun (lepénisation, lepénistes, etc.). C’est aussi elle qui participe aux succès électoraux. Ce parti est ainsi quasiment voué, obligé, de promouvoir les membres de la famille Le Pen en son sein. Marion Maréchal-Le Pen représente la génération suivante, qui montrera le bout de son nez après 2017 dans tous les cas de figure. Ce n’est pas par hasard si Marine Le Pen arbore son nom de jeune fille. Elle sait bien que c’est son principal atout et que les journalistes vont s’y conformer.

Quatrième raison, le travail de polissage de l’image publique effectué par Marine Le Pen, notamment en excluant les adhérents aux comportements trop ambigus, satisfait les nouvelles générations de militants, qui se sentent moins stigmatisés, plus normaux, ce qui crée de la reconnaissance envers la leader en titre, et les anciennes pensent  que c’est de la poudre aux yeux afin de mieux faire passer des messages provocateurs aux relents racistes et surtout islamophobes en ce moment, comme on pouvait le noter aux réactions de l’assistance dans l’amphithéâtre du Centre des congrès de Lyon le week-end dernier.

Cinquième élément, Marine Le Pen s’efforce, dans ses discours et ses interviews, de donner des gages aux diverses tendances et sensibilités internes, qui ne se sentent dès lors pas marginalisées.

Enfin, sixième cause, les opposants internes précédents ont connu des déboires divers (Bruno Mégret) ou sont trop âgés et clivants (Bruno Gollnisch) pour rivaliser avec le clan Le Pen. Ils ne disposent pas des ressources et des atouts pour ne pas être ridiculisés, alors ils préfèrent soit faire bande à part (les Bompard dans le Vaucluse, par exemple), soit rejoindre le giron de l’UMP, soit rester discrets. Cette crainte de la défaire cuisante (voir les propos auto-rassurants d’Hervé Mariton après son score aux primaires de l’UMP) en refroidit plus d’un, à supposer qu’il y ait un cadre dirigeant d’envergure capable de rivaliser avec Marine Le Pen face aux journalistes.

JOL Press : La dé-diabolisation du FN, le discours de plus en plus social de sa fille – « gauchisant » diront certains – ne plaît pas à tout le monde. Qu’en pensent les militants ?
 

Jacques Le Bohec : Sans doute ces deux choses sont-elles vraies : la reprise de thèmes plus proches de la gauche et le fait que tout le monde au sein du Front national n’abonde pas. Une partie des cadres dirigeants sont en effet des intellectuels doctrinaires, en moins grand nombre qu’auparavant, mais le fait est que Marine Le Pen expose des idées opposées au libéralisme prôné naguère par son père, les idées nationalistes restant le ferment et le socle. Dans son discours de dimanche dernier, elle se posait entre l’étatisme et le libéralisme à tout crin, ne rejetant pas les interventions de l’Etat pour réguler la société et l’économie. Elle met également en avant les inégalités de revenus, les retraités et les chômeurs, en faisant preuve d’une certaine empathie, ne fustigeant pas ces derniers comme des fainéants, comme il est fréquent dans les anciennes générations ultra-conservatrices.

Une grande partie des délégués présents, assez âgés, surtout le samedi, ne peuvent être que sensibles à l’idée de revaloriser les retraites. Beaucoup d’entre eux vivent des situations socio-professionnelles bloquées et peu prestigieuses. Ils ont le sentiment d’être les laissés pour compte d’une société trop moderne, qui tourne le dos à la France d’antan, d’où une certaine nostalgie coloniale incarnée par Jean-Marie Le Pen et les allusions appuyées de sa fille sur les territoires ultra-marins mais français. Elle a fait applaudir les délégués de ces territoires, façon aussi de faire un pied de nez aux accusations de racisme. Néanmoins, pas plus de leur côté que des nombreux journalistes qui couvraient «  l’événement »…, on ne voyait guère de visages autres que caucasiens. C’était également le cas des quelques chercheurs en science politique sur place… 

Comme je le disais à l’instant, Marine Le Pen sait faire et son discours donnait des satisfactions à tout le monde. D’aucuns verront une influence de Florian Philippot, mais il ne faut pas oublier que la benjamine n’est pas son père et que ce n’est pas un hasard si elle est sensible à d’autres thèmes. Les différences doctrinales passent par pertes et profits tant que le FN est sur une pente ascendante. Elles deviendraient un motif de dissensions et de scissions si, comme dans les années 1970, les résultats électoraux n’étaient pas au rendez-vous.

