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Sanction du CSA contre C8: le « deux poids deux mesures »

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L’émission de la chaîne C8 « Touche pas à mon poste » s’est vue priver de publicité pendant trois semaines pour deux séquences controversées, diffusées fin 2016. Dans un communiqué, C8 a réagi à ces sanctions du régulateur de l’audiovisuel, les qualifiant de « disproportionnées et discriminatoires ». Ce qui n’est pas complètement faux…

« Touche pas à mon poste » (TPMP), l’émission phare de C8 est dans le collimateur du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel. Depuis la diffusion d’une séquence jugée homophobe par des téléspectateurs (un sketch dans lequel l’animateur piège un homosexuel en direct) et une vague de controverses (deux séquences diffusées à l’antenne en 2016), l’institution avait fait savoir son mécontentement. Le « gendarme de l’audiovisuel » a finalement sanctionné lourdement C8: l’annulation durant trois semaines de la publicité diffusée lors de l’émission de Cyril Hanouna – une sanction qui s’applique également 15 minutes avant et 15 minutes après sa diffusion. Une peine très lourde, qui vise à priver C8 de sa seule source de revenus : la publicité.

Cette décision a été vivement dénoncée par la chaîne de la TNT, à qui elle coûtera 5 à 6 millions d’euros. « Elles témoignent du traitement inéquitable dont « Touche pas à mon poste » est victime de la part du CSA, alors que de nombreuses séquences problématiques diffusées à la télévision et à la radio ne font quant à elles l’objet d’aucune réaction », estime-t-elle dans un communiqué.

Deux poids, deux mesures

Si les propos et les comportements durant l’émission TPMP ne semblent pas toujours respecter les canons de la bienséance, et si certaines séquences peuvent mériter un carton jaune, force est de constater que la réaction du CSA est disproportionnée. Surtout au regard du traitement réservé aux autres dérapages commis sur d’autres chaînes ou radios – notamment du service public. Ainsi, celui de Laurent Ruquier, en ouverture de son émission du samedi soir sur France 2 « On n’est pas couché », en février dernier, déclarant : « C’est quand même le seul Donald dont on aimerait qu’il soit abattu pour cause de grippe aviaire. »

De même, les propos assez violents tenus sur France Inter en septembre 2016 par les humoristes Daniel Morin et Pierre Emmanuel Barré à l’égard de l’éditorialiste Éric Zemmour n’ont pas fait l’objet de sanction, ni même d’un rappel à l’ordre du CSA. Dans les deux cas, la réaction des internautes a été très virulente. Pourtant, quelques extraits de leurs chroniques radio auraient suffi pour alerter le CSA : « Ferme ta gueule ! » ; « il est excité comme un nazi au salon de la cheminée » ; « 9 mois pour rien, c’est l’histoire tragique de la grossesse de la maman d’Éric Zemmour »…

Quelle mission pour le CSA ?

LE CSA dispose de pouvoirs de sanction, applicables pour la télévision et la radio. Il y a tout d’abord l’article 1 de la Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication (dite Loi Léotard) qui expose les « exigences du service public ». Le CSA précise par ailleurs que « si la loi du 30 septembre 1986 est le texte qui donne compétence au Conseil pour veiller au respect de la déontologie dans les médias audiovisuels, d’autres textes de loi lui permettent de fonder les différentes actions qu’il mène. A titre d’exemple, la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse condamne l’injure et la diffamation. »

Le traitement particulier que subit TPMP a fait réagir les réseaux sociaux. Beaucoup y voient de l’acharnement. D’autant que le rapporteur du Conseil d’Etat saisi du dossier estimet qu’une simple amende de 50 000 € serait « proportionnée ». Il faut noter que les pénalités ne concernent pas le sketch jugé homophobe, diffusé en mai à l’antenne, mais des séquences antérieures impliquant les animateurs Matthieu Delormeau et Capucine Anav.

Ces sanctions au portefeuille infligées par le CSA sont un coup dur pour la chaîne, qui a déjà perdu pas moins de 24 millions d’euros sur un chiffre d’affaires de 129 millions d’euros en 2014. Lourde sanction financière, impression de subir un traitement inéquitable…: sans défendre pour autant l’émission incriminée, on peut quand même comprendre la colère de la direction devant la condamnation du CSA.

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