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Les passeurs libyens dans le collimateur de l’Italie

François Hollande les a qualifiés de « terroristes », Matteo Renzi « d’esclavagistes ». Les passeurs, qui entassent chaque jour des centaines de migrants sur des bateaux, à prix d’or et dans des conditions inadmissibles, ont établi leur base principalement en Libye. Alors que les ministres des Affaires étrangères et de l’Intérieur de l’UE vont se retrouver lundi dans la capitale luxembourgeoise, l’Italie étudie la possibilité d’«interventions ciblées» à l’encontre des passeurs en Libye.

Après la mort du « Guide suprême », en 2011, le pays a basculé dans le chaos. Deux forces politiques, chacune dotée d’un gouvernement et d’un parlement, s’affrontent et revendiquent la tête du pays. Le gouvernement légitime basé dans la capitale Tripoli et le gouvernement des milices coalisées qui a fait de Tobrouk son chef-lieu. Les divisions au sein de chaque camp, l’échec des forces politiques à imposer leur autorité sur les puissantes milices armées et la montée en force des groupes djihadistes comme Daech, rendent pour l’instant toute sortie du conflit impossible. Le concentre tous les ingrédients pour une perpétuation de l’instabilité

Vendredi, Matteo Renzi avait évoqué la situation en Libye avec le président américain Barack Obama. Tous deux avaient convenu que « la seule solution aujourd’hui est la paix (en Libye, Ndlr) et la stabilité des institutions. » Face à l’urgence, le chef du gouvernement italien semble se tourner dans un premier temps vers davantage de pragmatisme. « L’hypothèse d’une intervention militaire n’est pas sur le tapis », mais ce qui est possible, « ce sont des interventions ciblées pour détruire un racket criminel », a déclaré Matteo Renzi lors d’une conférence de presse aux côtés de son homologue maltais, Joseph Muscat. « Les hypothèses techniques sont étudiées par des techniciens » dont « des équipes de la Défense », a-t-il indiqué. « Tant qu’il n’y aura pas d’autorité politique à peu près stable en Libye, les côtes libyennes serviront à tous ces trafics orduriers », a dénonce Michel Sapin sur BFMTV.

Parallèlement, la justice italienne continue la battue sur son territoire. Le parquet de Palerme a annoncé, lundi 20 avril – alors même que nous apprenions qu’un nouveau naufrage responsable de plus de 800 victimes avait lieu –  avoir mis en examen 24 personnes soupçonnées d’être liées à un réseau d’immigration clandestine. Certaines d’entre elles résidaient dans des centres de rétention, dont celui de Mineo, en Sicile. Les autres vivent dans le Latium et en Lombardie. Ils auraient organisé au moins quinze voyages depuis mai 2014.

Un péril de plus s’est a fait son entrée dans lé région. L’Etat islamique, qui a pris pied dans le pays à la faveur du chaos qui y règne, contrôle notamment des zones dans la région de Syrte, à 450 km à l’est de Tripoli. Dans une nouvelle vidéo diffusée dimanche 19 avril sur les réseaux sociaux, le groupe a filmé l’assassinat d’au moins vingt-huit hommes présentés comme adeptes de « l’Eglise éthiopienne ennemie. » Des migrants interceptés en Libye, selon le porte-parole du gouvernement éthiopien, Redouane Hussein. Non content de faire peser une menace de plus sur les migrants, le groupe djihadiste envisage d’envoyer à la dérive en direction des côtes italiennes « des centaines de barques remplies de migrants, dès le moment où notre pays évoquerait une intervention armée en Libye » – chantage scandaleux qui fait planer l’ombre d’un désastre humanitaire sans précédent.

Depuis le début de l’année, 1.600 migrants ont perdu la vie en Méditerranée, la plupart en tentant de traverser les 350 kilomètres qui séparent les côtes libyennes de l’Italie. Ces traversées ne sont évidemment pas une nouveauté, mais leur nombre ne cesse d’augmenter. Depuis le début de l’année, ce sont au total 35.000 migrants qui sont arrivés par bateau dans le sud de l’Europe. Il y aurait, avec le beau temps, « entre 300 et 700 migrants » quittant la Libye chaque jour, selon un officier d’une milice libyenne interrogé par Le Monde.

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