Site icon La Revue Internationale

RDC : Martin Fayulu sera-t-il le candidat unique de l’opposition ?

Les différents partis de l’opposition de République démocratique du Congo ont désigné dimanche le député Martin Fayulu comme candidat unique à l’élection présidentielle de décembre. Cependant, Félix Tshisekedi, ténor de l’opposition, a fait marche arrière le lendemain, sous la pression de sa formation politique, jetant le doute sur l’union de l’opposition.

L’opposition congolaise se met en ordre de marche. Les sept leaders opposés au parti de Joseph Kabila ont réussi, au terme de trois jours de négociations à huis clos à Genève, à s’accorder sur ne candidature unique pour la présidentielle de décembre prochain, en République démocratique du Congo. Afin d’éviter un combat des chefs, seuls quatre d’entre eux avaient été autorisés à se présenter à l’élection : MM. Fayulu et Tshisekedi, ainsi que l’ancien président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe, et l’économiste Freddy Matungulu.

Si l’ancien Premier ministre Adolphe Muzito, Moïse Katumbi, figure de proue de l’opposition en exil, et Jean-Pierre Bemba, ex-chef de guerre et ancien vice-président ne pouvaient pas concourir, après l’invalidation de leurs dossiers par la Commission électorale, ils ont toutefois participé aux choix du candidat. L’annonce du porte étendard de la coalition Lamuka (réveille-toi en lingala et swahili, deux des quatre langues nationales de la République démocratique du Congo) a été faite officiellement par Alan Doss, ancien représentant secrétaire du secrétaire général de l’ONU en RDC.

« Je veux remercier l’éternel Dieu tout-puissant et les leaders de l’opposition » a réagi Martin Fayulu à l’annonce de sa nomination. « Je ne suis qu’un porte-parole des combats pour la liberté et pour la démocratie (…) et je suis convaincu que nous allons réussir à rendre notre pays démocratique, libre et indépendant », a-t-il ajouté. À bientôt 62 ans, le natif de Kinshasa a connu une carrière ascendante au sein de la compagnie pétrolière Exxon Mobil, avant de s’engager en politique dans son pays au début des années ’90.

Le « social-libéral » entend « investir dans le citoyen pour développer la RD Congo ». Cette promesse a trouvé des échos dans un des plus riches du continent africain en termes de ressources (80 millions d’hectares de terres arables, un potentiel hydroélectrique énorme et plus de 1 100 minéraux et métaux précieux d’après la Banque Mondiale) pourtant miné par des inégalités sans pareil (taux de pauvreté 71%, 176e position sur 187 dans l’indice de développement humain calculé par l’ONU). Aujourd’hui, les conflits interethniques et la crise humanitaire grave que traverse le pays le pénalisent considérablement la RDC.

Homme engagé, il avait aussi, devant l’aggravation de la crise politique en début d’année, refusé d’être « un député illégitime » et avait quitté l’Assemblée nationale pour « ne plus continuer à percevoir des émoluments après la fin du mandat ». Il jouit depuis d’une popularité renforcée, à quoi il faut ajouter un ras-le-bol vis-à-vis de la gouvernance de la famille Kabila, aux rennes du pays depuis plus de 20 ans, après un coup d’état visant à chasser Mobutu du pouvoir. Dans un sondage diffusé en juillet, les électeurs congolais se disaient en effet favorables à 70 % aux dirigeants de l’opposition.

Compte tenu du paysage politique congolais actuel, pour le président du parti Engagement pour la citoyenneté et le développement (Ecidé), l’enjeux principal était de s’imposer face au favori Félix Tshisekedi. « Ce choix ne nous inquiète pas, je me demande s’ils auront le temps de se préparer conséquemment face à notre candidat qui dispose d’une équipe qui travaille depuis plusieurs mois », a réagi Tunda Ya Kasende, secrétaire général adjoint du parti présidentiel PPRD. Le parti sortant compte en effet sur attiser les divisions qui existent au sein d l’opposition.

Le parti de Tshisekedi – grand parti historique d’opposition – a ainsi refusé lundi le candidat unique, appelant son poulain à revenir sur l’accord signé la veille avec six autres opposants à Genève. Ce coup de pression de sa base électorale a poussé le fils d’Étienne Tshisekedi, décédé l’an dernier, à retirer son soutien à l’accord transpartisan. « J’ai compris que l’acte posé à Genève a été mal compris et rejeté par la base. Par conséquent, je retire ma signature de cet accord que nous avions signé hier dimanche au nom de l’UDPS » a-t-il expliqué à la presse. Un recul qui affaiblit considérablement l’opposition.

Eve Bazaiba, secrétaire générale du Mouvement de libération du Congo de Jean-Pierre Bemba a appelé ses pairs à apprendre des erreurs du passé. « En 2006, il n’y a pas eu l’unité de l’opposition ; en 2011, il n’y a pas eu l’unité de l’opposition… On ne peut pas le faire trois fois, n’est-ce pas ? » confiait-elle à RFI. Les voix se sont levées pour mettre l’UDPS devant ses responsabilités. Rien n’est cependant joué : « Nous ne nous sommes pas battus pendant 36 ans pour avoir un candidat commun », a déclaré Augustin Kabuya, le secrétaire général adjoint du parti.

Quitter la version mobile