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La lutte contre le braconnage en Afrique plus que jamais d’actualité

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Le braconnage est un véritable fléau en Afrique. Les exemples ne manquent pas et les chiffres sont chaque année toujours plus désolants. Toutefois, les initiatives continuent de donner des motifs d’espoir.

Depuis juin 2015, le braconnage porte un visage et un nom. Celui de Walter Palmer, dentiste américain qui déboursa près de 50 000 dollars pour pouvoir traquer et tuer le symbole du parc national Hwange (Zimbabwe) : le lion Cecil. Alors que les chiffres du braconnage sont régulièrement publiés sans que cela n’émeuve l’opinion publique, le fait divers aura au moins eu un mérite : celui de braquer les projecteurs sur la pratique du braconnage en Afrique et de mettre en avant les initiatives destinées à lutter contre ce fléau.

Chasse et commerce parallèle

S’il est dénoncé depuis plusieurs dizaines d’années, le phénomène commence à devenir très dangereux pour la survie de plusieurs espèces animales. Les chiffres annoncés en juin 2015 par le gouvernement tanzanien sur le nombre d’éléphants dans le pays font froid dans le dos : la population est en effet passée de 109 051 en 2009 à 43 330 en 2014. Le mois dernier, le gouvernent sud-africain annonçait que 1 175 rhinocéros avaient été abattus en 2015 dans le pays, qui abrite 80 % de la population.

Ces résultats catastrophiques s’expliquent d’abord par les intérêts économiques qui ont cours dans le domaine du braconnage. Comme Walter Palmer, ils sont nombreux à débourser des milliers d’euros pour pouvoir chasser lions, léopards, girafes, éléphants. C’est le cas de Melissa Bachman, présentatrice américaine d’une émission de télévision sur la chasse, qui avait provoqué l’ire de nombreux internautes suite à sa photo prise avec son « trophée » en novembre 2013. Une pétition avait été lancée pour son interdiction sur le sol sud-africain, sans succès. L’année précédente, ce n’est ni plus ni moins que le roi d’Espagne, Juan Carlos 1er, qui avait provoqué un tollé aux allures d’affaire d’Etat, avec sa partie de chasse à l’éléphant au Botswana, alors que son pays était en pleine crise économique.

Mais le frisson recherché par ces riches individus n’est pas la seule explication au rythme effréné du braconnage. Le trafic prend bien évidemment une large place. Principal responsable : le marché asiatique, où il existe une forte demande en ivoire et cornes de rhinocéros, qui, une fois broyées, sont censées offrir des vertus curatives et aphrodisiaques. Avec le nouvel an chinois, c’est le marché de l’ormeau et du concombre de mer qui est plein boom. Denrées très appréciées à Pékin, ces deux produits originaires respectivement d’Afrique du Sud et de Madagascar sont plus que jamais en danger ; en octobre 2015, l’équivalent d’un million d’euros de coquillages de contrebande a ainsi été saisi par la police sud-africaine.

Sassou Nguesso, Accrombessi : la lutte dans les pays s’organise

Malgré tous ces excès, le tableau n’est pas tout à fait noir ; une prise de conscience s’opère partout en Afrique. Les initiatives proviennent à la fois des pouvoirs publics et de la sphère privée, comme au Congo-Brazzaville, sous l’impulsion du président Denis Sassou-Nguesso. Alors que ce dernier vient d’annoncer sa candidature à l’élection présidentielle en mars prochain, la lutte contre le braconnage est devenu l’une des priorités du pouvoir en place. Le pays a renforcé ses mesures contre les braconniers, et a décidé de liquider tous les stocks d’ivoire qui seraient dorénavant saisis. L’année dernière, le président lui-même est venu incinérer 5 tonnes d’ivoire à l’occasion de la Conférence internationale sur l’exploitation illégale et le commerce illicite des produits de la faune et de la flore, qui s’est tenue dans la capitale congolaise. Si la population, qui se déplacera massivement aux urnes en mars prochain, aura d’autres sujets en tête au moment de voter, la défense de ce patrimoine national fait sans doute partie de ses préoccupations.

Au Gabon, la situation est sensiblement la même : là aussi, les efforts du pouvoir en place sont à souligner. Tandis que le président Ali Bongo, candidat à sa succession, est parvenu à redresser le pays sur le plan économique – grâce à l’action volontariste de son directeur de cabinet, Maixent Accrombessi –, la lutte contre le braconnage est placée au premier plan. Cette volonté s’est traduite par la création de brigades d’écogardes, chargés de surveiller les 13 parcs nationaux du pays où se trouvent l’un des trésors culturels gabonais : les réserves d’éléphants. Mais les moyens manquent parfois, puisque la plupart des membres de ces brigades ne sont pas armés, et font face à des mercenaires ne reculant devant rien pour continuer à alimenter les marchés. S’il venait à être réélu, cependant, l’effort de financement devrait être poursuivi par le couple exécutif ; à l’inverse, ses adversaires, au premier rang desquels Jean Ping, manquent de crédibilité sur le sujet. Ce dernier a d’ailleurs récemment fait basculer la campagne présidentielle dans l’outrance et l’attaque ad personam.

Enfin, l’Afrique du Sud tente également d’endiguer le phénomène. Alors que le président Jacob Zuma est empêtré dans une crise de légitimité dont il peine à voir le bout, les autorités ont annoncé, en début d’année, la levée du moratoire sur l’interdiction de vente de corne de rhinocéros sur le marché domestique. Le but est clair : il s’agit de faire baisser le « cours de la corne ». Parallèlement, d’autres moyens sont employés pour protéger les animaux : le parc Kruger utilise par exemple depuis peu des drones pour couvrir les zones difficiles d’accès. Une avancée qui est source d’espoirs, puisque le nombre de rhinocéros tués a baissé l’an dernier. Et si 2016 sonnait réellement la charge contre le braconnage ?

 

Crédits photo : AFP

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