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Terribles révélations sur les dérives de l’armée israélienne à Gaza

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En septembre 2014, soit un mois après l’opération militaire « Bordure protectrice », au cours de laquelle environ 2200 palestiniens (dont 1500 civils) et 73 israéliens (dont 67 soldats) ont trouvé la mort, Benjamin Netanyahu affirmait que l’armée israélienne était « la plus morale du monde ». L’ONG israélienne Breaking the silence (Rompre le silence) n’est pas d’accord, et elle le fait savoir. Elle publie un recueil d’entretiens anonymes, qui accusent Tsahal d’avoir causé un nombre sans précédent de victimes civiles en recourant à la force sans discrimination pendant la guerre de Gaza. Ces témoignages permettent d’expliquer dans une large mesure pourquoi les combats ont été aussi meurtriers.

Depuis 2004, l’ONG israélienne Breaking the silence révèle des faits de guerre tabous. Ses membres fondateurs ne se cachent pas derrière l’anonymat, même si les témoignages qu’elle recueille auprès de soldats sont eux, sont anonymes. Le  dernier rapport de l’organisation – 240 pages publiées la semaine dernière comprenant des témoignages directs anonymes de soldats et d’officiers qui ont servi dans la bande de Gaza comme combattants ou dans des rôles de soutien – est de loin leur plus ambitieux : il cherche à changer la façon dont Israël fait la guerre. Breaking the silence, qui organisait ce mardi à Tel-Aviv le lancement public de ce rapport, souhaite principalement qu’Israël valorise et cherche à préserver la vie des citoyens de Gaza et à limiter les dommages collatéraux.

« Si vous voyez quelqu’un, tirez ! » C’est l’ordre qu’ont reçu des soldats israéliens envoyés dans la bande de Gaza, durant la guerre de l’été 2014. Avant l’opération, les soldats israéliens avaient été briefés par leurs supérieurs. « Vous ne trouverez pas de civils dans les zones d’intervention. Si c’est le cas, ils sont forcément suspects », leur ont-ils affirmé. Plusieurs témoins rapportent des scènes d’exécutions comme celle de ces deux femmes palestiniennes, un matin, qui marchent dans un jardin à 800m des forces israéliennes. Elles ont été repérées par un drone et ont été tuées, sans qu’aucune arme n’ait été retrouvée sur elles.

D’autres témoignages font état d’attaques délibérées contre des civils, comme ce vieil homme palestinien abattu par un soldat israélien alors qu’il ne représentait apparemment aucun danger. Des troupes avaient été prises pour cibles quelques heures avant, et les soldats étaient apparemment sur les nerfs. L’armée avait aussi fait la liste des bâtiments sensibles, comme des écoles de l’ONU par exemple, à ne pas viser, sauf accord préalable du haut commandement. Mais la provenance des tirs des combattants palestiniens n’était pas toujours claire. « Au final, on bombardait tout », raconte un commandant d’infanterie. Les témoignages montrent que les distinctions entre ennemis combattants et civils, le principe de proportionnalité et de précaution, ont été largement brouillées.

« Si nous n’agissons pas pour mettre fin à cette tonte perpétuelle du gazon, en Cisjordanie et à Gaza, il ne pourra y avoir que davantage de morts et de destructions des deux côtés. Seul un combat politique déterminé à faire cesser ce contrôle est susceptible d’empêcher la prochaine guerre et d’apporter tranquillité et bien-être aux peuples de la région. Seule la liberté des Palestiniens peut garantir la liberté et la sécurité des Israéliens », déclarait Yehuda Shaul, vétéran et cofondateur de l’ONG dans les colonnes du Monde.

« Ce travail soulève le soupçon dérangeant de violations des lois humanitaires, explique l’avocat Michael Sfard, qui conseille l’ONG depuis dix ans. J’espère qu’il y aura un débat, mais j’ai peur qu’on parle plus du messager que du message. » « Ce qu’il ressort de ces témoignages, c’est un échec éthique énorme de la part de l’armée israélienne », déclare Yuli Novak, le directeur de Breaking The Silence, qui réclame une enquête indépendante.

Dans un communiqué, l’armée se dite prête à « examiner toute plainte crédible », mais affirme ne pas avoir eu accès aux témoignages de l’ONG, avant publication. Or, Breaking the Silence vient de rendre public un mail envoyé le 23 avril dernier au chef de l’état-major israélien, Gadi Eizenkot. Visiblement, l’ONG voulait présenter ce recueil à l’armée en amont de sa publication. « Nous nous adressons à vous avant la publication des témoignages, en raison de la sévérité et du tableau systématique troublant qui en ressort », peut-on lire. Selon l’ONG, ce mail est resté sans réponse.

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