Site icon La Revue Internationale

Assemblée générale de l’ONU : multilatéralisme contre « America first »

Si le Président américain a une nouvelle fois fait profession de nationalisme lors de l’Assemblée générale des Nations unies, nombre de leaders internationaux ont pour leur part appelé de leurs souhaits une coopération multilatérale renforcée – en particulier en Afrique.

La dernière session de l’Assemblée générale des Nations unies, la 73e depuis sa création par la Charte de l’organisation unies, promettait de souligner les divisions croissantes entre les tenants du multilatéralisme et les nationalistes. 130 représentants des États membres se sont déplacés pour l’occasion. Après avoir retiré son pays d’accords internationaux (climatique, économiques, nucléaire iranien…) Donald Trump voulait faire de la dernière assemblée générale de l’ONU la grand-messe du de l’anti-globalisme – et ce d’autant plus que les États-Unis assurent la présidence tournante du Conseil de sécurité de l’ONU.

Lors d’une intervention sous forme de célébration de ses deux premières années à la Maison Blanche, le Président américain est revenu aux fondamentaux du « trumpisme » : rapport de force, protectionnisme et protection des intérêts et de la souveraineté américains. « Les Etats-Unis choisiront toujours l’indépendance et la coopération contre la gouvernance mondiale, le contrôle et la domination », a-t-il déclaré. « Je respecte le droit de chaque nation dans cette salle de poursuivre ses propres coutumes, croyances et traditions. Les Etats-Unis ne vous diront pas comment vivre, travailler ou prier. Nous vous demandons seulement d’honorer nos droits souverains en retour. »

Une vision du monde qui ne convainc pas tout le monde – en premier lieu, Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies. Dans son discours, le chef de l’ONU a appelé à rétablir des leins de confiance, alors que l’ordre mondial est de plus en plus malmené. « Notre monde souffre d’un grave syndrome, celui du déficit de confiance. Troublés, les peuples ne se sentent pas en sécurité. La confiance en est à un point de rupture : confiance dans les institutions nationales ; confiance entre États ou confiance dans l’ordre mondial fondé sur des règles », a-t-il déploré « Le multilatéralisme est menacé au moment même où nous en avons le plus besoin ».

Le Président français, Emmanuel Macron, qui veut devenir le principal contradicteur de Trump sur les questions de coopération internationale, est lui aussi monté au front. Faisant écho au secrétaire général de l’ONU qui déplorait que « le multilatéralisme soit autant critiqué au moment où il est le plus nécessaire ». M Macron a par ailleurs mis en garde contre un glissement de l’ONU vers un modèle similaire à la Société des nations, « c’est-à-dire comme un symbole d’impuissance ». Pour lui, il ne fait aucun doute que la solution viendra grâce un renforcement du dialogue interétatique et des institutions internationales.

« Nous vivons une crise profonde de l’ordre international libéral westphalien que nous avons connu parce qu’il a échoué pour partie à réguler ses propres dérives financières, sociales, climatiques ». Une crise multiforme qui ne pourra être réglée si les états cèdent à la tentation du chacun pour soi. « Nous devons faire toute sa place à l’Afrique », a estimé Emmanuel Macron, qui voit dans ce contiennent « le moteur et central dans la recomposition du système international. » Et pour cause : ce serait sur le continent africain que l’on retrouve « les plus grands défenseurs du multilatéralisme ».

Son appel a d’ailleurs été repris par les chefs d’Etat africains, appelant de leurs vœux une plus grande coopération internationale pour être à la hauteur des enjeux des décennies à venir (climat, paix, développement humain et économique, alimentation…). « Dans aucune autre région, la solidarité transnationale et l’unité ne sont ressenties aussi profondément qu’en Afrique », a lancé le président rwandais, Paul Kagame, notamment à propos des progrès de la situation sécuritaire sur le continent. Le président gambien, Adama Barrow, s’est quant à lui félicité du retour de l’état de droit dans son pays « avec l’appui de nos partenaires ». Le représentant du roi Mohammed VI, Saadeddine El Othmani, a, lui, plaidé pour des « approches innovantes visant à faire avancer le multilatéralisme, qui connaît une crise conceptuelle ».

Matamela Cyril Ramaphosa, président de l’Afrique du Sud, pour sa part souligné la nécessité d’un « engagement commun à faire échec à la pauvreté, au sous-développement et la détérioration de l’environnement » et d’un « engagement commun à faire échec à la pauvreté, au sous-développement et la détérioration de l’environnement ». Muhammadu Buhari, président du Nigeria, s’est joint à ces veux, mais est allé plus loin, en appelant à accélérer la réforme du Conseil de sécurité de l’ONU pour le rendre plus « équitable » et « représentatif ». Une demande ambitieuse alors que les institutions internationales ont tendance à une inertie, souvent raillée.

Comme pour conclure cette parenthèse, le président égyptien Abdel Fattah al-Sisi s’est pour sa part concentré sur les conflits au Yémen, en Syrie et en Libye, qui ravagent le proche orient et sont responsables de crises humanitaires sans précédent. « Nous ne pouvons pas, aujourd’hui, nous contenter de solutions partielles. Des crises de cette ampleur requièrent des solutions globales » a-t-il martelé. Tant d’appels à un renforcement du rôle de la communauté internationale isolent un peu davantage Washington et sa vision anti-globaliste. Mais une question se pose : une coopération internationale est-elle possible sans les Etats-Unis ?

Quitter la version mobile