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Bolsonaro voit rouge, l’Amazonie brûle toujours

Le torchon brûle entre la France et le Brésil, alimenté par les feux en Amazonie. Alors que le président français a multiplié les sorties sur « une crise internationale » qui menace, « le poumon de notre planète qui produit 20 % de notre oxygène » en amont du G7, qui s’est tenu à Biarritz de samedi à lundi, alors que le Brésil faisait la sourde oreille. Aussi, Emmanuel Macron a annoncé sont intention de s’opposer à l’accord entre l’Union européenne et le Mercosur pour non-respect des Accords de Paris sur le climat par le gouvernement de Jair Bolsonaro, controversé dirigeant brésilien, climatosceptique notoire, dont les prises de position auraient encouragé les orpailleurs clandestins du pays.

Sous la pression, le Brésil a fini par prendre des mesures plus sérieuses dimanche en envoyant notamment deux avions militaires C-130 Hercules afin de luter contre la propagation de ces incendies. Une bonne nouvelle, qui interroge toutefois : pourquoi attendre aussi longtemps alors que les flammes l’Institut national de recherche spatiale fait état de 79 513 feux de forêt depuis le début de l’année sur le seul territoire brésilien, soit « ne augmentation de 83 % par rapport à la même période en 2018 » assure l’organisme. De même, l’Agence spatiale brésilienne a estimé que l’activité actuelle des feux de forêt est inhabituelle par rapport à la majeure partie de la dernière décennie.

« Les feux à basse altitude dans la forêt tropicale ne sont pas rares. Même dans les forêts vierges, les incendies peuvent causer la perte de milliers d’hectares de forêt pendant les années sèches » note Rhett Butler, fondateur du site d’information Mongabay. « La différence entre ces incendies et les incendies que nous connaissons de plus en plus aujourd’hui, c’est leur fréquence et leur niveau d’intensité. Les feux naturels en Amazonie ne sont jamais dévastateurs. Généralement, ces feux ont des flammes qui n’atteignent que quelques centimètres de hauteur et n’ont pratiquement aucun impact sur les grands arbres ou sur la canopée elle-même ».

La guerre des déclarations

S’il a finalement accepté de prendre une première mesure contre ces incendies massifs, Bolsonaro n’a pas du tout apprécié recevoir de leçon. Aussi, son pays a annoncé ce matin refuser une enveloppe de 20 millions de dollars du G7collectée à l’initiative de M Macron pour aider les pays d’Amazonie touchés par ces incendies. Une initiative qui aura valu à ce dernier d’être qualifié de « colonialiste » ; « d’idiot » et de « menteur » pour avoir estimé que « l’Amazonie absorbe 14% du CO2 mondial » et de ce fait, « aucun pays ne peut dire que ça le concerne seul. Depuis, les tensions entre la France et le Brésil se sont substantiellement accrues.

Onyx Lorenzoni, chef de cabinet du président Jair Bolsonaro, y est aussi allé de ses remontrances, déclarant que le budget du G7 sera « peut-être plus pertinent pour la reforestation de l’Europe ». Ce dernier a renchéri, dans un mélange des genres du meilleur goût : « Macron n’arrive même pas à éviter un incendie prévisible dans une église qui fait partie du patrimoine mondial de l’humanité, et il veut nous donner des leçons pour notre pays ». Avant ces déclarations, le ministre de l’Environnement, Ricardo Salles, avait pourtant estimé que l’aide proposée par le G7 était « bienvenue ». Le changement de ton est donc notable.

Bolsonaro, seul contre tous

Cette crise diplomatique, bien qu’elle soit la plus envenimée à ce jour, n’est pas la première passe d’armes entre le Brésil et des pays européens. Le gouvernement allemand a ainsi annoncé début aout la suspension de ses fonds alloués à des projets de protection de l’Amazonie (33 millions d’euros). « La politique du gouvernement brésilien en Amazonie soulève des doutes quant à la poursuite d’une réduction soutenue des taux de déforestation », avait alors expliqué la ministre de l’Environnement, Svenja Schulze. Bolsonaro avait réagi en estimant ne pas avoir pas besoin ce cette aide. La Norvège avait également d’annuler l’envoi de 30 millions d’euros destinés au Fond Amazonie pour les mêmes raisons.

Dimanche, alors que la brouille entre Paris et Brasilia était en pleine gestation, c’est le pape François qui s’est dit « inquiet » pour « ce poumon vital pour notre planète ». Dans son propre pays, Bolsonaro fait face à une contestation croissante pour son attentisme environnemental – certains parlent même de volonté positive de détruire l’Amazonie. Des rassemblements sont prévus dans 40 villes du pays ce week-end pour dénoncer la destruction de la plus grande forêt tropicale de la planète. « La mobilisation est forte au sein des institutions, au congrès, mais la société civile brésilienne est inondée de polémiques violentes tous les jours et peine donc à répondre à toutes ces attaques », déplore totuefois Julia Cruz, avocate spécialisée en droit environnemental auprès de l’ONG Conectas..

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