Site icon La Revue Internationale

Accidents de la route : peut-on venir à bout du fléau ?

autoroute_distance_de_securite_sr2b.jpgautoroute_distance_de_securite_sr2b.jpg

Un été meurtrier

2015 s’annonce comme une année noire en ce qui concerne les accidents de la route. Un triste constat que l’été a largement renforcé en accusant des taux de mortalité record. Avec une hausse de 19,2 % en juillet et de 9,5 % en août,  l’été 2015 est en effet l’un des plus meurtriers depuis de nombreuses années.

Loin d’être un problème franco-français, les accidents de la circulation sont un véritable fléau planétaire. D’après l’organisation mondiale de la Santé, ce sont près d’1,3 million de personnes qui trouvent la mort tous les ans dans un accident de la route. L’insécurité routière est même devenue la huitième cause de mortalité dans le monde. Elle est la première cause de décès chez les jeunes de 15 à 19 ans et un enfant serait tué toutes les trois minutes.

Les Nations Unies ne sont pas restées sourdes face à ce macabre constat et ont lancé dès 2011 une « Décennie d’action pour la Sécurité routière » avec l’objectif de préserver la vie de 5 millions de personnes sur les routes du monde entier d’ici à 2020.

Afin de lutter contre la mortalité sur les routes, la Sécurité routière française a elle décidé de mettre sur pied une nouvelle campagne de sensibilisation auprès du grand public. Cette dernière présente deux photos d’un ancien rugbyman, Rodolphe Barry, devenu tétraplégique en 2002 après un terrible accident. Le montage des photos fonctionne sur le principe de l’avant/après drame et témoigne d’une tragédie qui peut toucher n’importe qui.

La Sécurité routière est une habituée des campagnes choc et continue de sensibiliser les Français à l’aide d’images fortes et de messages invitant n’importe quel automobiliste, n’importe quel citoyen à redoubler de vigilance quant au respect des règles de sécurité routière. Mais l’impact de ces campagnes n’est en rien suffisant pour faire baisser le nombre de morts sur les routes et le ministre de l’Intérieur s’est engagé à réagir en essayant d’être à la hauteur de la gravité de la situation.

Les 26 mesures de Bernard Cazeneuve

Pour Bernard Cazeneuve, les chiffres de cet été sont le résultat d’une « météorologie très clémente ». Il explique en effet que « beaucoup plus de Français ont pris la route et qu’une minorité de Français se sont comportés en dehors de toute norme, occasionnant des accidents particulièrement mortels ».

Le ministre de l’Intérieur ne se contente pas de jouer les commentateurs. Fin janvier, il annonçait un plan d’action du gouvernement, comprenant 26 mesures s’articulant autour de quatre axes : la sensibilisation, la protection des plus vulnérables, la lutte contre les infractions graves et l’amélioration de la sécurité des véhicules et des infrastructures.

Ce programme a ensuite été renforcé avec l’annonce par le ministre d’une expérimentation de baisse de la vitesse sur « trois axes accidentogènes ». Trois tronçons de routes nationales (RN 7, RN 151, RN 57) vont ainsi voir leur vitesse prochainement passer de 90 à 80 km/h pendant deux ans. Une expérimentation qui sera « transparente, honnête et rigoureuse » selon Bernard Cazeneuve mais qui déçoit certaines personnes œuvrant dans le milieu de la sécurité routière.

Pour la présidente de la Ligue contre les violences routières, Chantal Perrichon, Bernard Cazeneuve ne fait pas preuve de « courage politique » : « M. Cazeneuve se cache derrière l’acceptabilité des mesures par la population pour ne pas prendre de décisions. » Elle souhaiterait que la baisse de la vitesse soit directement appliquée en France sur l’ensemble des routes nationales à double sens sans séparateur de voies, une mesure qui permettrait de sauver 400 vies par an.

Le ministre semble également ne pas entendre les contestations du CNSR, qui n’ont jusqu’à présent pas été consulté pour mettre en place cette stratégie. Devant la montée des accidents de la route, Cazeneuve agit seul, faisant mine d’écouter les conseils d’experts et cherchant à tous prix à ne pas froisser les 40 millions d’automobilistes français. Une position étriquée qui manque d’une portée à l’échelle mondiale préconisée par Jean Todt, président de la FIA (Fédération International de l’Automobile).

La campagne mondiale voulue par Jean Todt

Celui qui officie également en tant qu’envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies pour la sécurité routière pense qu’il est essentiel de mener une campagne mondiale si l’on veut être efficace en matière de sécurité routière. Et pour cela, on doit inciter tous les pays à utiliser l’ensemble des instruments juridiques mis en place à cet effet par les Nations Unis. « Faire naître la volonté politique chez ceux qui pensent que l’immobilisme est la solution la plus rationnelle sera déterminant. » assure-t-il.

Il préconise également d’augmenter les fonds alloués à la sécurité routière, particulièrement dans les pays en développement où ont lieu la majorité des accidents de la route dans le monde. Pour trouver des financements, Jean Todt propose notamment l’entrée en vigueur d’un système de financement qui reposerait sur des contributions prélevées sur les ventes réalisées dans le secteur automobile,  un processus alors calqué sur la taxe de solidarité appliquée sur la vente des billets d’avion et qui finance l’organisation internationale UNITAID.

Il est urgent que le gouvernement français apprenne à travailler avec des organismes internationaux tels que les Nations Unies s’il souhaite parvenir à inverser la courbe de mortalité routière hexagonale. En France, le bilan 2014 et celui annoncé pour 2015 démontrent l’importance de la situation et doivent inciter les pouvoirs publics à revoir leurs outils pour faire baisser le nombre de décès sur les routes de France. L’année dernière,  le ministre de l’Intérieur s’était fixé comme objectif de faire baisser à 2 000 le nombre de morts en 2020. Depuis janvier 2015, 2 253 personnes ont déjà été tuées dans un accident de la route. Un chiffre alarmant alors que la sécurité routière vient d’intégrer l’agenda de développement mondial des Nations Unies.

Quitter la version mobile