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Madagascar : cette crise humanitaire dont on ne parle pas

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En raison de la faible médiatisation de la crise climatique et alimentaire qui sévit depuis de nombreuses années à Madagascar, l’île de l’océan Indien peine à attirer les financements et les programmes humanitaires pour venir en aide aux 80 % d’habitants vivant sous le seuil de pauvreté. Certaines entreprises épaulent de leur côté les ONG, comme SFAM, qui accompagne Action contre la faim dans sa lutte contre la malnutrition.

Madagascar, épargnée par la guerre et autres conflits, sans intérêt géopolitique majeur, est un territoire voué à souffrir en silence, loin du tapage médiatique. Voilà ce qu’il faut retenir du quatrième rapport publié par l’ONG Care fin janvier, intitulé « Suffering in silence », qui met l’accent sur les dix crises les moins médiatisées au monde, dont neuf ont lieu sur le continent africain. Avec, tout en haut, la première d’entre elles : la crise alimentaire qui sévit actuellement sur l’île du Pacifique, où les trois quarts de la population vit avec moins d’1,9 dollar par jour.

SFAM Group soutient Action contre la faim

Des organisations humanitaires interviennent sur l’île pour aider les populations à lutter contre la faim et les catastrophes naturelles. C’est par exemple le cas d’Action contre la faim, dont le groupe SFAM est partenaire, qui lutte contre la malnutrition, celle-ci affectant, dans sa forme chronique, près de 50 % des enfants malgaches.

A défaut de financements étatiques, les ONG peuvent au moins compter sur le soutien de certaines entreprises : « Le groupe SFAM soutient Action contre la faim depuis 2016 à travers un centre d’accompagnement social et d’appui nutritionnel pour le traitement de la malnutrition aiguë. [Son] engagement nous a permis de couvrir une partie des dépenses nécessaires au bon fonctionnement du centre qui a pris en charge 1 730 enfants de moins de cinq ans et 319 femmes enceintes et allaitantes souffrant de malnutrition aiguë entre 2016 et 2018 », indiquait récemment l’ONG.

La sécheresse, qui touche 2,6 millions de personnes, sur une population globale de 25 millions est un facteur majeur de la crise alimentaire à Madagascar. Le réchauffement climatique y affecte tout : les habitants, les récoltes et l’économie, basée en grande partie sur l’agriculture et les ressources naturelles de l’île. Régulièrement dévastée par les catastrophes naturelles, comme les vents extrêmement violents, la sécheresse donc, et les invasions d’insectes par exemple.

Changement climatique

« Madagascar est un pays de contraste, une caractéristique renforcée par le changement climatique. En six ans, la région de SAVA au nord-est a connu un important déficit de pluies et une hausse des températures. De plus, le pays est de plus en plus régulièrement touché par les cyclones : les cultures vivrières et de rentes sont souvent détruites, les populations psychologiquement et économiquement sont fragilisées », révèle l’ONG Care.

Résultat, si l’île du Pacifique, le cinquième plus grand territoire insulaire au monde, jouit d’un haut potentiel économique, il est l’un des pays les plus pauvres : plus de 80 % de sa population vit sous le seuil de pauvreté, plus de 50 % des enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition chronique et seuls 32 % de la population rurale ont accès à l’eau potable.

En 2019 déjà, l’ONG relevait dans un rapport que « le changement climatique joue un rôle croissant et souvent amplifiant dans les crises humanitaires négligées par l’opinion publique mondiale, comme à Madagascar ». « Non seulement les habitants des pays les plus pauvres du monde sont les plus vulnérables au changement climatique, mais ils sont aussi les moins bien équipés pour faire face à ses impacts croissants », notait à ce titre Sven Harmeling, responsable de la politique de Care sur le changement climatique.

« Les médias ne doivent pas fermer les yeux »

Pour épauler la population, tandis que 2,6 millions de Malgaches ont besoin d’une assistance humanitaire et 916 000 d’entre eux manquent de nourriture, pas de grands raouts internationaux, aucune collecte de fonds gigantesque, seulement quelques initiatives éparses, comme celle conduite par SFAM ou par le père Pedro, un prêtre argentin, qui a fondé en 1989 l’association humanitaire Akamasoa, dont le mantra est « aider sans assister ». Construction de maisons, puis de villages, travail pour les adultes, enseignement pour les enfants : en trente ans, quelque 500 000 Malgaches auront été aidés par l’association catholique.

Pourtant, de l’aveu même du prêtre, qui a reçu en septembre dernier le pape François pour le trentième anniversaire d’Akamasoa, ce qui manque cruellement, ce sont les fonds. Or, ce n’est pas en maintenant le silence autour de la crise humanitaire et alimentaire qui sévit à Madagascar que les choses iront en s’arrangeant, estimait l’an dernier Sven Harmeling. Raison pour laquelle « les médias ne doivent pas fermer les yeux sur ces crises et sur le rôle du changement climatique. Une plus grande attention de leur part pourrait contribuer à pousser les décideurs du monde entier à prendre les mesures de grande envergure nécessaires ».

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