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Volkswagen dans la tourmente après la découverte d’une fraude massive sur les contrôles antipollution

C’est une étude de l’’Université de Virginie-Occidentale qui a mis le feu aux poudres. Mandaté au printemps 2014 pour étudier les énergies alternatives, le laboratoire n’a pu reproduire, en conditions de circulation réelle, les basses émissions avancées par VolkswagenLes Etats-Unis et l’Etat de Californie ont conjointement accusé vendredi le constructeur allemand d’avoir délibérément contourné les règles en vigueur en matière de lutte contre la pollution atmosphérique. L’agence américaine de protection de l’environnement (EPA) reproche au groupe d’avoir équipé des modèles diesel VW et Audi, entre 2009 et 2015, d’un logiciel permettant de contourner les tests d’émission de certains polluants atmosphériques. Les conditions de contrôle sont reconnues, notamment grâce au capot ouvert et au volant fixe. Le logiciel active alors à 100% l’équipement antipollution du véhicule. Lors d’une circulation normale, le logiciel coupe ce mécanisme. La voiture roule alors en dégageant plus de 40 fois le niveau légal autorisé d’émissions pour certains polluants comme l’oxyde d’azote.

La fraude a commencé en 2008 et concernait les modèles équipés d’un moteur diesel de Volkswagen Jetta, Golf, Passat et Beetle, ainsi que de l’Audi A3. Cette mise en cause est d’autant plus dévastatrice qu’elle vient contredire les campagnes de publicité du constructeur allemand, aux États-Unis, qui communiquait précisément sur sa capacité à produire des moteurs diesel plus propres que ses concurrents. Le PDG de Volkswagen Martin Winterkorn a reconnu lundi les faits dans une courte déclaration. « Je regrette personnellement, et profondément, que nous ayons déçu la confiance de nos clients et du public », a-t-il dit. Il a annoncé coopérer à l’enquête des autorités américaines, tout en ayant « ordonné une enquête extérieure. » Le constructeur allemand risque au total une amende de 18 milliards de dollars (16 milliards d’euros), soit 37.500 dollars pour chacun 482 000 véhicules diesel qui ne serait pas aux normes en vigueur.

Lundi matin, soit trois jours après la révélation dans la presse de la fraude sur les contrôles antipollution du groupe Volkswagen aux États-Unis, l’action du leader du secteur automobile mondial a dévissé à la Bourse de Francfort. Le titre a abandonné près de 20%. Cette chute porte à 34% le recul de la valeur boursière de Volkswagen depuis trois mois. Dans le même temps, plusieurs pays ont décidé de consulter les responsables du groupe allemand. La situation de Volkswagen est paradoxale. En juin dernier, le groupe allemand affichait une croissance de 5,3% de ses immatriculations. Le géant mondial vend alors près d’une voiture sur quatre en Europe. Reste qu’en 2014, les bénéfices de la principale division de Volkswagen ont chuté de 14%. Dans le même temps, sa marge de bénéfice d’exploitation est revenue à 2,5% contre 2,9% lors de l’exercice précédent. Le groupe a été rattrapé par la panne du marché chinois, l’un de ses principaux clients et un territoire où VW est le premier acteur étranger. Jusqu’ici, la Chine représentait 40% de ses ventes et la crise du marché asiatique a bousculé la croissance de Volkswagen. Le groupe a ainsi lancé un plan d’économie de cinq milliards d’euros d’ici à 2017, basé sur un arrêt de la production des véhicules les moins rentables et la réduction des équipements les plus coûteux.

Selon l’association Transport et Environnement, qui a publié la semaine dernière une étude sur le sujet , la plupart des constructeurs trichent d’une manière ou d’une autre, puisque seulement 1 voiture sur 10 roulant au diesel respecterait les plafonds d’émission fixés par l’Union européenne. L’enquête a été réalisée sur 23 véhicules neufs produits par six constructeurs (Volkswagen et sa filiale Audi, BMW, Opel, Mercedes et Citroën). Le résultat est inquiétant puisqu’en moyenne, les émissions réelles seraient cinq fois supérieures aux limites établies par les normes européennes. Pour un des modèles Audi testé, ce serait même 22 fois supérieur à la limite légale. D’après l’ONG belge, la raison principale de ces défaillances est un « système de test obsolète, qui permet aux constructeurs d’utiliser des systèmes de traitement des gaz d’échappement moins chers et moins efficaces dans les voitures vendues en Europe. Les tests ne seraient pas représentatifs car le « cycle de conduite » (New European Cycle Drive) utilisé en laboratoire est très peu contraignant. Il serait notamment trop lent et manquerait d’accélération. De plus, la séquence de tests étant connue de tous, certains constructeurs auraient délibérément pensé leur voiture pour réduire les émissions polluantes quand ce cycle bien particulier était détecté.

Ce mardi, la Corée du Sud a annoncé avoir ouvert une enquête et Séoul a convoqué les dirigeants de Volkswagen pour savoir si cette tricherie n’a pas été étendue à d’autres territoires. Si des problèmes étaient découverts, le ministère sud-coréen de l’Environnement a indiqué que son enquête pourrait être étendue à la totalité des importations de véhicules diesel allemands. Et le ministère n’exclut pas un éventuel rappel de ces véhicules à l’issue de son enquête. Les concurrents du constructeur allemand se sont empressés de se dissocier de l’affaire. Lundi, les Etats-Unis ont néanmoins annoncé qu’ils étendaient leurs investigations à d’autres constructeurs automobiles. L’agence fédérale de protection de l’environnement américaine (EPA) a commencé des tests sur des véhicules déjà en circulation produits par d’autres constructeurs pour détecter la présence de possibles logiciels trompeurs. »Le ministre des finances français, Michel Sapin, a demandé une enquête « au niveau européen » sur cette affaire. Selon Sky News, des millions de voitures pourraient être rappelées au Royaume-Uni où l’ONG Transport & Environment group estime que d’autres constructeurs seront concernés.

 

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