Site icon La Revue Internationale

La grogne monte autour du sommet de l’OMS sur le tabac

Climat tendu autour de la COP 7

La Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (FCTC) est depuis plus de dix ans la main armée de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dans sa lutte anti-tabac. Une lutte qui a souvent été décrite comme « aveugle », laissant peu de place aux alternatives et semblant indifférente aux retombées économiques pour les milliers de personnes dont la survie économique dépend de la culture des feuilles de tabac. C’est dans le cadre de la « COP 7 », la septième session de la Conférence des Parties à la Convention-cadre, que plus de 500 cultivateurs venus du monde entier ont été arrêtés lundi par les autorités indiennes pour avoir manifesté leur désaccord face à cette politique drastique.

Ce sommet, qui se tient à Delhi, en Inde, devait être l’occasion de faire le point sur les politiques de santé publique mises en place par les Etats-parties dans leur lutte contre le tabagisme. Décidés à s’en tenir à l’entre-soi, les Etats ont voté à l’unanimité l’éviction de la presse et du public. Une décision vivement contestée pour son caractère anti-démocratique et qui intervient alors que l’OMS avait déjà banni des discussions certains participants dont elle considérait l’influence « indue », comme la Chambre de commerce américaine ou le Centre international pour la fiscalité et l’investissement (ITIC). L’organisation a même fermé ses portes à Interpol, l’organisation internationale de police, pourtant précisément en charge de la lutte contre les trafics illégaux et la contrebande de tabac.

Des réunions aux Maldives financées par les contribuables

Son manque de transparence a fini de ternir l’image de l’OMS, déjà écornée par les scandales autour du financement des précédents sommets. Une série de réunions a été lancée début septembre en vue de la tenue de l’évènement à Delhi. Le choix des destinations est pour le moins évocateur : Philippines, Maldives, Egypte, Fiji et enfin Panama. Mais les critiques ne portent pas tant sur le lieu des rencontres que sur leur financement.

L’organisation fait en effet figurer sur son site internet l’origine des financements, qui n’est autre que le contribuable européen. « Ces ateliers régionaux ont été organisés avec le soutien financier de l’Union européenne » peut-on lire en ligne. Plus alarmant encore, l’Organisation a pris le parti étonnant de convier un représentant de Corée du Nord au sommet de préparation qui se tenait aux Maldives en septembre. Les contribuables européens ont donc directement financé le voyage aux Maldives d’un membre d’un pays peu reconnu pour son ouverture et son respect des droits humains. Et ce n’est pas la première fois que l’OMS se montre peu regardante sur les parties qu’elle entend convier aux débats.

En 2014, Margaret Chan, directrice générale de l’OMS, avait congratulé le président du Turkménistan en lui remettant un « certificat de reconnaissance spéciale pour la contribution apportée à la lutte mondiale contre le tabagisme ». En 2015, le dirigeant turkmène lui renvoyait le compliment en décorant l’OMS de l’Ordre « Bitaraplyk » du Turkménistan, la plus haute distinction du pays.

Mais même fermant la porte aux contestataires extérieurs, l’OMS n’a pas réussi à s’assurer le soutien de ses propres membres. Certains Etats commencent à réagir face aux prises de position toujours plus radicales de l’OMS. La Chine a récemment critiqué l’organisation dont les mesures interfèrent avec la souveraineté nationale de ses membres et impactent de façon disproportionnée les pays en voie de développement. Peut-être serait-il temps que l’Organisation rouvre la porte aux débats et revoit son agenda politique.

Quitter la version mobile