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Les ambitions américaines sur la transition énergétique

La transition énergétique implique de fermer les centrales à gaz et charbonLa transition énergétique implique de fermer les centrales à gaz et charbon

centrale-charbon

Le début du mandat de Joe Biden marque le retour à une ambition forte dans le domaine du climat et de la transition énergétique. Ambition déjà affichée durant sa campagne présidentielle. Donald Trump avait certes mis la barre très bas… Le « Leaders Summit on Climate », organisé à l’appel du président américain les 22 et 23 Avril, a donné l’occasion à de nombreux pays d’annoncer des objectifs renforcés de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Les États-Unis visent une réduction de 52% de leurs émissions par rapport à 2005. Le Japon vise une baisse de 46% pour 2030 par rapport à 2013. La Corée du Sud, quant à elle, arrêtera de financer la construction de centrales à charbon à l’étranger[1]. Impressionnantes et gages de bonne volonté au premier abord, ces promesses sont insuffisantes pour maintenir le réchauffement climatique sous les 1.5 degrés. Pis, la faisabilité de certaines propositions, notamment concernant le secteur de l’énergie, pose question.

Production électrique aux États-Unis

Regardons le cas des États-Unis. 80% d’électricité bas-carbone en 2030 et 100% en 2035[2]. Les objectifs et le planning sont clairs. En 2020, l’électricité provenait majoritairement du gaz naturel (40%) et du charbon (20%) donc des combustibles fossiles[3]. Le nucléaire et les renouvelables contribuaient chacun à hauteur de 20% de la production. Le terme renouvelable inclut l’éolien (8%), le photovoltaïque (2.2%), l’hydraulique (7%), la biomasse (1.4%), et la géothermie (0.4%). Dans un rapport récent, des chercheur du Lawrence Berkeley National Lab étudient en détail l’évolution de la production électrique sur la période 2005-2020[4]. Ce qui permet de mettre les déclarations récentes en perspective.

Sur cette période, on constate deux évolutions majeures. Tout d’abord, une transition du charbon vers le gaz naturel, soutenue par le gaz de schiste peu cher. La part du charbon a ainsi été divisée par 2.6 pendant que celle du gaz doublait. Ensuite, la part des renouvelables a été multipliée par 2.3. Le nucléaire est lui resté stable. La part d’électricité bas-carbone est donc passée en 15 ans de 28% à 40% dans un contexte de consommation stable. Dans les prochaines années, la production nucléaire est vouée, au mieux, à rester stable. Deux réacteurs sont actuellement en construction dans la centrale de Vogtle en Géorgie et le réacteur numéro 2 de la centrale d’Indian Point, dans l’état de New York, vient d’être définitivement arrêté.

Des centrales à fermer

Les espoirs de décarboner la production électrique reposent donc sur les renouvelables, et notamment le solaire et l’éolien. Pour respecter l’objectif de 80% de bas carbone en 2030, il faut quasiment tripler la capacité de production renouvelable en 9 ans. Cela correspond à installer l’équivalent d’un tiers de la production électrique française chaque année. En supposant que la consommation reste constante. Un défi de taille.

En 2018, on comptait 400 centrales à charbon et 1800 centrales à gaz aux États-Unis. Des centrales qui devront fermer.  L’âge de ces centrales est plutôt propice à une transition rapide d’ici 2035 [5]. Seulement 15% des centrales seraient forcées de fermer avant l’âge moyen de mise à l’arrêt pour des centrales thermiques (non nucléaires). Cela nécessite tout de même de gérer la reconversion des employés, les nouvelles capacités de production étant différentes et pas forcément installées au même endroit. Cet aspect social de la transition énergétique est d’ailleurs assez rarement évoqué.

Une transition énergétique ambitieuse

Les objectifs fixés sont donc extrêmement ambitieux et nécessitent une accélération significative du déploiement des renouvelables. On pourrait évidemment inclure le nucléaire dans ces énergies bas-carbone et Joe Biden s’est prononcé pour le développement de réacteurs avancés. Mais les échelles de temps sont trop courtes pour voir la part du nucléaire évoluer de façon significative.

Ces objectifs sont-ils réalistes ? Peut-être. La Chine a installé 130 GW de renouvelables en 2020, l’équivalent de l’ensemble de la puissance installée en France. Mais l’électricité aux USA ne représente que 20% de la consommation énergétique et 32% des émissions de gaz à effet de serre. Il y a donc énormément à faire dans les autres secteurs. L’analyse de ces annonces permet donc de rappeler l’urgence de sortir des combustibles fossiles et la taille du défi que cela représente.


[1] https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/04/23/le-sommet-de-joe-biden-un-tournant-dans-l-action-climatique-avant-la-cop26_6077773_3244.html

[2] https://financialpost.com/pmn/business-pmn/white-house-pushing-for-80-clean-u-s-power-grid-by-2030

[3] https://www.eia.gov/tools/faqs/faq.php?id=427&t=3

[4] https://eta-publications.lbl.gov/sites/default/files/halfway_to_zero_report.pdf

[5] https://science.sciencemag.org/content/370/6521/1171/tab-figures-data

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