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Mali : une élection pour dire non à l’insécurité

L’élection présidentielle malienne aura lieu le 29 juillet, dans un climat d’extrême tension. Sur le plan sécuritaire, le bilan du président sortant, Ibrahim Boubacar Keïta, est un échec. Son principal opposant, Soumaïla Cissé, entend bien tourner la page d’un mandat marqué par les scandales et une hausse dramatique de l’insécurité.

Au Mali, la campagne présidentielle est bel et bien lancée. Les électeurs, convoqués aux urnes le 29 juillet, s’y rendront cependant dans un climat que d’aucuns qualifient de délétère. Fait remarquable, la plupart des articles que la presse malienne consacre au scrutin évoquent, en préambule, l’atmosphère de tension qui l’entoure.

Ainsi du Point Afrique, selon lequel il s’agit d’une élection « sous haute sécurité », mobilisant quelque 30 000 membres des forces de l’ordre. Ou du site Maliactu.net, qui titre « Présidentielle sur fond d’insécurité généralisé » : « la grande équation reste la sécurité dans certaines localités, (où) les enlèvements sont récurrents et l’Etat reste absent ». Ultime aveu, le gouvernement lui-même reconnait « que le contexte sécuritaire reste tendu ».

Et pour cause. En dépit des promesses du président Ibrahim Boubacar Keïta, les rapts et attaques perpétrés par des milices armées sont presque quotidiens dans de larges parts du territoire malien. Le 1er juillet, à Gao, une ville importante sur les rives du fleuve Niger, des assaillants ont tué quatre personnes et blessé 25 autres. La semaine suivante, la ville a également été le théâtre d’affrontements entre plusieurs factions armées, faisant craindre le pire pour le jour du scrutin.

IBK largement responsable de l’insécurité

L’un des deux favoris de cette élection présidentielle sous haute tension n’est autre que le président sortant, surnommé par ses compatriotes « IBK ». De par son statut, c’est à lui que les Maliens doivent, en grande partie, l’insécurité qui gangrène leur pays. C’est du moins l’avis de l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé, opposant de la première heure à IBK : « le mandat qui s’achève est un échec. (…) L’insécurité s’est aggravée et s’est étendue. (…) Il n’y a pas eu de direction stratégique dans la mise en œuvre » de l’accord de paix.

Un simple décompte des pertes humaines depuis l’élection d’Ibrahim Boubacar Keïta suffit à prendre la mesure de son échec au plan sécuritaire. Depuis son accession au pouvoir, le 19 septembre 2013, au moins 2 100 civils, militaires maliens et étrangers ont perdu la vie. Une véritable hécatombe, à laquelle le régime n’oppose que de martiales déclarations dénuées de conséquences sur le terrain. De fait, la souveraineté de l’Etat reste contestée dans le nord du pays et le centre, historiquement épargné, s’est embrasé à partir de 2015.

Sur le plan économique, le bilan du président sortant n’est pas plus flatteur. Le chômage reste endémique, particulièrement auprès des populations les plus jeunes, les étudiants fraichement diplômés devant se contenter de jobs alimentaires, quand ils ne choisissent pas l’exil. Une fuite des cerveaux dramatique pour la société malienne, mais compréhensible, alors que près de la moitié des Maliens vit sous le seuil de pauvreté.

Enfin, la mauvaise gouvernance et les scandales à répétition auront achevé de discréditer la présidence d’IBK. Affaire de la surfacturation du jet présidentiel dénoncée par le FMI et la Banque mondiale, affaire de l’acquisition d’avions de chasse inutilisables, multiplication par deux du budget de la présidence, rénovation à grand frais des palais et résidences présidentiels, innombrables frasques dans des hôtels de luxe à l’étranger, corruption et délinquance financière généralisées, etc. : très médiatisés, ces scandales au plus haut sommet de l’Etat seront pourtant restés largement impunis.

Soumaïla Cissé accuse et prend date

L’opposant numéro 1 et principal challenger du président sortant, Soumaïla Cissé, incarne naturellement l’alternance et l’espoir de tout un pays. Dénonçant un régime qui multiplie « conférences, assises, palabres surtout, sur cette paix qui ne vient pas, qui tarde dangereusement et qui semble s’éloigner indéfiniment chaque jour », le leader de l’Union pour la République et la Démocratie (URD) ne retient pas ses critiques.

Aujourd’hui, dit-il en substance, les Maliens vivent dans une angoisse permanente. Au-delà de la pauvreté, de la misère et de l’insécurité qui les assaillent, ils sont tenaillés par la peur du lendemain. Une peur largement nourrie, pour Soumaïla Cissé, par le manque de vision de leurs dirigeants actuels : « l’indécision, l’inaction et l’absence de vision sont les parents de l’échec », a-t-il encore déclaré à ses partisans.

Et le chef de l’opposition malienne de présenter son « projet de bonne gouvernance, un solide et réaliste programme de développement et un pacte national de solidarité sociale et de justice égalitaire ». Pour celui qui se dit convaincu que c’est la survie même du Mali qui est en jeu lors de cette élection, « aucune montagne n’est infranchissable à condition de la gravir en équipe solidaire ».

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