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Les Etats-Unis, 1er producteur de pétrole au monde

La BP Statistical Review of World Energy (rapport statistique annuel de BP) a bien résumé la situation : « En 2014, l’évolution la plus significative dans l’offre [d’énergie] a sans conteste été la poursuite de la révolution des huiles de schiste aux Etats-Unis. » Selon le groupe pétrolier, la production de brut américain (y compris les liquides de gaz naturel) a augmenté l’an dernier de 1,6 million de barils par jour (Mb/j), à 11,64 Mb/j, « de loin la plus grosse croissance au monde ». Celle de l’Arabie saoudite est restée globalement stable, à 11,5 Mb/j. La Russie, numéro trois mondial, a de son côté extrait 10,84 Mb/j en 2014. C’est ainsi que les Américains ont remplacé les Saoudiens comme premier producteur mondial d’or noir. « Une perspective impensable il y a dix ans » selon M. Dudley, le patron de BP.

Ce n’est pas réellement une surprise compte tenu de la croissance spectaculaire observée par la production américaine grâce à la révolution des hydrocarbures de schiste datant le milieu des années 2000. Depuis 2012, la Russie était devenu leader mondial pour la production d’hydrocarbures (pétrole brut, gaz, produits pétroliers, etc). Fin 2012, l’AIE (Agence internationale de l’énergie) avait fait sensation en prédisant que la barre serait franchie pour le pétrole avant 2020. C’est chose faite, avec une avance confortable sur toutes les prévisions. La production de pétrole non conventionnel, ­concentrée dans les bassins du Dakota du Nord, du Texas, et du Nouveau-Mexique, a atteint à elle seule 3,6 Mb/j l’an dernier selon l’AIE.

« Les implications de la révolution du schiste américain sont profondes », s’est félicité le patron de BP. Elle a contribué pour une très large part à l’augmentation de 2,1 millions de barils de l’offre mondiale. Cela a aussi cependant causé une surabondance sur le marché et a mené à l’effondrement des prix. En juin 2014, le baril avait atteint 115 dollars, un prix historiquement élevé. Il a ensuite chuté de 60 %, avant de se redresser. Le baril de WTI pour livraison en juillet s’échangeait, mercredi, à 61,43 dollars sur le marché de New York et le Brent à 65,70 dollars sur l’Intercontinental Exchange de Londres. Mais la tendance à la stabilisation n’empêche pas la croissance. Pour preuve, Schlumberger, « grande société de services pétroliers, recommence même à embaucher, alors même que le prix du baril est compris entre 60 et 65 dollars ». De quoi « tordre le coup aux à priori selon lesquels le pétrole de schiste n’est rentable que dans des ordres de prix compris entre 70 et 80 dollars » explique Christophe Hecker, co-auteur de « Gaz et pétrole de schiste, révolution planétaire et déni français. »

Nombre d’observateurs ont cru que les prix bas du pétrole allaient fragiliser les producteurs américains, étant donné que l’exploitation de l’huile de schiste coûte bien plus cher que celle de l’or noir traditionnel. Mais les industriels américains ont su s’adapter en misant sur l’indépendance énergétique. Une des secrets de cette réussite est en effet la priorité accordée à la production locale en matière d’hydrocarbures : les États-Unis ont ainsi considérablement réduit leurs importations de pétrole. Les importations américaines de pétrole en 2014 ont atteint moins de la moitié de leur plus haut niveau de 2005 – cédant ainsi la place de premier importateur de pétrole mondial à la Chine. La revue note, par ailleurs, un essoufflement du côté de la demande de pétrole mondiale. La raison? Un relatif ralentissement économique de la Chine. « La consommation de pétrole mondiale a grimpé de 800.000 barils par jour en 2014 ou 0.8 %, soit un peu moins que les moyennes de hausse récentes et beaucoup moins que la hausse de 1,4 mbj connue en 2013 », précise BP.

Toute la question est maintenant de savoir si la tendance va se poursuivre. L’Opep, dominée par l’Arabie saoudite, refusait jusqu’alors de réduire ses quotas de production pour soutenir les prix – au grand dam de producteurs dépendants comme le Venezuela que la baisse du court laissait dans une bien mauvaise passe. Des membres de l’OPEP comme le Nigeria, l’Algérie, l’Irak ou l’Iran ont également besoin de cours élevés pour équilibrer leur budget. Les pays du golfe Arabo-Persique pariaient sur une baisse de la production américaine, basée sur de nouvelles techniques encore en développement et relativement onéreuses, du fait de ces prix bas. Reste à savoir si ces nouvelles les feront changer de stratégie.

 

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