Le mouvement antiraciste aux Etats-Unis tente de passer des paroles aux actes, certains, tels que Kenneth Frazier, patron du laboratoire pharmaceutique Merck, dénonçant les «platitudes» des communiqués de presse des entreprises à la suite du mouvement Black Lives Matter. Agir concrètement en remboursant les soins de santé ou en développant l’accès aux écoles prestigieuses pour les étudiants afro-américains seraient aujourd’hui les principaux facteurs d’intégration et d’inclusion.
Il se pourrait que la mobilisation suite à la mort de George Floyd constitue le plus grand mouvement social de l’Histoire des Etats-Unis. Ce dernier compterait entre 15 et 26 millions d’Américains – soit entre 4,5 et 8% des habitants – qui ont participé à des manifestations contre les violences policières à l’égard de la communauté noire. « Depuis le 26 mai, date des premières manifestations à Minneapolis, le Times a recensé plus de 4 700 manifestations, dans 2 500 villes différentes » précise le magazine Slate.
Les manifestations ont fait place à des grèves. Lundi 20 juillet, des dizaines de milliers de travailleurs de 200 villes américaines, n’étaient pas à leur travail afin de dénoncer le racisme systémique de la société américaine, ainsi que les inégalités, fortement accentuées avec l’épidémie du Covid-19. Pour ceux qui ne pouvaient techniquement pas quitter leur poste de travail, ils ont posé un genou à terre, sur leur lieu de travail, «pendant 8 minutes et 46 secondes», parfois encouragés par leur entreprise.
Netflix, Uber Eats … les entreprises s’engagent
Il faut remonter à 2013 pour comprendre l’origine du mouvement : George Zimmerman, qui avait tué un adolescent noir, est acquitté par la justice. En réaction, la militante Alicia Garza écrit un billet qui se termine par « Black People. I love you. I love us. Our lives matter. ». Patrisse Cullors republie le billet sur Twitter. Ainsi est né le hashtag #BlackLivesMatter. Face à l’oppression raciale vécue par les Noirs aux Etats-Unis, la lutte antiraciste s’impose.
Depuis, des initiatives ont vu le jour de la part des entreprises américaines. Ainsi, Netflix a annoncé un don de 2% de ses recettes aux organismes financiers aidant les communautés afro-américaines. Uber Eats a supprimé les frais de livraison pour les restaurateurs noirs. D’après Evelyn Carter, directrice de l’agence Paradigm, la rapidité avec laquelle des entreprises et des célébrités mettent en place des mesures concrètes suite aux anecdotes publiées sur les réseaux sociaux « fait vraiment penser à #MeToo ».
Virgil Abloh, Drake… les célébrités aussi
Du côté des personnalités publiques, le musicien Drake annonçait avoir fait un don de 100 000 dollars à National Bail Out, un collectif prenant en charge la caution de personnes noires incarcérées. Le chanteur canadien The Weeknd aurait également versé 200 000 dollars à l’organisation Black Lives Matter Global Network, 200 000 dollars à une campagne de soutien à Colin Kaepernick et 100 000 dollars à National Bail Out.
Face au peu de dirigeants noirs dans la société américaine, certaines personnalités ont voulu s’engager pour améliorer l’accès à l’enseignement supérieur et à l’emploi aux étudiants afro-américains. C’est par exemple le cas du couturier Virgil Abloh, directeur artistique chez Louis Vuitton (appartenant au groupe français de luxe LVMH), et premier Afro-Américain à diriger les vêtements pour hommes de la marque. Le couturier a récemment déclaré qu’il avait récolté un million de dollars pour un fonds de bourses destiné aux étudiants de mode noirs, par le biais du Fashion Scholarship Fund. LVMH s’était déjà distingué, dès 2017, en créant un partenariat avec Rihanna, première femme noire à la tête d’une marque chez le groupe de Bernard Arnault.
De quoi réveiller les consciences sur un véritable problème d’inclusion au sein des grandes entreprises. En 2019, 39 % des entreprises de l’indice S&P 500 (indice boursier basé sur 500 grandes sociétés cotées sur les bourses aux États-Unis) n’avaient aucun Afro-Américain à leur conseil d’administration. Les Noirs représentent 13,4 % de la population et la question se pose aussi pour les Hispaniques, dont la part progresse aux Etats-Unis (18,3 %). Parmi les entreprises de Fortune 100, une liste des 100 premières entreprises aux États-Unis, seuls 4,4 % des administrateurs étaient hispaniques en 2018.