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Passeur de réfugiés : un business florissant

Alors que la crise des migrants divise de plus en plus les européens – l’entrée fracassante de l’extrême droite au parlement allemand en est la dernière illustration – l’attention se tourne vers les passeurs. Ces réseaux sont dans le collimateur de l’Union européenne, qui cherche de nouveaux moyens de régulation des flux arrivants sans discontinuité sur son territoire. En plus d’être le principal facteur de pénétration des frontières européennes, ces passeurs sont aujourd’hui à la tête d’un business en pleine explosion.

Les réfugiés paient en moyenne 2 000 euros chacun pour leur passage en Europe. A raison de 20 ou 30 personnes par trajet, cela rapporte environ 280 000 euros de chiffre d’affaires quotidien aux gros réseaux d’Istanbul. Il y a une semaine, un passeur et une famille afghane étaient interpellés à l’aéroport de La Rochelle-île de Ré par les Douanes rochelaises. Les membres de la famille –  un grand-père âgé d’environ 80 ans, un père et une mère âgés de 50 ans et leur fille de 15 ans – avaient en main de faux passeports espagnols, des documents achetés au passeur (pour une somme avoisinant les 5000 euros) – à nouveau des sommes considérables.

Bert Koenders est ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, qui assurent ce semestre la présidence tournante de l’UE est sans appel : « Il faut s’attaquer aux activités cyniques des passeurs, en décourageant les passages clandestins entre la Turquie et la Grèce. » Selon le projet en cours de négociation, seraient renvoyés vers la Turquie tous les migrants, y compris syriens, qui ont gagné la Grèce par la mer Égée dans les pires conditions et au péril de leur vie. La Turquie serait alors en charge de faire le tri entre les bons migrants – ceux ayant « manifestement besoin d’une protection internationale » – et les autres.

Mais ces mesures sont considérées par nombre d’observateurs comme de la poudre aux yeux : depuis le début des années 2000, le gouvernement turc s’est révélé incapable d’éviter que le trafic de migrants s’envole pour devenir l’industrie de plusieurs milliards de dollars de chiffre d’affaires que l’on connaît aujourd’hui. Le balayage des côtes proches des villes du littoral ne suffit cependant pas à intercepter tous les groupes. Les passeurs se sont adaptés en opérant plus furtivement. Malgré des conditions de sécurité inacceptables et les pressions de l’État, la demande pour passer en Europe n’a fait qu’augmenter depuis l’année dernière et le nombre de personnes arrivant sur les côtes européennes devrait continuer de croître, tout comme le nombre de morts.

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