 Concernant la « dé-diabolisation », il ne faut pas oublier que ce processus n’est pas le fait unique des gens du FN, réductible à une stratégie plus ou moins efficace, mais aussi et peut-être surtout d’autres protagonistes comme les médias et les journalistes qui peuvent avoir intérêt, ce serait-ce que pour faire de l’audience, à inviter souvent Marine Le Pen à s’exprimer, quitte à se comporter de façon naïve et engoncée vis-à-vis d’elle, comme Jean-Michel Apathie ce lundi matin sur RTL, qui s’efforçait de l’embêter mais d’une façon tellement confuse qu’elle ne pouvait que s’en tirer haut la main. Leurs maladresses contribuent, involontairement sans doute, à la poser sur un piédestal.

JOL Press : Comment interpréter la préférence des militants pour Marion Maréchal Le Pen ?
 

Jacques Le Bohec : Cela s’explique par les éléments que je vous ai signalés: le patrimoine patronymique hérité. Mais aussi par le fait que son grand-père manifeste un soutien personnel à ses prises de position plus proches des siennes. Elle bénéficie en quelque sorte d’un « charisme par procuration », comme un politiste comme Bernard Lacroix a pu le formuler en s’inspirant des idées types de domination de Max Weber. Jean-Marie Le Pen l’a en quelque sorte « adoubée ». Elle est en outre un mixte entre des idées traditionnelles au sein du FN tout en étant une femme très jeune, ce qui casse le stéréotype du jeune néo-nazi tatoué servant de nervis au Département protection sécurité (DPS), le service d’ordre du Front national. Elle aussi donne une bonne image, une façade plaisante, à des idées qui peuvent être rancies.

Enfin, on ne peut exclure qu’elle ait reçu le soutien de la vieille garde incitée par son grand-père à voter pour elle, d’où le score élevé qu’elle a obtenu en interne, qui ne doit cependant pas cacher que les soutiens de Marine Le Pen sont plus nombreux que la ligne Jean-Marie/Marion dans le bureau politique.

JOL Press : Marine Le Pen croit-elle vraiment pouvoir arriver au pouvoir sans faire d’alliances ?
 

Jacques Le Bohec : Classe politique et journalistes essaient de la convaincre en effet depuis quelques jours qu’elle ne pourra pas gouverner sans s’allier avec d’autres partis. Ils ont remarqué qu’ils pouvaient parfois influer, même à la marge, sur son discours ou sa stratégie. Tout est une question d’arithmétique. Si les candidats de son parti arrivent en tête, ils se débrouilleront pour se gouverner comme les autres organisations politiques. Des gens alors sortiront du bois. D’autres y verront une opportunité de carrière. D’autres se soumettront en arguant une neutralité professionnelle de haut, de moyen ou de petit fonctionnaire respectueux de la volonté populaire. Voyez ce qui se passe dans les mairies gagnées actuellement, etc.

Il n’est pas impossible non que les dirigeants du FN n’y croient pas tout à fait. Ils font tout pour y arriver, mais songent inconsciemment qu’on ne les laissera pas faire, que ce serait déjà très bien de gagner plein de sièges dans les assemblées et de tabler pour une accession au gouvernement l’étape suivante. Ils peuvent également se dire que, si d’aventure Marine Le Pen gagnait au second tour de l’élection présidentielle, il y aurait une telle effervescence dans les rues le soir et le lendemain qu’il n’est pas certain que l’événement débouche sur une alternance pacifique et sans soubresauts. Cette anticipation de l’échec et du blocage ne les incite pas à rechercher des alliances avec des partenaires qui risquent de toute façon de ne pas vouloir d’eux malgré l’identité d’idées par exemple entre toute une partie de l’UMP actuelle et le FN. Sinon, avec qui ? Avec la Ligue du sud des Bompard ou avec le futur parti de Dieudonné ?

