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Côte d’Ivoire-France : des relations au beau fixe

La visite express du président Alassane Ouattara à Paris a permis de traiter d’importantes problématiques sécuritaires, économiques et politiques avec son homologue Emmanuel Macron. La proximité entre les deux hommes reflète la proximité entre leurs deux pays, que la France cherche à entretenir afin de profiter de la stabilité et de la bonne santé économique de la Côte d’Ivoire.

Une entrevue brève mais intense 

Mardi 9 juillet, le président de la Côte d’Ivoire Alassane Ouattara a été reçu à Paris au palais de l’Élysée par son homologue Emmanuel Macron. Depuis l’accession de ce dernier à la magistrature suprême, les rencontres entre les deux chefs d’État sont fréquentes (ils s’étaient par exemple rencontrés deux fois en moins de trois mois à l’été 2017). Il s’agissait cette fois d’un tête-à-tête d’une heure trente, qui a donc eu lieu le lendemain de la participation du président français au sommet de l’Union africaine de Niamey.

L’entretien a été consacré à plusieurs problématiques bilatérales et multilatérales.

La problématique sécuritaire, tant en Côte d’Ivoire qu’au niveau régional, a été au cœur des échanges. La France finance en effet à l’ouest d’Abidjan la nouvelle École régionale de lutte contre le terrorisme — dont les travaux ont été lancés en octobre dernier en présence du ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian — et compte sur le pôle de stabilité que représente désormais la Côte d’Ivoire pour pacifier la région.

Sur le plan économique, l’important sujet de « l’éco » – la monnaie commune des 15 pays de l’Afrique de l’Ouest — a été abordé. Monnaie flexible adossée à l’euro, au dollar, au yuan ou au yen, l’éco sera arrimé à un panier de devises. Alassane Ouattara a confirmé sa volonté d’une transition par étape, sans rupture brutale avec le système du franc CFA. Et le président ivoirien, ancien économiste du FMI, est une voix qui compte : à la tête de la « locomotive de l’Afrique de l’Ouest » affichant 7,4 % de croissance l’an dernier, les États membres de la CEDEAO lui avaient confié en 2017 un projet de réforme du franc CFA.

À un an de l’entrée en vigueur théorique de l’éco, le président ivoirien a donc rassuré son homologue français : il n’y aura pas de rupture brutale avec le Trésor français, où se situent les réserves de la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO).

D’un point de vue plus strictement politique, le président Ouattara a également tenu à rassurer Emmanuel Macron sur sa volonté de ne pas briguer un troisième mandat présidentiel. Une manière d’assurer les conditions d’une compétition électorale sereine et sans heurts, afin d’éloigner le spectre de la crise de 2010. Les inquiétudes démocratiques du jeune locataire de l’Élysée portent cependant plus sur la Guinée voisine, ou Alpha Condé entend bien quant à lui effectuer un troisième mandat en modifiant la constitution.

C’est donc un dialogue franc avec un président français pragmatique qui a eu lieu, un dialogue qui reflète la relation de confiance constructive qui existe entre la Côte d’Ivoire et la France.

Une amitié très concrète

La relation spéciale qu’entretiennent les deux pays francophones s’incarne très concrètement dans l’économie. Comme l’a rappelé le 14 juillet l’ambassadeur de France en Côte d’Ivoire, Gilles Huberson, à l’occasion des célébrations de la fête nationale de son pays qui ont eu lieu en présence du président Ouattara, la Côte d’Ivoire et son fort potentiel économique attirent les entreprises françaises. 

Elles sont en effet plus de 200 à y avoir implanté des filiales et plus de 800 entreprises ivoiriennes ont été fondées par des entrepreneurs français. Il s’agit de la plus forte implantation d’entreprises françaises en Afrique subsaharienne, et cette confiance rapporte gros à Yamoussoukro : outre la création de 100 000 emplois, ces entreprises contribuent à hauteur de 50 % aux recettes fiscales de l’État ivoirien. La Côte d’Ivoire est donc logiquement le premier partenaire commercial de la France au sein de la zone franc CFA, et la France est le deuxième partenaire commercial de la Côte d’Ivoire, derrière la Chine.

Une proximité qui s’incarne par exemple dans le métro urbain d’Abidjan, la capitale économique de 4,5 millions d’habitants : le chantier, inauguré fin 2017 par Emmanuel Macron, a vu sa première phase intégralement financée par la France. Il bénéficie de l’expertise hexagonale en matière de transport collectif puisque ce sont Kéolis, Alstom et Bouygues qui ont remporté l’appel d’offres. D’un coût global est estimé à 918 milliards de francs CFA (soit environ 1,4 milliard d’euros), ce projet ambitieux — le premier du genre en Afrique subsaharienne — devrait entrer en fonction en 2023 avec une première ligne de 37,5 kilomètres qui désengorgera une métropole dont le dynamisme est entravé par des embouteillages chroniques. En entretenant ses relations avec la Côte d’Ivoire, la France fait donc plus que maintenir une relation historique. Elle mise sur un avenir commun et investit dans un pays dont l’indéniable potentiel économique et politique est d’ores et déjà une réalité. 

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