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Pékin et Washington concluent une trêve dans leur guerre commerciale

Lors d’une rencontre lors du sommet du G20 à Buenos Aires, la Chine et les Etats-Unis ont décidé de temporairement suspendre la guerre commerciale dans laquelle ils s’étaient lancés. Les deux pays se sont donnés 90 jours pour trouver un compromis avant de lancer une nouvelle vague de sanctions.

Vendredi et samedi derniers, le président américain Donald Trump et son homologue chinois, Xi Jinping, se sont rencontrés à Buenos Aires pour un dîner de travail bilatéral. La conversation s’annonçait tendue, compte tenu de l’escalade de sanctions intervenue entre ces deux pays après que la Maison blanche ait mis en place des tarifs punitifs sur les exportations d’acier et d’aluminium entrant sur son territoire en mai dernier. Cette mesure protectionniste a immédiatement donné lieu a des ripostes de plusieurs partenaires économiques de Washington, dont l’UE et la Chine.

Cette dernière s’était illustrée par l’intransigeance de sa réponse, rendant coup sur coup. Les États-Unis taxent à hauteur de 25% 50 milliards de dollars d’importations chinoises ; Xi Jinping réplique à l’identique, instaurant des pénalités douanières sur 50 milliards d’exportations américaines sur son territoire. Washington avait alors augmenté à 220 milliards l’assiette de produits taxés (cette fois à 10%) afin de faire plier la Chine – qui a immédiatement fait de même. Trump avait alors menacé d’imposer des taxes douanières sur les 267 milliards d’importations chinoises restantes.

Après une première rencontre entre les deux chefs d’état qui n’avait pas porté ses fruits, Trump avait annoncé un renforcement des sanctions américaines sur ces 220 milliards de produits « made in China » – passant de 10 à 25%. Pékin avait alors immédiatement promis une réponse similaire, et les astres semblaient bel et bien s’aligner pour une guerre commerciale totale entre les deux premières puissances mondiales. Et pourtant, lors du dernier sommet su G20, tenu en Argentine, Xi Jinping a accepté de rouvrir les discussions avec la Maison blanche.

Cette rencontre, à défaut de déboucher sur une entente, a permis aux deux pays de retarder l’entrée en vigueur de la dernière série de sanctions. Cette « trêve » ne durera cependant que 90 jours. Fidèle à lui-même, au sortir de ces deux rencontres, Donald Trump s’est félicité d’une « réunion incroyable et productive, ouvrant des possibilités illimitées pour la Chine et les États-Unis ». Le ministre chinois des affaires étrangères, Wang Yi, s’est pour sa part contenté de saluer un compromis « gagnant-gagnant ».

« Loin de régler le contentieux, l’accord trouvé à Buenos Aires ne fait qu’ouvrir une négociation qui promet d’être longue et compliquée », note Hervé Goulletquer, stratégiste à La Banque postale Asset Management. Parmi les principaux griefs soulevés par les américains – et largement partagés par les européens – on trouve les restrictions d’accès à certains marchés chinois, une faible protection de la propriété intellectuelle, des politiques industrielles déloyales, le rythme trop lent des réformes économiques et le manque de transparence réglementaire.

« Les États-Unis ont envoyé une liste de 400 demandes précises. Pékin a déjà répliqué que 40 % pouvaient être réglés rapidement, 40 % dans les prochaines années, mais qu’il n’y avait pas de solution pour les 20 % restant », précise Hervé Goulletquer. Un accord final est donc loin d’être garanti. Il s’agit toutefois d’un signal positif pour l’opinion publique américaine, après que la majorité ait été mise en difficulté lors des élections de mi-mandat. Il fallait donc marquer les esprits – chose impossible auprès des autres participants au G20, qui rejettent l’approche bilatérale de Washington.

Trump a insisté sur le faut que les sanctions seront bel et bien appliquées si les négociations avec la Chine ne progressent pas de façon satisfaisante – il ne voulait pas que cette ouverture soit perçue comme un signe de faiblesse. Mais il s’agit une nouvelle fois d’un gain de court terme, et ce d’autant que rien n’indique que Pékin envisage de reconsidérer leurs positions. Dans le même temps, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) s’est saisie du différend commercial opposant les États-Unis à l’UE et 6 pays, dont la Chine, à propos des droits de douane imposés par Trump.

L’Organe de règlement des différends de l’OMC doit désormais établir des panels d’experts (tribunal d’arbitrage) afin d’examiner les diverses plaintes. Un autre nuage à l’horizon pour l’administration Trump. A noter, toutefois, que cet organe est actuellement menacé de paralysie car les États-Unis ont refusé la nomination d’une nouvelle équipe juges. Sans résolution de cette question, la cour arbitrale pourrait se retrouver paralysée fin 2019.

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