JOL Press : Quels sont aujourd’hui les obstacles à cette ascension ?
 

Jacques Le Bohec : Je ne vois pas beaucoup d’obstacles à l’accession du FN en vue de la conquête d’une part du marché électoral bien plus importante demain qu’aujourd’hui. La lutte idéologique est naïve alors que les principaux partis reprennent les idées du FN à leur compte depuis vingt ans. L’UMP et le PS n’ont que de belles valeurs et de beaux principes à la bouche, mais ils mènent une politique et tiennent des discours qui valident et légitiment le fond doctrinal du FN… La quête d’un argumentaire anti-FN donne bonne conscience (voir ce qui se passe au PS en ce moment sous la houlette de Jean-Christophe Cambédélis) et se base sur l’idée que les électeurs se décident en sa faveur parce qu’ils adhèrent à ses idées (diversifiées et divergentes). La vérité est qu’ils n’ont toujours pas compris quelles sont les structures du phénomène Le Pen et qu’ils ne veulent surtout pas les connaître quand cela met en cause leurs intérêts, leurs croyances et leurs routines professionnelles. Parmi celles-ci on peut noter par exemple la confiance exagérée dans les chiffres fabriqués par les sondeurs, qui ont tendance à les enfermer dans ces croyances et ces routines et à ne pas voir ce qui se passe réellement.

A l’UMP et au PS, on pense futé par exemple de faire de la surenchère sur l’immigration dans les faits et dans les discours, alors c’est parfaitement stupide et contre-performant. Il faut dire qu’une grande partie du personnel politique se recrute dans les couches favorisées de la société et qu’il dispose rarement des connaissances accumulées par les sciences sociales pour compenser son éloignement social et son isolement dans le microcosme politique. Ils disent alors pas mal de bêtises qui peuvent être interprétées comme des mensonges. De plus, quand on voit les scandales de corruption et les mensonges éhontés de certains politiciens, cela encourage un rejet massif des élus, un reflux de la citoyenneté, un écœurement général.

Dans la gauche radicale, on se complait dans la désunion et un médiocre esprit de boutique qui finit par faire de ces dirigeants et de ces partis des complices objectifs du FN alors que la situation sociale leur est en théorie très favorable. Dans ces conditions, on se demande ce qu’il faudrait que Marine le Pen fasse pour ne pas bénéficier électoralement d’un tel contexte. Les autres en face sont vraiment très mauvais et certains voient même un intérêt à ce que son parti fasse de bons scores, comme lorsque François Mitterrand avait changé le mode de scrutin en 1985 afin d’essayer d’empêcher la coalition UDF-RP d’atteindre la majorité absolue à l’Assemblée nationale en 1986 ; ils eurent assez de députés pour créer un groupe mais pas pour empêcher une majorité alternative.

Propos recueillis par Marine Tertrais pour JOL Press

Jacques Le Bohec est professeur à l’Université Lyon 2, diplômé de Sciences-Po Bordeaux et spécialisé en sciences de l’information et de la communication.

Ouvrages parus:
– Gauche-droite. Genèse d’un clivage politique, coll. en codirection avec C. Le Digol, PUF
– Dictionnaire du journalisme et des médias, PUR, 2010.
– Elections et télévision, PUG, 2007.
– Sociologie du phénomène Le Pen, La Découverte, Repères, 2005.
– Les interactions entre les journalistes et J.-M. Le Pen, L’Harmattan, 2004.
– L’implication des journalistes dans le phénomène Le Pen, L’Harmattan, 2004.
– Les mythes professionnels des journalistes, L’Harmattan, 2000.
– Les rapports presse-politique, L’Harmattan, 1997.

La Rédaction


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