Site icon La Revue Internationale

Theresa May plaide pour son plan de Brexit devant une Europe

Fragilisée par une fronde ouverte d’une partie de sa majorité, la Première ministre britannique reste inflexible sur sa stratégie pour le Brexit et rejette les exigences « inacceptables » de Bruxelles.

Les négociations étant dans l’impasse depuis plusieurs semaines, le président du Conseil européen, Donald Tusk, a appelé mercredi Londres à « retravailler » ses propositions pour accompagner la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. Le lendemain, les dirigeants européens se rencontraient lors d’un dîner informel à Salzbourg (Autriche) pour faire le point sur la Brexit et les blocages qui empêchent les négociations d’avancer.

Pour May, c’est à l’UE de faire « évoluer sa position ». Elle soutient que son plan, dit de « Chequers », est le bon. « Je pense avoir présenté des propositions sérieuses et réalisables », a déclaré Theresa May. « Il incombe maintenant à chacun de nous de conclure cette affaire », a-t-elle ajouté. Mme May se dit « confiante dans le fait qu’avec de la bonne volonté et de la détermination », les négociateurs pourront « arriver à un accord correct pour les deux parties ».

Les échanges butent toujours sur la question de la frontière irlandaise. La solution préconisée par les 27 prévoit le maintien de l’Irlande du Nord dans l’union douanière faute d’une autre solution satisfaisante. « A ce stade, c’est le point mort. Il n’y a pas de progrès », a déclaré la présidente lituanienne Dalia Grybauskaite. Londres refuse toujours l’assurance de « filet de sécurité » (« backstop ») réclamé par l’UE pour éviter le rétablissement d’une frontière physique.

Le chancelier autrichien Sebastian Kurz, à la tête de la présidence tournante de l’Union européenne, a renouvelé ses appels à plus de flexibilité. « Un Brexit dur, c’est une situation qui ne bénéficierait à personne, et il serait préférable d’arriver à un compromis entre le Royaume-Uni et l’Union européenne » a-t-il rappelé. Une sortie sans accord se traduirait en effet par un retour aux règles de l’OMC et risquerait de créer un vent de panique sur es places financières.

« Nous ne pouvons pas accepter de voir l’Irlande du Nord détachée du territoire douanier du Royaume-Uni, car quel que soit l’endroit où les contrôles auraient lieu, ce serait une atteinte à notre intégrité constitutionnelle et économique » a martelé la dirigeante britannique. « Nous sommes prêts à améliorer cette proposition », a concédé mardi le négociateur en chef de l’UE, Michel Barnier, avant de rappeler sa volonté de « dédramatiser » les échanges.

Pour beaucoup d’observateurs, l’attitude « c’est à prendre ou à laisser » de Theresa May trahit en réalité une situation politique difficile au Royaume-Uni. Après avoir perdu sa majorité absolue en organisant des élections impromptues en juin 2017, elle se retrouve aujourd’hui en situation de faiblesse dans son propre gouvernement. Depuis la mi-juillet on assiste à une véritable fronde chez les Tories, où la minorité très eurosceptique pour qui un Brexit doux suppose trop de compromis.

Dans le même temps, les opposant au Brexit ont multiplié les marches dans les grandes villes du pays, appelant à une nouvelle consultation sur le Brexit. Selon eux, les termes du premier scrutin étaient trop vagues, et beaucoup disent avoir changé d’avis devant les négociations laborieuses. Ils ont été rejoints par Tony Blair (ancien Premier Ministre travailliste) et John Major (conservateur), Sadiq Khan, (le maire travailliste de Londres) ou encore Vince Cable (le chef du Parti libéral-démocrate).

Ce dernier estime qu’« il y a énormément de personnes qui n’acceptent tout simplement pas d’être entraînées dans un divorce désordonné, coûteux, qui n’acceptent pas que le pays ne puisse pas changer d’avis ». Mais Mme May, déjà prise dans deux bras de fer, a réaffirmé avec force qu’il n’y aurait pas de second référendum sur le Brexit. Selon elle, un second vote constituerait selon elle « une trahison grave » du choix des Britanniques.

 

Ces incertitudes ont déjà des conséquences sur l’économie Britannique. Ainsi, « BMW, qui fabrique des Mini à Oxford, a décidé de fermer son usine le 1er avril 2019 si aucun accord n’a abouti [d’ici là], parce que les dirigeants de BMW auront peur des problèmes d’approvisionnement dans les usines du Royaume-Uni », notait Patrick Martin-Genier, enseignant à Sciences-Po, spécialiste des questions européennes.

Tusk a déjà annoncé qu’il proposerait un sommet européen supplémentaire à « la mi-novembre », en plus de celui du 18 octobre initialement censé boucler les tractations.

Quitter la version mobile