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Le nouveau gouvernement Tsipras : il faut que tout change pour que tout reste comme avant

Le nouveau gouvernement issu des législatives de dimanche, les deuxièmes en huit mois, au cours desquelles la gauche radicale Syriza l’a de nouveau emporté, comprend de nombreux ministres du précédent gouvernement d’Alexis Tsipras (janvier 2015-août 2015), dont l’atout euro-compatible, le ministère des Finances laissé au pro-européen Euclide Tsakalotos. Les pronostics sont allés bon train tout au long de la longue journée de tractations, avec des rumeurs de création d’un tout nouveau ministère uniquement consacré à la coordination et à l’application du nouveau mémorandum signé avec les créanciers du pays le 13 juillet. Mais, finalement, c’est un organigramme assez proche du gouvernement précédent qui a été retenu, avec seize ministères dont trois grosses entités – intérieur, économie et finances. Comme pour le premier gouvernement Tsipras en janvier, les ministres ont prêté serment en deux fois, dans les locaux de la présidence de la République: un premier groupe, parmi lequel M. Kammenos, a prêté serment sur l’Evangile, devant des dignitaires religieux orthodoxes, le second, plus important, a prêté un serment civil au Président de la République Prokopis Pavlopoulos.

La nouvelle équipe issue des législatives de dimanche est largement composée de têtes connues : d’anciens ministres du précédent gouvernement d’Alexis Tsipras (janvier 2015-août 2015). Parmi eux figurent le ministre de l’Economie, du Développement et du Tourisme Georges Stathakis, ainsi que Nikos Kotzias, ministre des Affaires étrangères. Le chef du parti souverainiste des Grecs Indépendants, Panos Kammenos, le surprenant allié du gouvernement de coalition d’Alexis Tsipras, conserve le ministère de la Défense. Le portefeuille de l’Intérieur est attribué à Panayotis Kouroublis, ancien ministre de la Santé. Ioannis Mouzalas, ministre sortant du gouvernement par intérim, qui a su gérer d’une manière efficace l’afflux des migrants en Grèce, conserve son portefeuille. En reconduisant  la plupart de son équipe, Alexis Tsipras fait ainsi le choix de la continuité et récompense les personnalités qui lui sont restées fidèles malgré la fronde de cet été. Ce choix renforce également l’impression que ce scrutin a été uniquement organisé pour purger Syriza de son aile gauche, trop fanfaronne pour les négociations sur la dette et les plans d’aide.

Et cela fait également ressortir une autre caractéristique majeure de ce gouvernement : la forte inclinaison  proeuropéenne. Ainsi, bien que très réservé à l’égard des demandes léonines d’austérité de la troïka, il s’est entouré d’une équipe fermement opposée à la sortie du pays de l’UE, et qui déploiera des efforts considérables pour l’éviter – là où les frondeurs étaient de plus en plus hostile à l’égard de Bruxelles. Cela explique le retour de l’économiste pro-européen Euclide Tsakalotos, artisan du nouveau plan de sauvetage de la Grèce. Il avait déjà occupé ce poste pendant un mois dans le précédent gouvernement d’Alexis Tsipras en succédant au flamboyant Yanis Varoufakis.  En démissionnant le 6 juillet, ce dernier avait permis la signature une semaine plus tard de l’accord entre Athènes et la zone euro sur le troisième prêt alloué au pays. Euclide Tsakalotos, qui devra mettre en œuvre les « réformes » d’austérité, sera assisté par le ministre adjoint aux Finances, Georges Chouliarakis. Le ministre adjoint des Finances, principal négociateur de la Grèce pour la mise sur pied de ce 3e plan d’aide, est lui aussi très apprécié des créanciers.

L’enjeu de la nouvelle équipe est de faire passer au plus vite les douloureuses mesures de redressement consenties à la troïka, pour accélérer la reprise, et asseoir sa crédibilité à l’extérieur avant l’ouverture des négociations sur une réduction de la dette. En parallèle, Alexis Tsipras devra donner des gages à son électorat, tant au niveau économique (ne pa tahir son mandat de gauche) que sur de sa volonté de lutter contre la corruption et le clientélisme gangrenant l’Etat et l’économie. Sans surprise, ses nuits risquent d’être courtes. Un autre dossier brûlant s’est ajouté à la crise économique : la gestion efficace et humaine des flux de réfugiés et migrants qui ont fait de la Grèce leur première porte d’entrée dans l’UE. Le ministère de l’immigration, a été  attribué à Yannis Mouzalas un homme passé par Médecins du monde et connu pour son profil de gestionnaire de crise humanitaire. Ce choix atteste d’un changement de stratégie sur ce point. Alexis Tsipras fait savoir au reste de l’Europe qu’il compte d’améliorer l’accueil des réfugiés.

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