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Côte d’Ivoire : vers la normalisation politique

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Après la présidentielle d’octobre 2020, marquée par les violences, la Côte d’Ivoire semble avoir pris le tournant de l’apaisement politique. A la suite des législatives de mars 2021, scrutin inclusif témoignant de la vitalité démocratique du pays, le pouvoir multiplie les gestes d’apaisement. Le retour de Laurent Gbagbo, attendu rapidement, pourrait bien parachever cette réconciliation et placer la Côte d’Ivoire sur la route de la normalisation politique.

Après les dangers, une vie politique apaisée

La Côte d’Ivoire en a-t-elle fini avec des décennies d’affrontements politiques ? En octobre 2020, l’élection présidentielle s’était soldée par la victoire d’Alassane Ouattara, au prix de violences ayant fait 87 morts et près de 500 blessés. Dans ce contexte, beaucoup craignaient que les élections législatives de mars ne voient de nouveau le pays s’embraser. De quoi pousser partisans et opposants au pouvoir à multiplier les appels au calme, à l’instar de Pascal Affi N’Guessan. Emprisonné après l’élection présidentielle puis remis en liberté conditionnelle, le président du Front Populaire Ivoirien disait espérer que « cette élection fonde un nouveau départ pour notre pays sur la voie de la démocratie et de la stabilité politique ». Pour l’heure, l’histoire semble lui donner raison. Le scrutin législatif n’a finalement pas été celui de tous les dangers. Bien au contraire : pour la première fois depuis 1995, l’ensemble des principales forces politiques ivoiriennes ont participé aux élections. Un scrutin inclusif, et un bon score de l’opposition qui consacre la vitalité démocratique de la Côte d’Ivoire. Un apaisement salué en avril par le Premier ministre ivoirien Patrice Achi : « Nous nous félicitons de la normalisation de la vie politique en Côte d’Ivoire, à travers la reprise des activités de toutes les institutions de notre pays, notamment l’Assemblée Nationale et le Sénat. Cela consacre la marche en avant de la démocratie et marque ainsi, non seulement la reprise de la vie politique, mais également de la vie économique et sociale ».

Gestes de réconciliation

Une situation pacifiée qui risquerait d’être éphémère si l’exécutif n’en avait fait une pierre angulaire de sa politique. Engagé dans une politique de réconciliation nationale, le chef de l’Etat Alassane Ouattara ne manque pas une occasion d’en appeler au pardon et à l’amour entre les ivoiriens, comme récemment lors de la prière marquant la fin du Ramadan : « La Côte d’Ivoire a besoin de paix pour avancer, la Côte d’Ivoire a besoin de fraternité et les Ivoiriens ont besoin d’amour les uns envers les autres » a ainsi exhorté le président. Des paroles qui résonnent bien davantage qu’un simple vœu pieu. En témoigne la libération de prisonniers politiques, parmi lesquels Pulcherie Gbalet, véritable figure de la société civile ivoirienne. Après être sortie de prison, elle a appelé fin avril à « une véritable réconciliation » nationale, espérant que le troisième mandat d’Alassane Ouattara sera celui « de la vraie réconciliation sans ruse et sans faux fuyant ». Autre aspect éminemment symbolique de cette politique de réconciliation, le retour de certains partisans de Laurent Gbagbo, après dix ans d’exil hors du pays. Parmi eux, l’ancien ministre du budget Justin Katinan Koné, Jeannette Koudou, sœur cadette de Laurent Gabgbo, ou encore Damana Pikass. Ce dernier a par ailleurs affirmé être rentré « pour mobiliser autour du discours de la réconciliation et du rassemblement du peuple de Côte d’Ivoire ». Un retour salué par le pouvoir : « Au nom du gouvernement, je voudrais donc leur dire bon retour au pays, bon retour au bercail. Nous sommes tous heureux que vous soyez revenus », s’est exprimé Kouadio Konan Bertin, ministre de la Réconciliation nationale, qui a reçu début mai une délégation des exilés.

Le retour de Laurent Gbagbo : dernier acte de la réconciliation ?

Mais ce retour des exilés ne doit pas faire oublier le plus célèbre d’entre eux. L’ancien président Laurent Gbagbo, acquitté le 31 mars dernier par la Cour pénale internationale (CPI) de crimes contre l’humanité commis pendant la crise électorale de 2010, est attendu en Côte d’Ivoire. Son retour devrait marquer l’apogée du processus de réconciliation. Selon Kouadio Konan Bertin, « Les commissions techniques sont mises en place pour travailler sur la question du retour de Laurent Gbagbo ». La date sera connue lorsque tout sera « prêt » pour l’accueillir. Un retour attendu tant par ses partisans que par le pouvoir, qui voit dans l’ancien président une figure devant parachever la réconciliation : « Ce retour, nous le souhaitons tous, parce que notre rêve est qu’il vienne consolider la paix sociale » a rappelé le ministre. Pour Arsène Brice Bado, directeur adjoint du Centre de recherche et d’action pour la paix (Cerap), « on a le sentiment que le pouvoir en place a envie de normaliser la situation. Le ton des uns et des autres est plus calme, le changement est net. Pourvu qu’ils aillent jusqu’au bout ! ». Ne reste plus, pour Laurent Gbagbo, qu’à réserver son billet, pour définitivement prendre le virage de la réconciliation, et tourner la page des affrontements du passé.

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