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Humayoon Azizi, l’ambassadeur qui résiste aux talibans

Ambassade d'AfghanistanAmbassade d'Afghanistan

Depuis la chute du régime, l’ambassadeur d’Afghanistan à Paris, Humayoon Azizi, refuse de reconnaître les talibans, et continue d’exercer sa représentation diplomatique au nom de la République islamique d’Iran. 

Réduction des effectifs

Triste anniversaire que celui commémoré par l’effectif de l’ambassade lundi, un an exactement après la reprise de Kaboul par les talibans et la fuite du président Ashraf Ghani aux Émirats arabes unis. Mais la catastrophe dans leur pays n’a à aucun moment entamé leur détermination à accomplir leur mission diplomatique. « Nous n’avons même pas hésité, se souvient la consule Maria Akhtari. Il était hors de question de fermer l’ambassade ».

Et un an plus tard, leur volonté n’est en rien ébranlée. « Un groupe ne peut pas représenter une nation, tempête Humayoon Azizi. Tant que les talibans ne formeront pas un gouvernement véritablement inclusif, nous ne les reconnaîtrons pas. En tant qu’ambassadeur, ma responsabilité est de tenir, et j’en suis fier ».

Toutefois, la coupure avec le pays ne s’est bien sûr pas faite sans sacrifices, l’ambassade devant désormais tourner sur ses fonds propres. « Au bout de deux mois, nous avons fait un point sur les finances et il a été clair qu’il fallait réduire les effectifs, explique l’ambassadeur. Nous n’avions plus les moyens de continuer comme avant ». Désormais « nous faisons attention à chaque dépense », admet le diplomate, qui se veut tout de même confiant. « Nous pouvons tenir ainsi des années », assure-t-il.

« Avant le retour des talibans à Kaboul, nous étions dix-neuf, raconte Bakhshir, l’assistant de l’ambassadeur. Aujourd’hui, nous ne sommes plus que neuf, avec trois diplomates ». « Et encore, nous avons de la chance ! rétorque son patron. Dans certains pays, ils ne sont plus que trois ou quatre».

« Politique de fermeté »

« Aussi longtemps que je pourrai aider mon peuple, je resterai », promet la consule Maria Akhtari. Car l’ambassade continue de tourner à plein régime, l’essentiel de sa mission étant désormais tourné sur l’humanitaire. Elle traite avec le Quai d’Orsay et les ONG pour organiser l’envoi des aides vers l’Afghanistan, et accompagne les demandeurs d’asile. « J’essaye de les accueillir au mieux, en faisant en sorte qu’ils se sentent ici chez eux », explique la Consule. Et en ce qui concerne les aides, celles-ci « vont directement aux populations, précise l’ambassadeur. Jamais rien ne transite par les talibans ».

« Je fais de mon mieux pour fournir les papiers nécessaires à mes concitoyens, et en les recevant de manière à ce qu’ils se sentent chez eux », insiste Maria Akhtari. « De toute façon, que voulez-vous que je fasse si je retourne dans mon pays ? ajoute-t-elle, fataliste. Je ne pourrai même pas me rendre au bureau, puisque je suis une femme. Au ministère, je suis déjà congédiée ».

« Nous nous organisons comme nous pouvons », résume l’ambassadeur Azizi. Optimiste, ce dernier regrette toutefois de ne pas célébrer le centenaire des relations diplomatiques entre la République française et l’émirat d’Afghanistan, ouvertes en 1922. « Nous ne le célébrerons pas cette année, vu les circonstances. Mais nous espérons, non, nous sommes sûrs, que la France gardera la politique de fermeté qu’elle a montrée cette première année écoulée avec les talibans. Ce sont les valeurs d’égalité, de respect des droits de l’homme qui sont en jeu. La France doit tenir bon », martèle l’ambassadeur. 

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