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Le Royaume-Uni tourne le dos à l’austérité

Le gouvernement britannique a annoncé son budget pour l’année à venir – la dernière avant le Brexit. Londres y prévoit la fin de sa politique d’austérité et une augmentation des dépenses sociales, tout en rappelant l’importance d’un accord avec Bruxelles.

Lundi, le ministre des finances britannique, Philip Hammond le dernier budget avant la sortie de l’Union européenne, prévue le 29 mars prochain. Il était attendu au tournant par l’opposition mais aussi la majorité conservatrice, divisée comme jamais sur la question du Brexit, pour un exercice de voltige sans filet. Sans certitude d’un accord sur le divorce avec Bruxelles, et avec une majorité très fragilisée, réunir le pays autour d’un projet commun promettait d’être une véritable épreuve de force pour « Phil le comptable ».

Verdict ? Le Ministre a convaincu avec son projet. « J’ai choisi une approche équilibrée », avait-il prudemment déclaré la veille de sa présentation – une copie qui sonne le glas de la rigueur budgétaire mise en place au lendemain de la crise de la dette souveraine européenne. Honorant les engagements de Theresa May sur l’augmentation des dépenses sociales, le ministre a annoncé que d’ici 2024 le NHS devrait profiter d’un budget de 20,5 milliards de Livres Sterling. « L’ère de l’austérité est en train de se terminer mais la discipline sera maintenue », a précisé M. Hammond.

Philip Hammond, a tenu à prévenir que le Royaume-Uni s’en sortira appauvri faute d’un accord avec l’UE. « Nous sommes à un moment crucial dans les négociations avec l’UE », a-t-il argué devant la Chambre des communes, le parlement britannique. « Si l’on fait les choses bien, non seulement nous protégerons les emplois, les entreprises et la prospérité au Royaume-Uni, mais l’accord nous apportera aussi un double avantage : une dynamique grâce à la fin de l’incertitude, et une dynamique grâce à une marge budgétaire que je garde en réserve pour le moment. »

Plus largement, le budget prévoit une baisse d’impôt de 900 millions de livres par an pour les petits commerces, le gel des taxes sur l’essence, un milliard de livres supplémentaire pour le ministère de la défense, ou encore 420 millions de livres pour rénover le réseau routier britannique. Le gouvernement prévoit enfin de remettre à flot le laborieux « crédit universel » (grâce à une enveloppe d’un 1,7 milliard de livres sur cinq ans) et de verser 400 millions de livres aux écoles pour couvrir « tous les petits extras dont l’éducation a besoin ».

Le budget dédié aux dépenses liées au Brexit a lui aussi été augmenté, passant de 500 millions de Livres Sterling à 4,2 milliards, attestant de la volonté de l’actuel gouvernement de trouver un terrain d’entente avec les 27. « Une fois que nous aurons un bon accord avec l’Union européenne et une sortie en douceur de l’UE, nous serons capables de montrer aux Britanniques que les fruits de leur dur labeur seront bientôt récoltés », a assuré le ministre. Dans le cas d’un « no deal », il faudra toutefois « un nouveau budget », a-t-il prévenu.

Pour financer ces largesses, le Royaume-Uni compte aussi introduire une taxe sur les services numériques – sorte de pied de nez, alors que la même mesure piétine à Bruxelles depuis près d’un an. Elle visera les entreprises du secteur dont les bénéfices dépassent les 500 millions de livres et permettrai de lever près de 400 millions de livres (450 millions d’euros) chaque année, afin de « s’assurer que les géants de la technologie prennent leurs responsabilités ». « Un nouvel accord mondial serait la solution idéale », a cependant expliqué Philip Hammond.

Ces annonces n’ont cependant pas su convaincre Jeremy Corbyn, le leader travailliste, qui a estimé qu’ « en dépit des assurances du Chancelier », l’austérité n’était « pas finie ». Pour ce dernier, il s’agit de « saupoudrages en trompe-l’œil ». Elles ont également provoqué une réaction sceptique de l’Institute for fiscal studies – un éminent organisme d’analyse financière indépendant. D’après lui, le gouvernement britannique est déchiré entre deux engagements « très difficilement compatibles », à savoir retrouver l’équilibre budgétaire d’ici au milieu des années 2020 tout en desserrant progressivement les cordons de la bourse.

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