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Refus d’enterrer un bébé rom : le parquet ouvre une enquête

[image:1, l] Alors que les réactions indignées se sont multipliées ce weekend, suite au refus du maire de Champlan (Essonne) d’enterrer une fillette rom dans le cimetière de sa commune, le parquet d’Evry a annoncé avoir ouvert une enquête, dimanche, pour « discrimination ».

Dans un communiqué, le procureur de la République a précisé que « cette enquête (…) aura pour objet de recueillir les déclarations des personnes ayant eu à connaître de cette situation et de déterminer les conditions dans lesquelles ce refus aurait été opposé à la famille. »

Mort subite du nourrisson

Née en octobre dernier, la petite fille a a priori succombé à la mort subite du nourrisson dans la nuit du 26 décembre.

Sa famille vivait depuis plus d’un an sur le terrain vague de la petite commune avec d’autres familles roms.

Une entreprise de pompes funèbres a fait une demande d’inhumation à la mairie de Champlan. L’autorisation ne leur a pas été accordée.

Les regards se sont tournés vers le maire divers droite de Champlan Christian Leclerc, qui aurait refusé cette inhumation

« Une dramatique interprétation »

Un refus que nie le maire de la commune, pour qui « il y a eu une dramatique interprétation », en période de congés.  

« Je ne comprends pas du tout cette situation, qui a été abusivement exploitée par certaines personnes, et je le déplore profondément », a-t-il affirmé sur BFMTV.

« Je suis revenu exprès le vendredi matin [jour du décès du bébé] pour m’occuper d’une autre inhumation, celle d’une dame âgée dans une famille de gens du voyage. » 

« La gendarmerie m’a appris la mort de l’enfant rom aux alentours de midi. Sachant que je partais le lendemain en congés, j’ai donné des consignes à mon premier adjoint de s’occuper des papiers dans ce dossier. »

Selon lui, concernant le lieu de l’inhumation, il y avait « le choix » entre Corbeil-Essonnes, où le décès de l’enfant a été constaté à l’hôpital, et Champlan, où la famille résidait.

Le maire dit ne pas avoir eu connaissance « des consignes de la famille ». Il aurait alors donné son accord pour les deux solutions, une réponse qui aurait, selon lui, été interprétée comme un refus.

Dans le cimetière, « priorité est donnée à ceux qui paient leurs impôts locaux »

Le maire dénonce aussi une « interprétation » de ses propos, relayés samedi par Le Parisien.

« Nous avons peu de places disponibles (…). Il nous faut gérer les places au cas par cas, selon les circonstances et si la famille habite sur place (…). » 

« Les concessions sont accordées à un prix symbolique et l’entretien coûte cher alors priorité est donnée à ceux qui paient leurs impôts locaux », justifiait-t-il.

Mais pour Christian Leclerc, sa réaction sur la gestion des places du cimetière « n’avait aucun lien avec la mort de la petite fille. »

Vives réactions politiques

Mais l’affaire a déjà pris de l’ampleur.

Dans un tweet dimanche matin, le Premier ministre Manuel Valls a réagi à l’affaire qui secoue la petite commune de Champlan, dans l’Essonne.

Le Défenseur des droits, Jacques Toubon, a déclaré dimanche se saisir « d’office de la situation »

« Sur un plan humain, je suis bouleversé, stupéfait », a-t-il déclaré sur France Inter. 

« Malheureusement, aujourd’hui, il y a encore beaucoup de personnes qui ne sont pas égales aux autres en ce qui concerne leurs obsèques, leur enterrement, leur sépulture » a déploré Jacques Toubon.

« Il est clair qu’il y a dans cette affaire des questions de droit. » « En tant que défenseur des droits, je dois d’abord, dans une situation comme celle-là, avoir toutes les informations pour juger », a-t-il ajouté.

Plusieurs responsables politiques de toute tendance ont également réagi à cette affaire.

La vice-présidente du MoDem, Marielle de Sarnez, parle elle sur Europe 1 de décision « injustifiable et inhumaine ».

« Je n’arrive même pas à comprendre comment ce maire a pu penser et aborder la question de cette façon-là. »

Le co-président du groupe EELV à l’Assemblée nationale, François de Rugy, s’est aussi indigné à la radio.

« Je crois que l’on est tombé très très bas dans l’inhumanité (…) Un maire est quelqu’un qui est là pour assurer le vivre-ensemble. »

Sur les réseaux sociaux, la vice-présidente déléguée de l’UMP, Nathalie Kosciusko-Morizet, parle aussi d’un refus « injustifiable »

Alexis Bachelay, député PS des Hauts-de-Seine, a aussi réagi :

 « Simple souci d’humanité »

La fillette a finalement été inhumée lundi à Wissous, à sept kilomètres de Champlan.

Une centaine de personnes étaient présentes : des Roms, des membres d’associations et des élus, dont le maire UMP de cette commune, Richard Trinquier.

Par « simple souci d’humanité, on ne pouvait pas laisser cette situation dans l’état », avait-il affirmé dimanche.

« Chaque élu » doit avoir « un minimum d’humanité » « à l’égard de toute personne », a-t-il ajouté.

Pour lui, refuser l’inhumation, « c’est indigne de la part d’un représentant de la République, d’un élu », « quelque soit l’opinion » de l’élu sur les Roms.

Richard Trinquier, qui dit avoir déjà croisé à plusieurs reprises le maire de Champlan, s’est dit étonné de cette décision et se demande si c’est un « malentendu »

De son côté, l’association de soutien aux Roms, qui avait dénoncé l’affaire et accusé le maire de Champlan de racisme, maintient sa version et attend que Jacques Toubon fasse « toute la lumière qu’il souhaite sur cette affaire qui devient brûlante », a déclaré Loïc Gandais, le président de l’Association de solidarité en Essonne avec les familles roumaines et roms

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