Le chef de l’Etat turc Recep Tayyip Erdogan a été largement réélu dès le premier, lors d’élections marquée par une participation très élevée. Il entre ainsi dans sa quinzième année au pouvoir, avec une nouvelle constitution taillée sur mesure.
Le président sortant Recep Tayyip Erdogan est arrivé en tête de la présidentielle turque avec 52,2 % des voix. Avec un taux de participation d’environ 88 %, ce vote le consacre encore plus confortablement que son dernier score, en août 2014, où il avait obtenu 51,8 % des voix au premier tour. Par ailleurs, Erdogan a fait mentir les sondages, qui annonçaient un second tour. Il débute donc ce nouveau mandat avec des prérogatives considérablement renforcées par sa réforme constitutionnelle de l’an dernier et par ce regain de popularité.
« La Turquie a donné une leçon de démocratie au monde », a-t-il clamé devant plusieurs milliers de partisans. Depuis le siège de l’AKP il a proféré des menaces envers ceux fui contesteraient sa victoire : « J’espère que personne n’essaiera de semer le doute sur les résultats, de nuire à la démocratie pour masquer ses échecs ». Il visait tout particulièrement son principal opposant, le candidat social-démocrate Muharrem Ince – qui a reconnu lundi sa défaite. Ce dernier a toutefois estimé que la Turquie entrait désormais sous un « régime autocratique ».
Lundi, les observateurs de l’OSCE et du Conseil de l’Europe ont pointé des conditions de campagne très inéquitables avec notamment une couverture médiatique largement favorable au président turc rappelant également que « le jour des élections, des mesures légales importantes ont souvent été omises pendant le décompte ». Dans un communiqué conjoint, Federica Mogherini et le commissaire européen à l’Élargissement Johannes Hahn ont pris acte de cette évaluation – une position quine ravira pas le colérique dirigeant turc.
La Suède a également émis quelques réserves vis-à-vis de la « leçon de démocratie » que revendique Erdogan. « La Turquie n’est pas en position de donner aux autres pays des leçons de démocratie, lorsque le chef de l’opposition (kurde Selahattin Demirtas, NDLR) est en prison depuis longtemps », a déclaré la ministre suédoise des Affaires étrangères Margot Wallstrom. « La question kurde et les développements économiques de la Turquie sont des défis graves. Nous sommes inquiets de la façon dont a évolué la Turquie récemment ».
Au pouvoir en Turquie depuis 2003, d’abord comme Premier ministre puis, à partir de 2014, comme président, Erdogan doit « rapidement » mettre en place le nouveau système présidentiel renforcé qu’il avait appelé de ses vœux. Cette réforme constitutionnelle prévoit le transfert de tous les pouvoirs exécutifs au président qui pourra nommer les ministres et de hauts magistrats, décider du budget, mettre son veto aux mesures votées par les parlementaires et gouverner par décrets. La fonction de Premier ministre sera supprimée.
Après 15 ans à la tête de la Turquie, Erdogan parvient à se maintenir au pouvoir malgré une société très divisée. Il devra faire face à des enjeux de taille, notamment le ralentissement économique qui menace son pays, l’inflation de plus de 11 % et une livre turque en chute libre.