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La Corée du Sud fait sa transition énergétique

Ultra-dépendante des énergies fossiles polluantes pour satisfaire une consommation en constante augmentation, la Corée du Sud souhaite initier sérieusement sa croissance verte grâce aux renouvelables et au nucléaire, énergies bas carbone et rentables.

La Corée du Sud est confrontée à des défis énergétiques majeurs. Avec plus de 50 millions d’habitants, elle occupait en 2014 la neuvième place mondiale en matière de consommation d’énergie. Sa consommation d’énergie primaire atteignait 5,25 tonnes équivalent pétrole (TEP)/habitant en 2013, soit 2,7 fois la moyenne mondiale. Or, le pays du Matin calme dispose de très faibles ressources énergétiques sur son territoire et doit importer la quasi-totalité de ses besoins en pétrole, en gaz naturel et en charbon – qui représentent près de 75 % de son mix énergétique.

Besoins par ailleurs toujours croissants dans ce petit pays asiatique, qui tire sa forte croissance économique (3,3 % en 2014) de ses exportations. La demande d’électricité pourrait doubler d’ici vingt ans tandis que la consommation énergétique totale devrait augmenter à un taux annuel moyen de 0,9 %. Afin d’éviter les pénuries, la Corée du Sud devra trouver la voie vers une plus grande indépendance énergétique – elle dépend aujourd’hui à près de 96 % des exportations pour couvrir ses besoins.

« Mauvais élève »

Selon l’EIA américaine (Energy Information Administration), le pétrole constitue la première source d’énergie du pays. Avec les autres hydrocarbures liquides (incluant les biocarburants), il satisfaisait 39 % de la demande d’énergie primaire sud-coréenne en 2014 (contre 66 % au milieu des années 1990). Or, la Corée du Sud a importé près de 2,5 millions de barils de pétrole brut et de condensats – pétrole gazeux léger – par jour en 2014.

Le charbon satisfait également une part importante des besoins sud-coréens. La consommation nationale a augmenté de 59 % entre 2005 et 2014, et les centrales à charbon cumulent aujourd’hui une capacité de 24,5 GW, soit 30 % de la puissance du parc électrique sud-coréen. Mais le charbon pèse sur la facture énergétique nationale et sur les émissions de gaz à effet de serre. Un problème qui devrait s’aggraver d’ici à fin 2017, lorsque le gouvernement aura installé quinze centrales à charbon supplémentaires.

Afin de réduire sa facture énergétique tout en augmentant sa puissance, la Corée du Sud a commencé à importer du gaz naturel liquéfié (GNL) en 1987. Séoul concentre aujourd’hui 85 % du marché de la construction de méthaniers et domine ainsi le transport maritime de GNL. Le gaz naturel compte actuellement pour 16 % de la consommation sud-coréenne d’énergie primaire. Et le pays, dont la production intérieure de GNL est quasiment nulle, importe 15 % des flux mondiaux et dispose de cinq terminaux de regazéification.

Consciente d’être un « mauvais élève » sur les questions du respect de l’environnement et de la lutte contre le réchauffement climatique, Séoul avait publié en juin 2015 une contribution à la COP21 visant une diminution de 37 % de ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. Quoi que qualifié d’« important » par Ban Ki-moon, le secrétaire général de l’ONU, ce plan est jugé à l’époque « pas à la hauteur des enjeux climatiques actuels » et appelle d’autres mesures – la Corée du Sud pointe à la douzième place des pays les plus émetteurs au monde.  

Respect de l’environnement

Dans ce contexte, comment assurer l’indépendance énergétique de la treizième économie mondiale ? Développer les énergies renouvelables est sans doute une première piste. La Corée du Sud est engagée dans une démarche visant à développer un modèle de croissance verte. En 2014, elle a dévoilé un plan ambitieux pour le développement du marché des énergies propres et renouvelables d’une valeur de 2 000 milliards de wons (1,94 milliard de dollars) qui devrait aussi aider à la création de 10 000 emplois à l’horizon 2017.

Mais la contribution énergétique des énergies renouvelables reste très limitée et la consommation électrique devrait fortement croître, à 610 TWh en 2020, 762 TWh en 2030 et même 816 TWh en 2035. Voilà pourquoi les autorités sud-coréennes ont décidé de miser sur le nucléaire. Deux nouveaux réacteurs dans le sud-est du pays seront construits d’ici 2022 par l’exploitant Kore Hydro & Nuclear Power (KHNP). D’une capacité énergétique de 1 400 MW chacun, ces réacteurs auront une durée d’exploitation de 60 ans et permettront de renforcer la stabilité énergétique du réseau national.

La Corée du Sud exploite actuellement 23 réacteurs nucléaires. Ils ont généré près de 132,4 TWh en 2013, soit 27,6 % de la production nationale d’électricité. Mais le pays souhaite augmenter la puissance installée de son parc nucléaire et prévoit de mettre en service dix nouveaux réacteurs d’ici à 2029. A l’horizon 2035, la puissance du parc nucléaire coréen devrait plus que doubler pour atteindre près de 43 GW installés. La part du nucléaire dans le mix énergétique national sera alors de 29 %.

La production électrique d’origine nucléaire est près de 40 % moins chère que celle issue du charbon. Le nucléaire est en outre une énergie bas carbone, avec des émissions, sur l’ensemble de son cycle, comparables à celles des énergies renouvelables. Alors que d’importants efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre sont plus que jamais nécessaires, la Corée du Sud fait un pari similaire à celui d’autres pays développés (comme la France ou les Etats-Unis) et émergents (comme la Chine, l’Inde, la Russie, voire l’Argentine). Comme eux, la Corée du Sud fait le choix du nucléaire tout en favorisant le développement de nouvelles énergies. Elle souhaite ainsi répondre à ses besoins croissants dans une optique durable et respectueuse de l’environnement.

 

Crédits photo : Reuters/Lee Jae Won

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