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Élections législatives en Afrique du Sud : le déclin de popularité de l’ANC

By ITU Pictures from Geneva, Switzerland - Opening Ceremony, CC BY 2.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=72842792

Les électeurs Sud-africains se sont déplacés aux urnes pour élire leurs députés. Selon les résultats provisoires, le Congrès national africain (ANC), au pouvoir depuis 1994, devrait garder la majorité au Parlement. L’ANC est indétrônable : il a remporté tous les scrutins depuis la chute de l’apartheid, il y a 25 ans. Mais les élections de mercredi marquent un net déclin pour le parti historique de Nelson Mandela. Entre scandales de corruption et crise économique, il est confronté à des enjeux cruciaux pour garder la confiance de ses électeurs.

D’après les premières estimations, l’ANC n’obtiendrait que 58,6 % des suffrages, son plus faible score aux élections législatives. Déjà aux élections municipales de 2016, le parti ne remportait que 54 % des voix. Depuis quelques années, l’ANC en en chute libre, étouffé par des scandales.

Pots-de-vin

« Le président, Cyril Ramaphosa, a déclaré sa volonté de lutter contre la corruption. C’est son argument de campagne, il reconnaît les erreurs du parti » explique Victor Magnani, chercheur à l’Institut français des relations internationales (Ifri) et spécialiste de l’Afrique du Sud. Cyril Ramaphosa a succédé à Jacob Zuma, poussé vers la sortie par un scandale en février 2018. Il est soupçonné d’avoir touché des pots-de-vin de la part de Thales, à la signature d’un contrat d’armement de près de 4 milliards d’euros au début des années 2000. Le dossier a été ré-ouvert et Jacob Zuma, initialement blanchi, sera jugé le 20 mai 2019 par la justice sud-africaine.

Un des pays les plus inégalitaires du monde

la Banque mondiale

« Ce n’est pas la seule affaire au cour des dix dernières années, explique Victor Magnani. Zuma a été condamné car il utilisait des fonds publics pour rénover sa résidence privée. » Cyril Ramaphosa, ancien syndicaliste engagé contre l’apartheid et homme d’affaires fortuné (450 millions de dollars selon Forbes 2015), a joué la carte de la transparence dès son arrivée au pouvoir. Il s’est engagé à s’attaquer à la corruption et à la mauvaise gestion des entreprises publiques en remplaçant des cadres.

« Il y a encore beaucoup d’inégalités »

La corruption n’est pas la seule raison du déclin de popularité de l’ANC. Entre 2011 et 2015, trois millions de Sud-Africains ont basculé dans la pauvreté. D’après la Banque mondiale, l’Afrique du Sud a un taux de chômage de 27 % et est « l’un des pays les plus inégalitaires du monde. » « Les électeurs reprochent à l’ANC de ne pas avoir fait assez. La situation n’est pas à la hauteur de leur espérance », résume Victor Magnani. Selon l’Institut sud-africain des relations entre les races (IRR), 20% des foyers noirs vivent dans une extrême pauvreté, contre 2,9% des foyers blancs. Loin de la nation rêvée par Nelson Mandela.

Le jeu des alliances

Seul, le principal parti d’opposition ne rivalise pas. D’après les résultats provisoires, l’Alliance démocratique (DA, libéral) récolterait 23,1 % des suffrages. Pour peser, il pourrait, comme aux élections municipales de 2016, se rapprocher des Combattants pour la liberté (EFF, gauche radicale). Fondé en 2013 et connu pour ses actions provocatrices, le parti est devenu la troisième force politique du pays avec environ 9,5 % des voix. « Le discours de l’EFF trouve écho auprès de la jeunesse et des populations en dehors du système, qui étaient à la base l’électorat de l’ANC, » détaille Victor Magnani. Mais ce n’est pas encore le début de la fin pour l’ANC. « Normalement, Cyril Ramaphosa pourra gouverner sans partenaire. La question des alliances se posera si le parti n’est pas capable d’enrayer son déclin. »

Crédit photo : By ITU Pictures from Geneva, Switzerland – Opening Ceremony, CC BY 2.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=72842792(Wikimedia Commons)

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