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Dominique Ouattara : « La jeunesse est un atout formidable pour l’Afrique »

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Le « berceau de l’humanité » se réveille. La jeunesse du continent africain fait la une de tous les journaux – papiers comme web – depuis quelques temps, et occupe désormais un espace médiatique qui lui a trop longtemps été refusé par le passé. C’est, non seulement, les plus grandes puissances mondiales qui s’intéressent à l’Afrique – formidable terre de développement économique et humain –, mais également l’inverse. « Notre génération et les suivantes sont ouvertes sur le monde », constate ainsi Ladiba Gondeu, 35 ans, chercheur tchadien en anthropologie. « Notre rêve est de bâtir une société nouvelle, mais il se heurte à de nombreux défis qui compromettent le vivre-ensemble », tempère-t-il aussitôt, montrant par là qu’il reste des enjeux à relever.

La jeunesse africaine fait face à plusieurs enjeux

Parmi ces derniers : les conflits meurtriers, éparpillés sur le continent, qui pour des raisons politiques ou religieuses, dans la plupart des cas, mobilisent un nombre impressionnant de jeunes Africains. En février dernier, le monde apprenait avec stupeur et indignation qu’une fillette de 7 ans, munie d’une ceinture d’explosifs et enrôlée par le groupe islamiste nigérian Boko Haram, provoquait – bien malgré elle – la mort d’une dizaine de personnes sur un marché de Potiskum, au nord du Nigéria.

Plus à l’est, au Burundi, le gouvernement de Pierre Nkurunziza, élu en juillet dernier président pour la troisième fois consécutive, emploie des milices de jeunes acquis à sa cause – les Imbonerakure – pour intimider, agresser voire exécuter les opposants au régime. Ces deux exemples, identiques dans leur finalité – le détournement de la jeunesse de préoccupations jugées naturelles comme l’éducation ou le travail –, mais différents dans leur réalisation – les Imbonerakure sont volontaires là où la fillette était obligée par les islamistes –, montrent en tout cas les difficultés que rencontre aujourd’hui la jeunesse africaine.

Sans compter le facteur économique : le paradoxe est tel que, malgré une croissance en moyenne très positive, l’Afrique connait un taux important de jeunes chômeurs – environ 30 %. Comme le relève Jean-Jacques Konadje dans la revue géopolitique de Diploweb.com : « La jeunesse africaine est dans son ensemble et dans une certaine mesure, logée à la même enseigne : chômage, violence, désespoir, oisiveté, précarité, aventure, illusion, analphabétisme, illettrisme et sous-éducation. » En guise de travail, une grande partie des jeunes se contente donc de boulots à la lisière de la légalité, alimentant de facto une économie souterraine importante en Afrique ; en matière d’avenir, une grande majorité ne se prend plus à rêver, alors que toute jeune, où qu’elle fût née, elle doit pouvoir y être invitée.

« L’Afrique est restée unie autour de sa jeunesse »

D’après le rapport Perspectives économiques en Afrique 2015, publié par le Groupe de la banque africaine de développement en partenariat avec l’OCDE et l’ONU, le nombre de jeunes Africains, aujourd’hui de 200 millions, va doubler d’ici 2045. Il apparaît dès lors urgent d’agir pour améliorer le sort de la jeunesse africaine et préparer son futur. Si l’économie doit nécessairement être au centre des débats, d’autres moyens d’actions, comme le sport par exemple, ont tout à fait leur place dans le processus.

Ainsi les Jeux africains dédiés à la jeunesse et au développement ont-ils été conçus dans cette optique ; la onzième édition s’est tenue à Brazzaville (République du Congo) et rassemble plus de 8 000 athlètes venus de 42 pays du continent. Selon le président congolais, Denis Sassou N’Guesso, l’organisation des Jeux révèle combien l’Afrique accorde de l’importance à ses jeunes : « De toutes les luttes et de tous les combats qu’elle a menés et continue de mener, l’Afrique est restée unie autour de sa jeunesse. Il faut s’unir pour mieux agir », a-t-il ainsi déclaré lors de la cérémonie d’ouverture. Le sport a ceci de particulier – et de fort – qu’il est l’un des meilleurs moyens, a priori apolitiques, de fédérer autour de valeurs communes et authentiques.

Mais puisqu’il est inconcevable d’aborder le futur de la jeunesse africaine sans mentionner le développement et la politique économiques qui ont cours dans les Etats, il est intéressant de se pencher sur l’action entreprise par Dominique Ouattara. Très engagée contre le chômage en Côte d’Ivoire, la première dame du pays était d’ailleurs l’invitée de l’université d’été du Medef en France, afin d’exposer cet engagement et, surtout, sa réalisation. « Le continent compte 200 millions de 18-24 ans (…) et sur 100 chômeurs africains, 60 sont des jeunes », a tenu à préciser d’emblée l’ex-chef d’entreprise et actuelle présidente de la fondation Children of Africa, qu’elle a créée en 1998. Pour tenter d’y remédier, dans son pays dans un premier temps, Dominique Ouattara a par exemple mis en place un fonds destiné à financer les projets des jeunes femmes ivoiriennes tout en les formant à la gestion. L’éducation, qui apparaît problématique à bien des égards en Afrique, est d’ailleurs au centre des préoccupations ivoiriennes : la première dame du pays a tenu à rappeler que son mari, le président Alassane Ouattara, avait rendu l’école obligatoire pour les enfants de 6 à 16 ans.

D’autres actions, plus diffuses, sont réalisées par la jeunesse elle-même, qui se prend en main depuis des années pour tenter de contrecarrer cette fatalité qui, jusqu’à présent, voulait qu’être jeune en Afrique n’était pas une sinécure. « Notre génération est active dans le monde associatif », affirme par exemple Ladiba Gondeu. « Elle cherche, à travers ses divers engagements, à créer et à nourrir les liens sociaux : dans les animations des quartiers, les appuis-conseils en matière d’innovations technologiques pour le monde rural ou pour les femmes…, la transformation des produits du terroir, etc. » Plutôt qu’une attitude individualiste, la jeunesse africaine préfère donc la solidarité et l’entraide : deux valeurs très en vogue un peu partout en ce début de XXIème siècle. Et prouve, par là, qu’elle a les mêmes aspirations que la jeune société occidentale.

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